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Contrôle et contentieux

La preuve du manquement délibéré ne saurait reposer sur le seul constat de la réitération d'erreurs déjà relevées lors d'un précédent contrôle

Le juge de l'impôt nous rappelle que l'administration fiscale supporte intégralement la charge de la preuve de l'élément intentionnel du manquement délibéré. Cette preuve ne saurait reposer sur le seul constat de la réitération d'erreurs déjà relevées lors d'un précédent contrôle.

 

L'article 1729 du CGI, prévoit, en matière de pénalités, différents taux de majoration en fonction de la gravité du comportement du contribuable. Selon le a) de cet article, les inexactitudes ou omissions relevées dans une déclaration entraînent l'application d'une majoration de 40% en cas de manquement délibéré.

La jurisprudence a précisé les contours de cette notion de "manquement délibéré" en indiquant qu'il incombe à l'administration d'établir deux éléments cumulatifs :

  • L'existence matérielle de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations ;
  • L'intention du contribuable d'éluder l'impôt.

Le juge rappelle, dans la décision évoquée aujourd'hui, que l'administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l'acte comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt pour apprécier l'intention du contribuable.

 

Rappel des faits :

En l'espèce, la SARL C, dont l'activité est l'achat-revente de tous biens, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2016 au 30 septembre 2018. À l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a procédé à des rappels de TVA assortis d'une majoration de 40% pour manquement délibéré, sur le fondement de l'article 1729-a du CGI.

La société a contesté l'application de cette pénalité par voie de réclamation contentieuse le 19 octobre 2022, rejetée par l'administration le 15 décembre 2022. Elle a ensuite saisi le Tribunal administratif (TA) de Nice d'une demande tendant à la décharge de la majoration à hauteur de 33 549 €.

 

La société :

  • soutient que la majoration ne peut être appliquée à la totalité de la TVA, puisqu'elle avait procédé à une déclaration rectificative par le dépôt d'une régularisation spontanée ;
  • conteste l'établissement du caractère intentionnel du manquement, élément constitutif essentiel pour l'application de la majoration pour manquement délibéré ;
  • invoque le bénéfice des garanties prévues aux articles L. 80 A et L. 80 B du LPF, en s'appuyant sur deux courriels de l'inspecteur des finances de la direction du contrôle fiscal Sud-Est Outre-Mer, dans lesquels l'administration aurait pris position formellement pour ramener la majoration à 10%.

L'administration fiscale de son côté justifie l'application de la majoration pour manquement délibéré en se fondant principalement sur l'existence d'un précédent contrôle fiscal ayant abouti aux mêmes rappels de TVA. En effet, une précédente proposition de rectification datée du 20 juin 2016 avait déjà identifié les mêmes irrégularités. Pour l'administration, la récidive caractérise nécessairement le caractère délibéré du manquement.

 

Le Tribunal administratif de Nice vient de donner raison au contribuable, en estimant que l'administration n'avait pas suffisamment établi le caractère intentionnel du manquement.

 

Le tribunal considère que la simple existence d'un précédent contrôle fiscal ayant relevé les mêmes irrégularités n'est pas, à elle seule, suffisante pour établir le caractère délibéré du manquement.

 

Le juge relève en effet que l'administration s'est contentée d'invoquer l'existence d'un précédent contrôle fiscal ayant abouti aux mêmes rappels de TVA. Or, ce seul élément est jugé "insuffisant pour caractériser l'élément intentionnel du manquement".

Le tribunal tient également compte du fait que "la taxe sur la valeur ajoutée a été partiellement régularisée avant la fin de la précédente vérification de comptabilité", ce qui tend à nuancer la volonté délibérée d'éluder l'impôt.

 

En conséquence, le tribunal a prononcé la décharge des pénalités de 40% appliquées aux rappels de TVA pour la période litigieuse, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par la société requérante.

 

 

TL;DR - Pénalités pour manquement délibéré en matière de TVA

Le TA de Nice décharge une société des pénalités de 40% pour manquement délibéré appliquées suite à des rappels de TVA, car:

  • L'administration ne peut pas se contenter d'invoquer un précédent contrôle fiscal ayant relevé les mêmes irrégularités pour prouver le caractère intentionnel du manquement
  • La régularisation partielle de la TVA par le contribuable avant la fin du précédent contrôle va à l'encontre d'une intention délibérée d'éluder l'impôt
  • La charge de prouver l'élément intentionnel repose entièrement sur l'administration fiscale

 

Publié le vendredi 28 mars 2025 par La rédaction

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