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Impôt sur le revenu

Frais de double résidence : une déduction loin d'être évidente

La Cour Administrative d’Appel de Douai, vient d’apporter de nouvelles précisions concernant les conditions de déduction des frais de double résidence dont peuvent bénéficier les contribuables

Les frais de double résidence s’entendent des dépenses supplémentaires, notamment de séjour et de déplacement, effectivement supportées par un salarié qui résultent de la nécessité pour ce dernier de résider pour des raisons professionnelles dans un lieu distinct de celui de son domicile habituel (RM Gest n° 41373, JO AN du 18 novembre 1996, p. 6025).

S’il est établi que la double résidence est justifiée par l’impossibilité de maintenir une seule résidence compte tenu du lieu de travail de chacun des époux, partenaires à un pacte civil de solidarité ou, dans le cas d’un concubinage stable et continu, concubins, les dépenses de double résidence ont alors le caractère de frais professionnels.

Dans le cadre d’une mise à jour de la base BOFIP-Impôt du 11 février 2014 , Bercy a précisé les conditions de déduction des frais de double résidence dont peuvent bénéficier les contribuables en intégrant l’arrêt du Conseil d’Etat du 6 octobre 2004 qui a jugé « dès lors que la double résidence ne résulte pas d’un choix de simple convenance personnelle, ces dépenses sont déductibles y compris en l’absence de diligences en vue d’obtenir un rapprochement des lieux de travail » ( CE, arrêt du 6 octobre 2004, n°256092 ) .

Cette règle doit être appliquée sans restriction, qu’il s’agisse de salariés du secteur privé ou du secteur public et que le changement du lieu de travail de l’un des conjoints, partenaires à un pacte civil de solidarité ou concubins résulte d’un avancement professionnel ou de tout autre motif indépendant de sa volonté. Le point de savoir si ces conditions sont réunies ne peut s’apprécier qu’en considération des circonstances de fait propres à chaque affaire.

En revanche, les frais de double résidence issus ou prolongés pour des raisons qui répondent à de simples convenances personnelles ne sont pas admis en déduction.

Rappel des faits

Mme BA célibataire, magistrate a été, à sa demande, affectée, du 1er septembre 2008 au 1er septembre 2013 en tant que présidente de chambre près la cour d’appel d’Amiens. Pendant, notamment, les années 2009, 2010 et 2011, elle travaillait à Amiens mais avait son domicile principal à Dieppe. Au titre de l’impôt sur le revenu des années 2009, 2010 et 2011, elle a opté pour la déduction de ses frais réels et a déduit, d’une part, les frais kilométriques et frais d’entretien de son véhicule pour le déplacement domicile / lieu de travail, les frais de double résidence, consistant en la location d’un appartement et d’un garage ainsi que les frais annexes à ces locations.

L’administration fiscale a remis en cause ces frais de double résidence. Par un jugement n° 1302600 du 25 février 2016, le tribunal administratif de Rouen Mme BA.a obtenu la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu mises à sa charge.

Le ministre des finances a fait appel de la décision.

La Cour Administrative d’Appel de Douai a fait droit à la demande du ministre et annulé le jugement du TA de Rouen.

Mme BA au soutient de sa demande faisait valoir :

  • qu’elle avait fait l’objet d’une intervention hospitalière le 9 juillet 2009 impliquant, pour le suivi , une résidence à Dieppe ;

  • que l’état de santé de sa mère nécessitait une présence auprès d’elle à Dieppe. La Cour a considéré qu’il ressortait des documents produits que, en dépit de son importance, l’intervention hospitalière qu’elle avait subie n’avait donné lieu qu’à un suivi régulier dans la clinique située en Seine-Maritime où elle avait été hospitalisée. Par ailleurs rien ne justifiait qu’elle aurait été contrainte de résider dans l’agglomération dieppoise pour assurer ce suivi. «Par suite, la situation de santé de l’intéressée au cours des années en cause ne saurait être regardée comme ayant constitué une circonstance particulière justifiant la déduction des frais réels précités.»

Par ailleurs, la mère de la contribuable, née en 1927, qui habite à quelques kilomètres du domicile de sa fille, s’est vu reconnaître le 2 octobre 2007 et pour une durée de dix ans, par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, " la carte de priorité pour personnes handicapées du 1er mars 2007 au 1er mars 2017 " , en raison d’un taux d’incapacité inférieur à 80 % . Il ressort de l’instruction qu’elle souffre également de différentes pathologies.

La Cour a considéré que «par les documents qu’elle produit, MmeA…, qui disposait d’un domicile distinct de celui de sa mère , n’établit pas que l’état de santé de celle-ci aurait nécessité une présence permanente ou des visites quotidiennes auprès d’elle, ce qui en outre aurait été difficilement conciliable avec l’exercice de ses fonctions professionnelles à Amiens. Par suite, la situation de santé de sa mère n’a pas davantage constitué une circonstance particulière justifiant la déduction des frais réels précités.»

Publié le mercredi 24 janvier 2018 par La rédaction

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