La cote de David Hockney est en forte hausse : son indice des prix a flambé de +562% depuis le début du millénaire.
Phillips réitère, le 21 septembre à Londres, l’ouverture d’une vente aux enchères entièrement dédiée à l’artiste britannique David HOCKNEY suite à une première vente thématique qui avait rapporté, en septembre 2022, plus de 6,6 millions de livres sterling (±8,2m$). Compte-tenu du succès que rencontre l’artiste auprès des enchérisseurs, Phillips a décidé de faire de ces ventes dédiées un rendez-vous annuel. Chaque mois de septembre sont donc proposées des éditions (dont certaines sont rares), des photographies et des œuvres originales sur papier ou sur toile dont les estimations varient cette fois entre 500$ et 150 000$. Phillips mise principalement sur les œuvres middle-market de Hockney tandis que Christie’s et Sotheby’s tentent d’intégrer des œuvres majeures à leurs ventes de prestige, des œuvres dont les prix peuvent cumuler les dizaines de millions de dollars.
Le 11 mai dernier, Christie’s parvenait à inclure trois toiles importantes de Hockney à sa vente 20th Century Evening Sale, et vendait chacune d’elle entre 10 et 20 millions de dollars. Ces trois belles adjudications – augmentées de trois autres toiles et de près de 450 estampes martelées en 2023 – hissent David Hockney au 10e rang des artistes les plus performants dans le classement provisoire d’Artprice, parmi plus de 135 000 signatures présentés dans le monde des enchères depuis le début de l’année.
Un généreux enthousiasme
L’œuvre de Hockney passionne un public de plus en plus considérable, en témoigne l’incroyable succès de sa grande rétrospective itinérante de 2017-2018 qui attirait plus d’un million de visiteurs entre Beaubourg, la Tate Modern et le Metropolitan Museum. L’événement témoignait d’une véritable ferveur pour son travail en s’imposant comme l’exposition la plus visitée à la Tate pour un artiste vivant et la seconde la plus visitée à Beaubourg, pour un artiste encore en activité.
L’enthousiasme est le même sur le marché des enchères. Actuellement, 85% de ses œuvres trouvent preneurs en ventes publiques, ce qui constitue un taux de réussite particulièrement puissant. À titre comparatif, le taux de ventes pour les œuvres de Picasso – artiste numéro 1 du marché – s’érige à 81% et celui de Basquiat à 73%. Hockney est ainsi l’un des artistes les plus demandés (+67% de lots vendus en 10 ans et +395% en 20 ans), les mieux représentés (plus de 770 lots vendus l’an dernier) et les plus cotés, avec un record absolu établi à 90,3m$ pour sa toile Portrait of an Artist (Pool with Two Figures) (1969) vendue par Christie’s en 2018. Ce record d’adjudication à plus de 90 millions a permis de le qualifier pour un temps ”artiste vivant le plus cher du monde”. C’était l’année de ses 81 ans.
David Hockney : évolution du nombre de lots vendus annuellement aux enchères (copyright Artprice.com)
À la suite du record de 2018, les toiles importantes ré-apparues sur le marché ont été fortement revalorisées. La dernière en date est The Gate (2000), une grande huile cédée pour 14,7m$ le 11 mai dernier chez Christie’s alors que Phillips enregistrait cette œuvre à 6,8m$ en 2016. Ce gain de près de huit millions de dollars, en sept ans seulement, illustre la détermination forte des collectionneurs les plus fortunés à obtenir un chef-d’œuvre de l’un des artistes les plus incontournables de notre époque.
Un autre exemple remonte à février 2020 alors que Sotheby’s mettait en vente The Splash, une icône Pop qui est, comme le précisait alors la responsable des ventes du soir d’Art Contemporain de Londres chez Sotheby’s Emma Baker, “aussi reconnaissable que la série de cris de Munch, les nénuphars de Monet ou les fleurs de Van Gogh”. The Splash flirtait alors avec les 30 millions de dollars, soit plus de huit fois son prix obtenu en 2006.
Exemples de revalorisation de toiles de David Hockney
Henry Geldzahler and Christopher Scott : + 4 850% depuis 1992
vendue 1 million prix marteau en 1992 (Sotheby’s), revendue 49,5m$ en 2019 (Christie’s)
The Splash : + 454% depuis 2006
vendue 5,4m$ en 2006 (Sotheby’s), revendue 29,9m$ en 2020 (Sotheby’s)
A Neat Lawn : + 1780% depuis 1988
Sotheby’s, Londres, 1er décembre 1988 : 585 000$
Christie’s, New York, 9 mai, 2006 : 3,6m$ > augmentation de + 515%
Phillips, New York, 23 juin 2021 : 11m$ > augmentation de + 205%
60 années à revigorer le paysage
Né en 1937 à Bradford (Yorkshire), David Hockney entre au Royal College of Art de Londres en 1957. Dans les années 1960, il s’éloigne de l’expressionnisme abstrait et commence à expérimenter un style mêlant abstrait, figuratif et pop art. Quelques années plus tard, lorsqu’il s’installe à Los Angeles, son travail devient naturaliste et plus autobiographique : il peint des scènes d’intérieur et ses célèbres piscines, notamment The Bigger Splash qui lui vaut une renommée internationale. Il réalise également de nombreux portraits, souvent de membres de sa famille proche ou d’amis. À partir des années 1970, il se consacre davantage aux portraits doubles grand format, aspect qu’il appliquera plus tard dans ses aquarelles. Dans les années 1980, David Hockney utilise la photographie sous forme de collages de photos pour reconstituer des lieux, des paysages, des objets et en explorer de nouvelles dimensions. Ainsi, à travers ses collages, Hockney a rendu l’immensité de paysages comme celui du Grand Canyon. Les peintures abstraites (Very New painting) du début des années 90’ marquent une troisième phase de recherches sur le traitement de l’espace dans la peinture de paysages.
En 2002, Hockney quitte la Californie où il a passé près de quarante ans, pour retourner dans son Angleterre natale. Il y reconsidère à nouveau la place du paysage dans l’histoire de la peinture, s’enthousiasme pour les œuvres de J.M.W. Turner et de John Constable, tout en explorerant le milieu rural britannique. Ses peintures en plein air offrent une palette lumineuse, des tons surnaturels extrêmement audacieux dont la vivacité convoque Matisse et les fringants fauves du début du XXe siècle.
Prolifique, énergique et ingénieux, Hockey expérimente de multiples techniques au cours de sa carrière : photomontages, œuvres d’art sur fax ou photocopieurs à l’époque où ces outils se démocratisent à peine, dessins rapides sur IPhone grâce à l’application Brushes Redux, jusqu’à l’Ipad qui est son principal outil de travail depuis sa sortie en 2010. Aujourd’hui, il dessine sur sa tablette, avec une habileté désinvolte, l’évolution des saisons et de la vie végétale : un travail en plein-air comme aimaient à le faire les impressionnistes mais version digitale.
A 86 ans, Hockney poursuit ses observations sur le monde qui l’entoure (paysages, scènes domestiques, fleurs, autoportraits) et ses conversations entre les techniques classiques et la technologie de son époque, bien loin de l’effervescence de Los Angeles et des retentissants coups de marteau qu’il remporte à Londres ou à New York, puisqu’il est installé à Rumesnil, un petit coin tranquille de Normandie.
Evolution de l’indice des prix des oeuvres de David Hockney aux enchères (copyright Artprice.com)