L’Assemblée nationale a voté mercredi par 112 voix et 5 abstentions la fin du monopole accordé à l’administration fiscale pour le dépôt de plaintes pour fraude fiscale "verrou de Bercy" dès lors que le montant des droits éludés dépasse 100.000 €.
Le dispositif appelé "verrou de Bercy" codifié sous l’article L.228 du LPF encadre la poursuite pénale des auteurs d’infractions financières. Il prévoit que seule l’administration fiscale a la possibilité de déposer des plaintes pour fraude fiscale auprès du parquet, après autorisation d’une commission (la commission des infractions fiscales) composée pour l’essentiel de magistrats.
Autrement dit l’auteur d’une infraction fiscale ne peut être poursuivi que sur plainte de l’administration fiscale.
Seules les infractions fiscales définies par le code général des impôts sont soumises à la procédure du « verrou de Bercy ».
Il s’agit principalement du délit général de fraude fiscale défini à l’article 1741 du code général des impôts.
La fraude fiscale simple est caractérisée par la soustraction frauduleuse « à l’établissement ou au paiement total ou partiel des impôts ».
Cette soustraction frauduleuse est définie de manière très large par l’article 1741 du code général des impôts puisqu’elle est établie dès lors que l’auteur a volontairement :
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« omis de faire sa déclaration dans les délais prescrits » ;
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ou « dissimulé une part des sommes sujettes à l’impôt » ;
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ou « organisé son insolvabilité ou mis obstacle par d’autres manœuvres au recouvrement de l’impôt »,
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ou encore agi « de toute autre manière frauduleuse ».
La liste des agissements punissables ont pour point commun de reposer sur une intention de ne pas payer l’impôt dû.
L’article 13 du projet de loi a pour objet d’obliger l’administration fiscale à dénoncer au procureur de la République les faits de fraude fiscale les plus graves dont elle a connaissance.
Le texte prévoit la transmission automatique au procureur de la République d’un certain nombre d’affaires ayant donné lieu à des pénalités administratives.
L’automaticité de la transmission du dossier de fraude par l’administration au procureur n’est garantie que lorsque le dossier remplit une double condition : il doit se voir appliquer des majorations importantes (100 %, 80 % et 40 % dans certains cas) et les droits concernés doivent être supérieurs à 100 000 €.
Nouvelle rédaction de l’article 228 du LPF :
« Art. L. 228. – I. – Sans préjudice des plaintes dont elle prend l’initiative, l’administration est tenue de dénoncer au procureur de la République les faits qu’elle a examinés dans le cadre de son pouvoir de contrôle prévu à l’article L. 10, qui ont conduit à l’application, sur des droits dont le montant est supérieur à 100 000 € :
« 1° Soit de la majoration de 100 % prévue à l’article 1732 du code général des impôts ;
« 2° Soit de la majoration de 80 % prévue au c du 1 de l’article 1728, aux b ou c de l’article 1729, au I de l’article 1729-0 A ou au dernier alinéa de l’article 1758 du même code ;
« 3° Soit de la majoration de 40 % prévue au b du 1 de l’article 1728 ou aux a ou b de l’article 1729 dudit code, lorsqu’au cours des six années le contribuable a déjà fait l’objet lors d’un précédent contrôle de l’application des majorations mentionnées aux 1° et 2° du présent I et au présent 3° ou d’une plainte de l’administration.
« L’administration est également tenue de dénoncer les faits au procureur de la République lorsque des majorations de 40 %, 80 % ou 100 % ont été appliquées à un contribuable soumis aux obligations prévues à l’article et aux articles 4 et 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, quel que soit le montant sur lequel ces majorations ont été appliquées.
Il est prévu qu’une éventuelle transaction fiscale sur les pénalités appliquées ne peut pas avoir pour effet d’exclure un dossier de la liste des affaires qui doivent être transmises au procureur de la République.
Les affaires pouvant faire l’objet de dénonciations au parquet sont celles pour lesquelles une proposition de rectification a été adressée à compter de l’entrée en vigueur de l’article (Publication de la loi).