Le mois de mai s’impose traditionnellement comme l’une des périodes parmi les plus importantes du Marché des enchères, car elle est portée par l’activité new-yorkaise de Christie’s et Sotheby’s, qui concentrent à ce moment les dispersions d’art des 20e et 21e siècles parmi les plus qualitatives de l’année. En ce mois de mai 2023, les deux sociétés leaders dépassent 1,7 milliard de dollars d’œuvres vendues en quelques jours pour leurs ventes de prestige. Artmarket by Artprice revient ici sur les résultats clés.
Christie’s réalise 922,194m$ en une semaine
Christie’s a ouvert ses grandes sessions new-yorkaises le 11 mai avec le troisième chapitre de “Masterpieces from the S.I. Newhouse Collection”, la collection de l’ancien président de Condé Nast. Notamment portée par des œuvres de Francis Bacon, Willem de Kooning et Pablo Picasso, celle-ci rapporte 177,792m$, tandis que la vente du soir pour l’art du 20e siècle, organisée immédiatement après, affiche 328,779m$. Christie’s totalise donc 506,6 m$ pour cette journée du 11 mai, bien que la même session avait généré 832,2 m$ lors de l’exercice précédent (le 12 mai 2022).
La meilleure adjudication du 11 mai revient au DOUANIER ROUSSEAU avec Les Flamants (1910), une toile peinte l’année même du décès de l’artiste. Très attendus, Les Flamands se sont envolés pour 43,5m$, un record au décuple du précédent sommet de Rousseau aux enchères (Portrait de Joseph Brummer, 1909).
Douanier Roussier : distribution géographique de son produit des ventes aux enchères depuis 2000 (copyright artprice.com)
La vente de prestige pour l’art du 21e siècle du 15 mai est une belle réussite avec 96% des lots vendus. Elle génère 98,8m$, menée par des œuvres de Jean-Michel Basquiat, Cecily Brown et Yayoi Kusama. La soirée a mis en lumière les artistes féminines du marché de l’art, avec plus de 50% des lots d’artistes femmes, dont des œuvres phares de Simone Leigh, Cecily Brown et Yayoi Kusama.
Le 17 mai, la première partie de l’extraordinaire collection de Gerald Fineberg, couvrant un siècle de création, s’est vendue pour 153m$. Composée de chefs-d’œuvre modernes, d’après-guerre et contemporains, la vente a établi cinq records d’artistes. La partie II qui s’est tenue le lendemain a rapporté 44,113m$ et porte le montant total de la collection Fineberg à 197,16m$.
Au total, Christie’s annonce, pour sa semaine new-yorkaise, un résultat global de 922,194m$ pour les œuvres des 20e et 21e siècles. Une semaine portée par des enchérisseurs issus d’une vingtaine de pays, en plus de ceux présents dans la salle. 34 records mondiaux d’enchères ont été établis, dont 15 pour des artistes féminines comme Agnes Pelton, Alma Thomas et Diane Arbus.
Sotheby’s affiche 799m$ et de fortes enchères en provenance d’Asie
Les sept ventes opérées par Sotheby’s à New York réalisent quant à elles 799 millions de dollars, soutenues par des oeuvres importantes provenant de collections privées (notamment 15 lots issus de la collection Mo Ostin, le légendaire producteur de musique), mais aussi des œuvres d’artistes femmes et d’artistes de couleur, ce qui confirme totalement la tendance actuelle. Si dix œuvres ont dépassé les 20 millions de dollars, retenons ici celles d’Insel im Attersee de Gustav KLIMT (53,2m$) et L’Empire des lumières de René MAGRITTE (42,2m$).
René Magritte : évolution de son indice des prix aux enchères (copyright Artprice.com)
Sotheby’s met surtout en avant le fait que des musées et des collectionneurs d’Asie ont fait des acquisitions majeures lors de sa semaine de vente. Parmi les acquisitions les plus notables par de grands musées, retenons le tableau Interior. The Music Room, Strandgade 30 de Vilhelm HAMMERSHOI, qui a presque doublé son estimation haute, et rejoint une institution américaine pour 9,1m$, soit un record pour l’éminent peintre d’intérieurs méditatifs. Sa provenance aura participé à faire flamber les enchères, car la toile a été conservée sur le même mur pendant plus de 75 ans dans l’ancien appartement que Vilhelm Hammershøi occupa à Copenhague avec sa femme Ida.
Dans son communiqué, Sotheby’s revient sur l’importance de sa clientèle asiatique, et précise que les collectionneurs du continent ont représenté plus d’un tiers de la valeur totale de sa vente de prestige d’Art Moderne, acquérant Insel im Attersee de Klimt et des œuvres de Vincent van Gogh (23,3 m$), Paul Gauguin (10,4m$), Claude Monet (5,8m$), Henri Matisse (4,7m$), Camille Pissarro (2,8m$), Edvard Munch (2,7m$) et Édouard Manet (2,5m$).
Pour ce qui est de l’art contemporain : The Now Evening Auction, véritable baromètre des artistes les plus excitants du marché, révèle que les œuvres d’artistes noirs ont réalisé 20,5 millions de dollars, soit plus de 55 % de la valeur de la vente (37,2m$).
Louise Bourgeois : évolution de son record annuel aux enchères (copyright artprice.com)
Enfin, la vente d’art contemporain du soir a été menée par un exemple exceptionnel des célèbres Spider de Louise BOURGEOIS, l’une des quatre araignées monumentales à avoir jamais été mise aux enchères. La version proposée par Sotheby’s avait été exposée au Musée d’art moderne de São Paulo pendant plus de 20 ans. Sa vente pour 32,8m$ renouvelle le record de Louise Bourgeois, mais aussi le prix le plus élevé pour une femme sculpteur et le troisième prix le plus élevé pour une femme aux enchères.