S'agissant de la pénalité de 40% pour défaut ou retard dans la souscription d’une déclaration, doit être regardé comme ayant pris personnellement part à un tel manquement la personne morale associée d'une société de personnes dont le gérant est aussi celui de cette société de personnes, ainsi que, le cas échéant, ce gérant s'il est lui-même associé de cette dernière société.
Le défaut de production dans les délais prescrits d’une déclaration ou d’un acte comportant des éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt entraîne l’application d’une majoration de :
- 10 % en l’absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l’acte dans les trente jours suivant la réception d’une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d’avoir à le produire dans ce délai ;
- 40 % lorsque la déclaration ou l’acte n’a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d’une mise en demeure, notifiée par pli recommandé d’avoir à le produire dans ce délai ;
- 80 % en cas de découverte d'une activité occulte, sans qu’il soit besoin d’adresser une mise en demeure.
Cette majoration prévue en cas de retard dans l'accomplissement des obligations déclaratives est applicable quelle que soit la nature de la déclaration ou de l'acte concerné dès lors que ces documents sont destinés à être utilisés pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt.
La majoration de 40 % prévue à l’article 1728-1 du CGI en cas de défaut de souscription d'une déclaration ou de présentation d'un acte à la formalité dans les trente jours d'une mise en demeure est considérée par la Cour de cassation comme constituant une sanction ayant le caractère d'une punition (Cass. Com., arrêt du 22 février 2000, n° 97-17822 et Cass. Com., arrêt du 27 juin 2000, n° 97-22351).
Rappel des faits :
La SCI P, ayant pour associés, à hauteur de 1 % des parts, M. B et, pour 99 % des parts, la SARL F, elle-même détenue à parts égales par M. et Mme B a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2011 à 2013 à l'issue de laquelle l'administration fiscale a réintégré dans son résultat imposable de l'exercice clos en 2012 une provision pour litige de 700 000€ portée en comptabilité, au motif que sa déclaration de résultats avait été souscrite après l'expiration du délai légal de déclaration.
La SARL F associée de la SCI P a demandé au TA de Grenoble, à titre principal, de la décharger des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012, de rétablir le montant du déficit industriel et commercial qu'elle a déclaré au titre de cette année et, à titre subsidiaire, de la décharger de la majoration de 40 % qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1728 du CGI
Par un jugement n°s 1800350 et 1800351 du 5 juin 2020, le TA de Grenoble a rejeté sa demande.
Par un arrêt n°s 20LY01780 et 20LY01782 du 13 janvier 2022, la CAA de Lyon a déchargé la SARL F de la majoration de 40 %.
Pour la Cour, en se bornant à soutenir que M. B est le gérant de la SCI P et de la SARL F et qu’à ce titre, il participe à la gestion, à l’établissement et au dépôt des déclarations fiscales des deux sociétés et que, par suite, la SARL F ne pouvait ignorer les manquements de la SCI P dans l’accomplissement de ses obligations déclaratives ou être dans l’impossibilité d’y remédier, l’administration n’établit pas la participation de la SARL F aux manquements aux obligations déclaratives de la SCI P.
Voir notre commentaire : Une déclaration de résultats déposée hors délai peut remettre en cause la déductibilité d'une provision régulièrement comptabilisée
L'administration s'est pourvue en cassation.
Le Conseil d'Etat vient d'annuler l'arrêt de la CAA de Lyon
La SARL F conteste le bien-fondé de la majoration de 40 % appliquée aux rectifications relatives à la quote-part du résultat de la SCI P au titre de l’exercice clos en 2012 en se prévalant du principe de personnalité des peines.
Pour le Conseil d'Etat :
Tant le principe de responsabilité personnelle que le principe de personnalité des peines s'opposent à ce que des pénalités fiscales, qui présentent le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elles visent, puissent être prononcées à l'encontre de contribuables lorsque ceux-ci n'ont pas participé aux agissements que ces pénalités répriment. Doit être regardé comme ayant pris personnellement part à un tel manquement la personne morale associée d'une société de personnes dont le gérant est aussi celui de cette société de personnes, ainsi que, le cas échéant, ce gérant s'il est lui-même associé de cette dernière société.
Les dispositions de l'article 1728 du CGI, selon lesquelles les suppléments de droits mis à la charge du contribuable peuvent être assortis d'une majoration en cas de défaut ou de retard de production d'une déclaration fiscale, ne sauraient être interprétées comme autorisant l'administration à mettre cette pénalité à la charge du contribuable lorsque celui-ci n'a pas pris personnellement part au défaut ou au retard déclaratif.
Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour prononcer la décharge de la majoration mise à la charge de la SARL F associée de la SCI P, la cour administrative d'appel de Lyon s'est fondée sur la circonstance que l'administration n'établissait pas la participation de la SARL F au retard déclaratif de la SCI P. En statuant ainsi, alors qu'il est constant que M. B était gérant tant de la SCI P que de la SARL F, de sorte que les pénalités prévues au b. du 1. de l'article 1728 du CGI pouvaient être mises à la charge de cette dernière société, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.