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Plus-values immobilières

Taxe sur la cession à titre onéreux de terrains nus rendus constructibles : précisions sur la notion de constructibilité antérieure

Le juge administratif apporte des précisions sur l'application de la taxe nationale sur la cession à titre onéreux de terrains nus rendus constructibles, prévue à l'article 1605 nonies du CGI, notamment quant à l'appréciation de la constructibilité d'un terrain et au délai de reprise applicable.

 

La taxe sur la cession à titre onéreux de terrains nus rendus constructibles, instaurée à l'article 1605 nonies du CGI, s'applique aux terrains nus rendus constructibles du fait de leur classement par un document d'urbanisme postérieurement au 13 janvier 2010. Cette taxe vise à faire participer les propriétaires fonciers aux plus-values réalisées lors de la vente de terrains dont la valeur a augmenté en raison d'un changement de classification urbanistique.

 

Selon l'article 1605 nonies du CGI, la taxe est exigible lors de la première cession à titre onéreux intervenue après que le terrain a été rendu constructible. Pour être assujetti à cette taxe, il faut donc que le terrain soit devenu constructible après le 13 janvier 2010 et que la cession taxée soit la première intervenue après ce changement de statut.

Conformément au I de l'article 1605 nonies du CGI, la taxe s'applique aux cessions à titre onéreux de terrains nus ou de droits relatifs à des terrains nus, du fait de leur classement en terrains constructibles postérieurement au 13 janvier 2010 :

- par un plan local d'urbanisme ou par un autre document d'urbanisme en tenant lieu, en zone urbaine ou à urbaniser ouverte à l'urbanisation ;

- par une carte communale dans une zone où les constructions sont autorisées ;

- par application de l'article L111-1-2 du code de l'urbanisme.

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Par conséquent, les cessions à titre onéreux de terrains nus rendus constructibles ou de droits relatifs à ces terrains, pour lesquels la décision de classement est intervenue au plus tard le 13 janvier 2010 inclus n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe instaurée par l'article 1605 nonies du CGI.

BOI-RFPI-TDC-20-10, n°210

 

Le texte précise les règles déclaratives et de paiement applicables, avec des renvois à divers articles du CGI concernant les plus-values immobilières, notamment pour les règles de contrôle et de contentieux.

 

Rappel des faits :

M. et Mme B ont cédé, par actes authentiques du 31 juillet 2017 et du 16 février 2018, des parcelles de terrain à bâtir situées dans un lotissement. Suite à un contrôle sur pièces, l'administration fiscale les a assujettis à la taxe de l'article 1605 nonnies du CGI pour un montant total de 7 109 €.

Les contribuables ont contesté cette imposition en déposant une requête devant le Tribunal administratif de Lyon le 6 février 2023, complétée par un mémoire le 31 janvier 2024. Ils demandent la décharge de la taxe pour les deux cessions.

 

Ils se prévalent :

  • de la prescription du droit de reprise, qui selon eux devait être d'un an en application de l'article L.173 du LPF, rendant tardive la notification de rectification du 27 mai 2021 ;
  • de la constructibilité continue des parcelles depuis plus de 18 ans, rendant inapplicable la taxe qui ne vise que les terrains rendus constructibles après le 13 janvier 2010 ;
  • du maintien en vigueur du POS adopté par la commune le 9 mars 2000 malgré la loi SRU du 13 décembre 2000 ;
  • de l'existence d'une réponse ministérielle du 19 juin 2008 précisant que l'exonération est acquise même si le terrain, constructible 18 ans auparavant, a pu être temporairement classé en zone non constructible avant de redevenir constructible ;
  • de l'absence de fondement à taxer la quatrième cession de terrain de l'année 2017 et la troisième cession de terrain de l'année 2018, la taxe étant exigible seulement lors de la première cession après que le terrain a été rendu constructible.

 

Le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la requête de M. et Mme B, apportant des précisions importantes sur plusieurs points.

 

Sur le délai de reprise applicable

Le juge écarte l'application du délai de reprise d'un an prévu par l'article L.173 du LPF. Il considère que par le renvoi opéré au VI de l'article 1605 nonies aux dispositions relatives à l'impôt sur le revenu, le législateur a entendu appliquer les règles de contrôle, contentieux, garanties et sanctions propres à cet impôt. Par conséquent, c'est le délai de reprise triennal prévu à l'article L.169 du LPF qui s'applique.

  • Pour la cession du 31 juillet 2017, le délai expirait normalement le 31 décembre 2020, mais a été prolongé jusqu'au 14 juin 2021 en raison de la suspension des délais pendant la crise sanitaire (ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020). La proposition de rectification ayant été notifiée le 1er juin 2021, elle n'était pas tardive.
  • Pour la cession du 16 février 2018, le délai expirait le 31 décembre 2021 et n'était donc pas prescrit au moment de la proposition de rectification du 27 mai 2021.

 

Sur l'appréciation de la constructibilité des terrains cédés

Le tribunal précise que pour l'application de l'article 1605 nonies du CGI, les terrains classés antérieurement dans une zone d'urbanisation future du POS (zone NA) ne peuvent être considérés comme constructibles que si le règlement applicable prévoyait une urbanisation sans modification du document.

 

D’autre part, pour l’application de l’article 1605 nonies du code général des impôts, les terrains classés, antérieurement à l’instauration d’un plan local d’urbanisme, dans une zone d’urbanisation future du plan d’occupation des sols, dite « zone NA », ne peuvent être regardés comme étant alors constructibles que s’ils se trouvaient dans des secteurs où le règlement applicable à cette zone prévoyait une urbanisation sans modification de ce document.

Soulignons que le Conseil d'Etat en 2015 a adopté le même considérant dans un contentieux concernant l'article 1529 du CGI : "Exonération des cessions de terrains classés en terrains constructibles depuis plus de 18 ans"

 

De plus, pour apprécier la constructibilité d'un terrain issu de la division d'une parcelle plus étendue, il convient de considérer uniquement la constructibilité de ce terrain spécifique et non celle de la parcelle d'origine.

 

  • En l'espèce, les parcelles cédées étaient classées en zone d'urbanisation future 1NAEb par le POS approuvé le 9 mars 2000. Bien que le règlement de cette zone admettait certaines constructions, il imposait une superficie minimale de 1 000 m² pour tout terrain support d'une construction. Or, les terrains cédés avaient chacun une superficie inférieure à ce seuil.

 

Par conséquent, ces terrains ne pouvaient être considérés comme constructibles avant le 13 janvier 2010. Ils ne le sont devenus qu'après l'approbation du plan local d'urbanisme (PLU) en 2014 et sa modification le 12 mai 2016 permettant l'ouverture à la construction des parcelles concernées.

 

Sur les autres moyens

Le tribunal écarte également les autres arguments des requérants :

  • La circonstance que l'administration aurait taxé la quatrième cession de l'année 2017 et la troisième de l'année 2018 est sans incidence, les cessions en cause constituant la première cession des terrains concernés depuis qu'ils ont été rendus constructibles.
  • La réponse ministérielle invoquée concerne l'article 1529 du CGI et non l'article 1605 nonies, et ne contient aucune interprétation formelle différente de celle appliquée par le tribunal.

 

Publié le lundi 31 mars 2025 par La rédaction

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