Le 15 septembre 2008, alors que la banque Lehman Brothers déclarait faillite, Sotheby’s Londres vendait pour plus de 120 m$ d’œuvres contemporaines de l’artiste Damien Hirst dont 3 de ses 5 plus belles enchères à ce jour.
Le 15 septembre 2011 , alors que les banques centrales ont conjointement réactivé les prêts en dollar à moyen terme afin d’endiguer la chute abyssale des marchés financiers des derniers mois (le S&P 500 perdit 14% de la mi-juillet à début septembre), Christie’s New York vendait une dizaine d’œuvre de Maqbool Fida HUSAIN pour plus de 4 m$ dont 2 de ses 5 plus belles enchères de tous les temps .
Signe du temps d’un marché assaini, signe du temps d’un marché qui s’oriente vers l’est, signe du temps d’un marché imperméable aux aléas du climat économique mondial ?
Si le marché de l’art ne semblait pas se préoccuper en septembre 2008 de la crise des « sub-prime », ils subirent de plein fouet la crise économique. Le S&P 500 s’effondrait de 45% en 6 mois entre septembre 2008 et mars 2009 , alors que les prix de l’art perdaient 34% sur la même période.
Entre temps, les banques centrales baissèrent leurs taux et les états injectèrent des milliards dans la recapitalisation des banques afin d’assurer la pérennité d’un système déchu. De même, les maisons de ventes purgèrent leurs vilaines habitudes de prix garantis et de politique d’offres inadéquates. En quelques mois la finance mondiale repartait à la hausse (le S&P 500 gagnait 265% en 2 ans), et les prix de l’art retrouvaient leurs niveaux de 2007 .
Quelques mois plus tard, l’été 2011 affolait les places financières du monde entier, le potentiel défaut de paiement de la Grèce, la dégradation de la note de la dette américaine, ainsi que l’écroulement des banques mondiales tirèrent au rouge l’économie mondiale.
En septembre 2008 confiants en l’évolution économique (50% des votants de l’Art Market Confidence Index restaient confiants en l’évolution positive de la situation économique à 3 mois, alors que 60% estimaient la situation économique actuelle favorable), les acteurs du marché de l’art restaient nombreux à s’attendre à une hausse des prix de l’Art (2/3 des avis). Cette année, l’AMCI a déjà perdu 50% depuis la mi-juillet, et les acteurs sont pessimistes sur la situation économique actuelle et à venir . Si les intentions d’achats restent élevées, les votants sont réservés sur l’évolution des prix de l’art à moyen terme, ceux-ci ne sont pas attendus a augmenter dans les mois à venir.
Après un premier semestre historique, il semble que les professionnels du marché de l’art soient mieux armés et plus lucides pour faire face à la crise . L’attrait grandissant de l’or, ainsi que des placements alternatifs face à la tendance cyclique accélérée des crises financières, replace l’art comme un investissement moins volatile.
La crise de 2008 avait atteint le marché de l’art instantanément, remettant en cause des années de théories estimant les deux marchés corrélés mais en décalage. L’attitude attentiste du marché de l’art en 2011, suite à l’apprentissage difficile de 2008, offre aujourd’hui une alternative face aux différents placements touchés.
Les nouvelles stratégies mises en places ou à venir au sein du marché de l’art (ventes aux enchères en ligne, foires virtuelles, circulation de l’information accélérée, mise en réseau des acteurs au niveau mondial, ouverture des marchés…) tendent à renforcer et faciliter l’investissement sur ce segment qui n’est plus désormais réservé aux initiés.
Alors que le prix de l’or a doublé en deux ans, depuis la sortie de la crise, les prix de l’art eux n’ont progressé que de 40 points depuis mars 2009. La croissance exceptionnelle du marché asiatique, mais aussi des places de marché orientales, accompagnée des records mondiaux aux enchères qui se frappent tous les jours, laisse présager que la marge de progression est encore immense sur le marché de l’art.
Cette semaine, l’annonce des banques centrales a calmé le marché, même les valeurs bancaires sont en hausses. Pour combien de temps ? Le problème de la dette est encore présent, les leviers habituels de la croissance ou d’une politique monétaire ont déjà pallié mais n’ont pas résolu le problème.
Si certains économistes prônent la banqueroute, le marché de l’art lui, fort d’un premier semestre historique, n’entend pas encore les bruits d’écroulements dans les institutions économiques ou les rumeurs apocalyptiques de la rue.