La haute juridiction administrative vient de censurer la Doctrine BOFIP-Impôts qui, en matière de déductions exceptionnelles, prévoyait que si une entreprise choisissait de ne pas commencer à les pratiquer à la clôture de l'exercice où les biens sont acquis ou fabriqués, elle prenait une décision de gestion définitive qu'elle ne pouvait pas corriger.
La déduction exceptionnelle est un dispositif qui encourage les entreprises à réaliser certains investissements en leur accordant une déduction du résultat imposable qui s'ajoute à celle pratiquée au titre de l'amortissement.
Il en est ainsi de la déduction exceptionnelle en faveur des investissements dans des équipements de réfrigération et de traitement de l'air n'utilisant pas d'hydrofluorocarbures instituée par l'article 25 de la loi LF pour 2019 et codifiée à l'article 39 decies D du CGI. Cette déduction exceptionnelle de 40%s'est appliquée aux biens acquis ou pris en crédit-bail ou en location avec option d'achat à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 31 décembre 2022.
S'agissant des modalités de mise en oeuvre des dispositifs de déductions exceptionnels, l'administration précise d'un point de vue général
Les déductions sont optionnelles. Si une entreprise choisit de ne pas commencer à les pratiquer à la clôture de l'exercice où les biens sont acquis ou fabriqués, elle prend une décision de gestion définitive. Par conséquent, elle ne peut pas corriger par la suite sa déclaration pour déduire les déductions auxquelles elle a renoncé.
Rappel des faits :
Au cas particulier, la société A a demandé au Conseil d'Etat d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a refusé d'abroger le paragraphe n° 150 des commentaires administratifs publiés le 6 mars 2019 au BOFiP-impôts BOI-BIC-BASE-100-10 portant de façon commune sur plusieurs régimes de déductions exceptionnelles dont, ainsi que le précisent les commentaires administratifs publiés le 1er juillet 2020 au BOFiP - impôts sous la référence BOI-BIC-BASE-100, la déduction exceptionnelle en faveur des investissements dans des équipements de réfrigération et de traitement de l'air n'utilisant pas d'hydrofluorocarbures mentionnée à l'article 39 decies D du CGI.
Le Conseil d'Etat vient de faire droit à la demande de la société A.
Il précise :
- que les dispositions qui prévoient que le bénéfice d'un avantage fiscal est demandé par voie déclarative n'ont, en principe, pas pour effet d'interdire au contribuable de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu à l'article R. 196-1 du LPF, sauf si loi a prévu que l'absence de demande dans le délai de déclaration entraîne la déchéance du droit à cet avantage, ou lorsqu'elle offre au contribuable une option entre différentes modalités d'imposition dont la mise en oeuvre impose nécessairement qu'elle soit exercée dans un délai déterminé.
- que ni l'article 39 decies D du CGI ni aucune autre disposition législative ne prévoit une règle de déchéance du bénéfice de l'avantage fiscal qu'il instaure en l'absence d'exercice par le contribuable, lors de la déclaration du résultat de l'exercice au cours duquel l'immobilisation a été acquise ou fabriquée, de la faculté offerte par ces dispositions de déduire de celui-ci 40 % de la valeur des investissements éligibles à ce dispositif.
le paragraphe 150 des commentaires attaqués méconnait, en tout état de cause en ce qui concerne la déduction exceptionnelle mentionnée à l'article 39 decies D du code général des impôts, les dispositions dont il a pour objet d'éclairer la portée.
La société Agrial entreprise est donc fondée à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a refusé d'abroger ce paragraphe. Cette annulation implique nécessairement l'abrogation des mêmes énonciations, qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat d'ordonner en assortissant cette mesure d'un délai d'exécution de deux mois à compter de la notification de la présente décision.
Le paragraphe litigieux étant classé dans les "dispositions communes" propres aux différents régimes de déduction exceptionnelle, sa suppression vise tous ces régimes et pas seulement celui prévu par l'article 39 decies D du CGI.