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Impôt sur le revenu

Revenus fonciers : déduction de l'indemnité d'éviction versée pour libérer les locaux commerciaux et les relouer à des conditions plus favorables

La juridiction administrative vient de rappeler que les indemnités d'évictions versées par un bailleur constituent pour lui une charge déductible, en application des dispositions de l'article 13-1 du CGI, pour autant que les sommes versées à ce titre, trouvent leur contrepartie dans un accroissement du capital immobilier dudit bailleur.

 

Comme le rappelle le BOFIP-Impôt (BOI-RFPI-BASE-20-20) L'indemnité d'éviction versée par le propriétaire est admise en déduction des recettes brutes lorsqu'elle est considérée comme une charge engagée en vue de la perception du revenu. Il en est ainsi, notamment, lorsque la somme versée au locataire sortant a pour objet de libérer les locaux en vue de les relouer immédiatement dans de meilleures conditions.

 

En revanche, l'indemnité d'éviction n'est pas admise en déduction lorsqu'elle présente le caractère d'une dépense personnelle ou d'une dépense engagée en vue de la réalisation d'un gain en capital. Tel est le cas de l'indemnité versée par le propriétaire en vue de reprendre les locaux donnés en location pour : son usage personnel,  les vendre libres de toute location  (CE, arrêt du 25 janvier 1967 n° 66560 RO p.21) ; en permettre la démolition (CE, arrêts du 21 février 1944 n°s 69684 et 71374, RO p,55) ; transformer des locaux commerciaux en logements (CE, arrêt du 12 février 1969, n° 72918).

 

Rappel des faits :

 

Les époux B ont acquis deux biens à usage commercial à Paris, situés pour l'un dans le 13ème et pour le second dans le 20ème pour des sommes respectives de 250 000 € et 320 000 €. Ces biens faisaient l'objet de baux commerciaux en cours, le premier ayant été loué par la " SCI B " à la société " MT " et le second par la " SCI D " à la société " PP ". Il résulte des actes de vente signés les 6 mai 2014 et 30 décembre 2014 que l'acquisition de ces biens était conditionnée à la libération des lieux et indissociablement liée à la régularisation d'un protocole entre l'acquéreur et les locataires en place afin de procéder à la résiliation des baux moyennant le versement d'indemnités, ces protocoles constituant une condition suspensive des actes. La SCI P a ainsi signé, en qualité de tiers acquéreur, avec chacun des locataires de ces biens, des protocoles de résiliation des baux commerciaux les 5 mars 2014 et 17 novembre 2014, au titre desquels elle s'engageait au versement d'une indemnité d'éviction à hauteur de 225 000 € pour le premier d'entre eux et de 130 000 €s pour le second. 

 

A l'issue d'une vérification de comptabilité de la SCI P dont les époux B détiennent 100 % des parts, portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016, le service a remis en cause le déficit déclaré à hauteur de 18 617 € après déduction, en charges de leurs revenus fonciers, des indemnités d'éviction qu'ils avaient versées aux locataires.

 

L'administration fiscale, tirant les conséquences de ce contrôle, a mis à leur charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2014 et assorti ces rehaussements de pénalités sur le fondement de l'article 1729 du CGI.

 

Les époux B ont fait appel du jugement du 23 novembre 2021 par lequel le TA de Paris, après les avoir déchargés des pénalités pour manquement délibéré qui leur avaient été appliquées, a rejeté le surplus de leur demande.

 

La Cour vient de donner raison aux époux B

 

Etait donc en cause le caractère déductible ou non de ces indemnités d'éviction.

 

La Cour rappelle :

  • que l'indemnité d'éviction versée, en cas de non-renouvellement du bail, au locataire commerçant en application de la législation relative aux baux commerciaux, n'entre pas dans les charges de la propriété énumérées à l'article 31-I-1 du CGI
  • qu'il y a lieu de tenir compte des circonstances de l'espèce pour déterminer si une telle indemnité trouve sa contrepartie dans un accroissement du capital immobilier du bailleur ou doit être regardée comme une dépense effectuée par lui en vue de l'acquisition ou de la conservation du revenu

Au cas particulier, le versement de ces indemnités a permis, après la libération des locaux, de louer les biens, qui ont conservé le caractère commercial de leur usage, à des conditions plus favorables. En effet, les loyers ont fait l'objet d'une augmentation significative : le premier loyer a pratiquement était multiplié par 2 et le second par 4 .

La circonstance que la SCI P se soit rendue débitrice de ces sommes, alors même qu'elle n'avait pas la qualité de bailleur aux dates de la signature de chacun des actes de ventes, est restée sans incidence sur l'objectif poursuivi et la contrepartie attendue, dès lors que le versement de ces indemnités a permis à la SCI P de valoriser la rentabilité locative des biens dont elle devenait propriétaire et lui a permis d'accroître son revenu imposable.

 

Partant, pour la Cour, les montants acquittés par la SCI P ont ainsi constitué des charges déductibles de ses revenus en application des dispositions de l'article 13-1 du CGI

Publié le lundi 6 février 2023 par La rédaction

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