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TVA et usufruit temporaire : une remise tardive de l'attestation ne permet pas de rouvrir le délai de régularisation de la taxe

Nouvelle décision concernant le délai d'exercice des droits à déduction de TVA dans le cadre d'une acquisition d'usufruit immobilier exonérée de TVA, notamment concernant le point de départ du délai et l'impact de la remise tardive de l'attestation de transfert des droits à déduction.

 

Pour mémoire, l'article 207 de l'annexe II du CGI précise que dans le cadre d’une cession de bien immobilier, le bénéficiaire peut déduire une fraction du montant de TVA initialement déduit par le cédant, proportionnellement au nombre d’années restantes jusqu’à la fin de la période de régularisation. Le cédant doit délivrer une attestation mentionnant le montant de TVA déductible. Cette régularisation devient exigible lors de la cession du bien, ce qui fixe le point de départ des délais pour exercer le droit à déduction.

 

Les régularisations de la TVA doivent être opérées et déclarées dans les deux années suivant le fait générateur (ici, la cession du bien). Une demande de remboursement présentée après ce délai est considérée comme tardive et rejetée.

 

Par ailleurs, les commentaires administratifs publiés au BOFIP référencé BOI-TVA-IMM-10-30, aux paragraphes 190 et suivants, admettent que, lorsque la propriété d’un immeuble donne lieu à un démembrement en raison de la cession à un tiers de l’usufruit ou de la nue-propriété, le nu-propriétaire puisse transmettre, sous certaines conditions, le droit à déduction dont il est privé (la nue-propriété étant regardée comme n’étant pas affectée à une activité économique imposable) au bénéfice de l’usufruitier. Ce transfert à l’usufruitier du droit à déduction dont est privé le nu-propriétaire est possible sous deux condition :

  • les droits réels doivent être immobilisés
  • et le bien doit être utilisé pour des opérations soumises à TVA.

Dans un souci de neutralité, cette possibilité a été étendue aux démembrements de propriété intervenant ab initio par une réponse ministérielle Pauget en date du 2 avril 2019 (n° 17425), sous réserve notamment que le nouveau nu-propriétaire ait la qualité d’assujetti à la TVA.

 

Rappel des faits :

La SARL F a acquis par acte notarié, le 8 décembre 2010, l'usufruit temporaire de 17 ans d'un immeuble, cette acquisition, effectuée en exonération de TVA (probablement en application de l'article 261-5-2° du CGI concernant les immeubles achevés depuis plus de cinq ans), au prix de 1 300 000 € se décomposant en un montant de 1 096 941 € payé par la SARL F et de 203 059 € payé par le nu-propriétaire.

 

La SARL F a sollicité le 10 janvier 2022 le remboursement d'un crédit de TVA d'un montant de 140 000 € au titre du mois d'octobre 2021, sur lequel elle avait reporté le droit à déduction qui lui avait été transféré lors de ladite acquisition. Par décision du 10 février 2022, l'administration fiscale a refusé de faire droit à sa demande. Elle estime que la demande de remboursement est tardive au regard des dispositions légales, car le fait générateur de la régularisation – la cession du bien en 2010 – a fixé le délai pour exercer le droit à déduction bien avant 2021.

 

F vient de demander au juge le remboursement du crédit de TVA dont elle s'estime bénéficiaire au titre du mois d'octobre 2021 pour un montant de 140 000 €

 

F soutient que le point de départ du délai pour réclamer son crédit de TVA doit être fixé à la date de remise de l'attestation de transfert de droit à déduction (7 octobre 2021) et non à la date de cession en 2010.

 

Le Tribunal vient de rejeter la requête de la SARL F

 

Le tribunal rappelle un principe fondamental : le fait générateur de la régularisation est la cession du bien immobilisé, et non la remise de l'attestation de transfert du droit à déduction. En application de l'article 208 de l'annexe II au CGI, la régularisation doit être effectuée par déclaration distincte avant le 31 décembre de la deuxième année suivant le fait générateur.

 

Dans le cas d'espèce, la cession étant intervenue le 8 décembre 2010, la société avait jusqu'au 31 décembre 2012 pour exercer son droit à déduction. La remise tardive de l'attestation en octobre 2021 ne peut avoir pour effet de rouvrir ce délai. Le tribunal écarte également l'argument tiré de la doctrine administrative, les paragraphes invoqués du BOI-3-D-1-06 et du BOI-TVA-DED-40-30 ne comportant aucune interprétation contraire aux textes.

 

Bien que le transfert des droits à déduction nécessite la délivrance d'une attestation par le cédant, le fait générateur de la régularisation est la cession elle-même, et non la remise de cette attestation. Cette distinction est déterminante car elle fixe le point de départ du délai de deux ans prévu à l'article 208 de l'annexe II pour effectuer la régularisation.

 

Publié le vendredi 10 janvier 2025 par La rédaction

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