Dans le cadre de l’exonération de droits de succession au profit des frères et sœurs vivant ensemble et prévue par l’article 796-0 ter du CGI, la Cour d’Appel de Paris vient de préciser que s’il n’est pas imposé une cohabitation constante, il doit toutefois être démontré que le domicile est au lieu du principal établissement.
L’article 10 de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat a instauré l’article 796-0 ter du CGI qui exonère, sous certaines conditions, de droits de mutation par décès la part successorale reçue par les frères et sœurs du défunt.
Ainsi, cet article 796-0 ter du CGI prévoit qu’est exonérée de droits de succession, la part de chaque frère ou sœur, célibataire, veuf, divorcé, ou séparé de corps, à la double condition :
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qu’il soit, au moment de l’ouverture de la succession, âgé de plus de cinquante ans ou atteint d’une infirmité le mettant dans l’impossibilité de subvenir par son travail aux nécessités de l’existence ;
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qu’il ait été constamment domicilié avec le défunt pendant les cinq années ayant précédé le décès.
S’agissant de cette dernière condition, la doctrine BOFIP BOI-ENR-DMTG-10-20-10-20170224 précise que :
« l’héritier doit avoir été constamment domicilié avec le défunt pendant les cinq ans qui ont précédé le décès .
Il convient de se référer aux dispositions des articles 102 et suivants du code civil pour déterminer si le défunt et l’héritier ont eu un domicile commun. Cette notion civile du domicile n’implique pas une cohabitation constante . Il en résulte par ailleurs que ce domicile commun peut être fixé à la résidence d’un tiers : parent, autre héritier ou maison de retraite.
Par mesure de tempérament, l’exonération pourra être accordée lorsque le logement commun est quitté pour raison de santé (hospitalisation, placement en maison médicalisée, etc.). Dans cette hypothèse, il convient de se placer à la date de ce départ pour apprécier la condition de cohabitation effective pendant cinq ans.»
Rappel des faits
Mme F est l’héritière de sa soeur, Mme E. Elle a sollicité le bénéfice de l’exonération sous conditions de domiciliation conjointe prévue par l’article 796-0 ter du CGI.
Selon proposition de rectification du 10 février 2014, l’administration a remis en cause cette exonération en considérant que la condition de domiciliation commune n’était pas remplie.
La réclamation contentieuse de Mme F étant est restée sans réponse, elle a fait assigner le directeur des services fiscaux d’Ile de France aux fins d’annuler la décision de l’administration.
Par jugement du 8 juin 2016, le tribunal a confirmé la décision de rejet.
Mme F a interjeté appel de cette décision.
La Cour d’Appel de Paris vient de confirmer la décision déférée sauf en ce qui concerne la majoration de 40 %
Au cas particulier, pour respecter le délai de cinq ans et prétendre au bénéfice des dispositions précitées Mme F devait justifier que la domiciliation commune entre les deux soeurs avait débuté en juin 2004.
«L’administration admet la notion civile du domicile qui n’implique pas une cohabitation constante mais il doit être démontré que le domicile est au lieu du principal établissement. Les éléments retenus sont constitués par la résidence , une installation durable et également le paiement des impôts , la réception de la correspondance .» souligne la Cour.
Au cas particulier, Mme F a fait l’acquisition d’un appartement avec sa soeur le 15 juillet 2003 et elle a vendu son appartement d’Antibes le 12 mars 2008.
Elle a expliqué que c’est par négligence, qu’elle a déclaré l’appartement d’Antibes comme sa résidence principale.
Madame F produit :
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des justificatifs de paiement par CB sur la période 2004-2007 qui montrent des dépenses sur Paris et Antibes, avec une moyenne de 7 mois à Paris et le reste à Antibes ;
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une lettre d’un voisin qui indique sa présence constante auprès de sa soeur depuis 2004
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et une lettre du médecin traitant de sa soeur qui atteste de son état de santé dégradé nécessitant la présence d’une tierce personne.
«L’administration n’a pas reconnu une cohabitation constante dans le même logement dès lors que jusqu’en 2008, Mme F n’avait pas fait le choix de régulariser sa situation de partage entre les deux domiciles. Elle justifie de ce que le service vérificateur a relevé que l’appartement d’Antibes constituait la résidence principale de Mme F G Z jusqu’au moment de la vente en 2008. Ce n’est qu’en 2009 que l’adresse parisienne a figuré dans sa déclaration de revenus.»
Pour la Cour, les autres éléments produits ne suffisaient pas à caractériser une cohabitation, dès lors que dans ses déclarations de revenus pour les années 2006, 2007, elle avait indiqué sa résidence principale à Antibes.