Bercy vient de publier un rescrit qui apporte des précisions pour les assujettis (marchands de biens) qui acquièrent des immeubles achevés depuis plus de cinq ans en vue de les revendre, mais qui les exploitent temporairement (location) avant la cession. L'administration fiscale y clarifie ici le mécanisme de "l'assimilation", qui permet de traiter fiscalement un stock comme une immobilisation.
Question
Quelles sont les modalités d’application du régime de l’assimilation des biens immobiliers prévu au 3 du IV de l’article 207 de l’annexe II au code général des impôts (CGI) aux fins d’application des dispositifs de régularisation de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) déductible en cas d’acquisition par un assujetti d’un immeuble achevé depuis plus de cinq ans qu’il inscrit en stock, que cette opération soit exonérée ou soumise à la TVA sur option en application du 5° bis de l’article 260 du CGI ?
La TVA afférente aux dépenses engagées par cet assujetti en vue de la revente de cet immeuble est-elle déductible ?
La réponse n'est pas nouvelle, puisque le rescrit est, en réalité, la reprise de la doctrine énoncée dans la réponse ministérielle Louwagie du 27 juin 2023 (que nous avions déjà évoqué à l'époque) pour l'intégrer officierllement au BOFIP.
La réponse de l'administration fiscale est dense et s'articule autour de trois point : le principe de déduction/régularisation, le mécanisme de l'assimilation, et le sort des dépenses (travaux/frais).
Le principe du transfert du droit à déduction (L'achat de l'immeuble)
Lorsqu'un professionnel achète un immeuble ancien (achevé depuis plus de 5 ans), deux cas de figure se présentent concernant la TVA sur le prix d'achat :
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Vente soumise à TVA (sur option du vendeur) : L'acquéreur déduit la TVA de manière classique.
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Vente exonérée (pas d'option) : Le vendeur doit régulariser une partie de la TVA qu'il avait déduite. Pour ne pas perdre cette TVA, la loi permet de transférer ce droit à déduction à l'acheteur via une attestation. L'acheteur peut alors déduire cette TVA résiduelle, à condition que le bien constitue pour lui une immobilisation.
Le mécanisme de l'assimilation
Un marchand de biens doit normalement inscrire l'immeuble en stock (actif circulant), et non en immobilisation. Théoriquement, il ne devrait pas pouvoir bénéficier du transfert de TVA décrit ci-dessus (réservé aux immobilisations).
Mais, les dispositions de l'article 207, IV-3 de l'annexe II au CGI prévoient qu'un immeuble en stock est considéré comme immobilisé pour les besoins des régularisations de TVA lorsque, au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle au cours de laquelle est intervenu l'achèvement de l'immeuble, il est utilisé pendant plus d'un an pour une opération relevant d'une activité économique mentionnée à l'article 256 A du code général des impôts.
Ce régime spécifique dit de l'assimilation a notamment vocation à s'appliquer à l'assujetti qui, dans l'attente de sa revente, affecte un immeuble inscrit en stock à une activité économique de location soumise à la TVA de plein droit ou sur option. Il est commenté au BOFIP-Impôts sous la référence BOI-TVA-IMM-10-30, n°300
En résumé :
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Un immeuble en stock est fiscalement traité comme une immobilisation s'il est utilisé pendant plus d'un an pour une activité économique (ex: location soumise à TVA), après le 31/12 de la deuxième année suivant son achèvement
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Si le marchand de biens loue l'immeuble (avec TVA) en attendant de le vendre, le stock est "assimilé" à une immobilisation
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L'acquéreur peut donc récupérer la TVA transférée par le vendeur (via l'attestation), même si comptablement le bien est en stock
L'administration précise que même si les locaux sont vacants, l'assimilation fonctionne si l'assujetti prouve une "recherche active de locataires".
Le traitement de la TVA sur les dépenses et travaux (Frais liés à la revente)
La seconde partie du rescrit concerne les frais engagés par le marchand de biens (rénovation, frais de vente) en vue de la revente.
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Si la revente est soumise à TVA (sur option) : la TVA sur les travaux est déductible. Le rescrit précise que pour les immeubles anciens, cette déduction ne s'opère qu'au moment où l'option pour la taxation est exercée (au moment de la vente généralement).
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Si la revente est exonérée (pas d'option) : si le marchand de biens vend l'immeuble sans TVA :
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Il ne peut pas déduire la TVA sur les travaux effectués pour la vente (car la vente n'est pas taxée).
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mais grâce au mécanisme de l'assimilation (si les conditions étaient réunies), il peut transférer cette TVA sur les travaux à son propre acquéreur via une attestation de transfert.
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