L’article 2 de la seconde loi de finances rectificative pour 2011 a modifié les modalités d’application des dispositifs de report en avant et en arrière des déficits des entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés prévus aux article 209 et article 220 quinquies du CGI.
L’objectif général de la mesure adoptée par cette loi de finances rectificative pour 2011 était de limiter l’utilisation des déficits de façon à rendre les entreprises imposables même lorsqu’elles disposent d’un important stock de déficits reportables. Il s’agissait également d’aligner les règles françaises d’utilisation des pertes fiscales sur le régime allemand et d’initier ainsi sans délai la convergence entre les deux régimes d’impôt sur les sociétés.
Avant, le déficit constaté par une entreprise soumise à l’impôt sur les sociétés pouvait, sur option, être considéré comme une charge déductible du bénéfice des trois exercices précédents. Le report était limité au montant du bénéfice déclaré au cours des trois exercices précédents, dans la limite de la fraction non distribuée de ce bénéfice.
Désormais, le déficit constaté peut, toujours sur option, être considéré comme une charge du seul bénéfice de l’exercice précédent, dans la limite de la fraction non distribué de ce bénéfice. Le déficit susceptible d’être reporté en arrière, ne peut, en tout état de cause, excéder 1 000 000 €.
Rappel des faits :
L’exercice clos en 2005, la société C SAS était à la tête d’un groupe fiscalement intégré comportant une unique filiale. Après avoir absorbé cette filiale, la société a déclaré, en propre, ses résultats au titre des exercices clos en 2006 et 2007. En 2008, elle s’est, à nouveau, déclarée société mère d’un groupe fiscalement intégré comprenant désormais deux filiales. Elle a inscrit une créance de report en arrière du déficit d’ensemble réalisé au titre de l’exercice clos en 2008, laquelle correspondait notamment à l’imputation de ce déficit d’ensemble, à hauteur de 1 464 468 €, sur le bénéfice d’ensemble déclaré, au titre de l’exercice clos en 2005, pour le groupe fiscalement intégré dont elle était alors à la tête.
A la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration n’a admis une telle imputation qu’à hauteur du bénéfice qui avait été réalisé, en propre, par la société C SAS au titre de l’exercice en cause et qui était inférieur de 150 640 €.
Elle a, par suite, réduit de 50 213 € le montant de la créance précitée.
La société C SAS a demandé au TA de Lyon, d’une part, de rétablir son déficit reportable de l’exercice clos en 2007 à concurrence de 21 697 € et, d’autre part, de lui accorder la restitution de sa créance déclarée en application de l’article 220 quinquies du CGI au titre de l’exercice clos en 2008, d’un montant de 50 213 €. Par un jugement n° 1305881 du 12 juillet 2016, le TA de Lyon a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 16LY03170 du 29 mars 2018, la CAA de Lyon, faisant partiellement droit à l’appel formé par la société contre ce jugement, a rétabli le montant de la créance de report en arrière de déficit au titre de l’exercice clos en 2008 au montant de 547 047 € et rejeté le surplus des conclusions.
L’administration s’est pourvue en cassation contre les articles 1 à 3 de l’arrêt du 29 mars 2018.
Le Conseil d’Etat rappelle que le déficit d’ensemble d’un groupe fiscalement intégré, qui est déclaré au titre d’un exercice par sa société mère, ne peut être imputé, s’agissant des exercices antérieurs à la constitution de ce groupe, que sur les bénéfices qui ont été déclarés, en propre, par cette société.
Par suite, après avoir relevé que la société C SAS ne se trouvait pas à la tête d’un groupe fiscalement intégré régi par les articles 223 A et suivants du code général des impôts au titre des exercices clos en 2006 et 2007, la cour a commis une erreur de droit en jugeant qu’elle était néanmoins en droit de procéder à l’imputation du déficit d’ensemble déclaré au titre de l’exercice clos en 2008 sur le bénéfice d’ensemble déclaré au titre de l’exercice clos en 2005, au motif, inopérant, tiré de ce que l’activité du premier groupe fiscalement intégré dont la société était à la tête lors du plus ancien de ces exercices aurait été identique à celle qui a été exercée, ensuite, tant par elle-même que par le nouveau groupe fiscalement intégré dont elle a été la société mère.
Selon la haute juridiction l’administration fiscale était fondée à demander l’annulation des articles 1 à 3 de l’arrêt qu’il attaque.