Le juge de l'impôt nous rappelle en cas de remise en cause de l'exonération de plus-value professionnelle au titre du départ à la retraite (Art. 151 septies A du CGI) notamment quand la condition tenant à l’absence de contrôle capitalistique du cessionnaire n'est pas remplie que le fait générateur de l'imposition intervient l'année de l'événement entraînant cette remise en cause, et non l'année de la cession initiale.
L'article 151 septies A du CGI permet, sous certaines conditions, l'exonération des plus-values réalisées lors de la cession d'une entreprise individuelle ou de l'intégralité des droits détenus par un contribuable dans une société de personnes.
Pour en bénéficier, plusieurs conditions cumulatives doivent être remplies, notamment : l'exercice de l'activité pendant au moins cinq ans, la cessation des fonctions et le départ à la retraite du cédant dans les deux ans suivant ou précédant la cession, et l'absence de détention par le cédant de plus de 50% des droits de vote ou des bénéfices de l'entreprise cessionnaire.
Cette exonération peut toutefois être remise en cause si, dans les trois années suivant la cession, le cédant vient à détenir, directement ou indirectement, plus de 50% des droits de vote ou des bénéfices sociaux de l'entreprise cessionnaire.
La doctrine BOFIP précise à cet égard
Le cédant ne doit pas détenir, directement ou indirectement plus de 50 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de l’entreprise cessionnaire. Cette condition s’apprécie au moment de la cession mais également dans les trois années qui suivent la réalisation de la cession (pour plus de précisions, il convient de se reporter au II § 180 du BOI-BIC-PVMV-40-20-20-40).
A. Une détention directe ou indirecte des droits ou parts
Sont pris en compte pour le calcul du seuil, les droits ou parts détenus directement et/ou indirectement dans des sociétés, groupements, copropriétés ou indivisions.
Pour l’appréciation de la détention indirecte, il est tenu compte des droits ou parts qui sont détenus par l’intermédiaire d’une ou plusieurs sociétés ou groupements. Le pourcentage de ces droits ou parts s’apprécie alors en multipliant entre eux les taux de détention successifs dans la chaîne de participations.
B. Droits de vote ou droits dans les bénéfices sociaux
Le seuil de 50 % s’apprécie autant en ce qui concerne les droits aux bénéfices sociaux que les droits de vote, le droit au bénéfice pouvant, en effet, dans certaines circonstances, être déconnecté du droit de vote.
Ainsi, un cédant qui détient 15 % des droits aux bénéfices sociaux et 51 % des droits de vote de la société cessionnaire ne peut bénéficier des dispositions prévues à l’article 151 septies A du CGI.
Les droits ou parts démembrés sont pris en compte de manière indifférenciée pour le calcul du seuil. Ainsi, il suffit que le cédant détienne plus de 50 % de la nue-propriété ou de l’usufruit des droits ou parts du groupement ou de la société cessionnaire pour être exclu du régime d’exonération.
Rappel des faits :
Dans l'affaire soumise au TA de Toulon, M. A avait créé en mai 2000 l'EURL B, dont il était associé unique et gérant. Cette société, soumise à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des BIC (l'EURL n'ayant pas opté pour l'IS), a cédé son fonds de commerce de restaurant le 6 juin 2015 à la SAS SD Restauration pour un prix d'1M€.
Dans leurs déclarations fiscales respectives au titre de l'année 2015, tant l'EURL que M. A ont indiqué que la plus-value à long terme résultant de cette cession bénéficiait de l'exonération prévue à l'article 151 septies A du CGI.
Cependant, le 2 novembre 2016, M. A a acquis une participation majoritaire au capital de la SAS SD Restauration, passant de 26% à 58% des actions. L'administration fiscale a considéré que cet événement entraînait la remise en cause de l'exonération et a notifié à M. A, le 21 janvier 2019, une proposition de rectification mettant à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contribution sur les hauts revenus au titre de l'année 2016.
M. A a contesté ces impositions par une réclamation préalable rejetée par l'administration.
Il a alors saisi le TA de Toulon en demandant la décharge des impositions supplémentaires et la restitution de la somme de 100 000 € qu'il avait versée, assortie des intérêts moratoires.
Il soutient principalement que le droit de reprise de l'administration était prescrit en raison de la tardiveté de la notification de la proposition de rectification
Le Tribunal vient de rejetter l'ensemble des moyens et demandes du requérant.
Concernant la date du fait générateur de l'imposition lors d'une remise en cause d'exonération, le Tribunal précise que :
l'imposition résultant de la remise en cause de l'exonération est due au titre de l'année au cours de laquelle se réalise l'événement à l'origine de cette remise en cause
En l'espèce, c'est donc en 2016, lorsque M. A a acquis une participation majoritaire dans la société cessionnaire, et non en 2015, année de la cession du fonds de commerce, que l'imposition est due.
Cette prise de position est conforme à celle de la doctrine BOFIP qui précise (BOI-BIC-PVMV-40-20-20-40, n°180) :
La remise en cause de l’exonération s’opère dans les conditions de droit commun au titre de l’année au cours de laquelle le contrôle capitalistique de l’entreprise cessionnaire par le cédant est caractérisé.
Partant, le délai de reprise de l'administration expirait ainsi le 31 décembre 2019 (et non le 31 décembre 2018 comme le soutenait le contribuable), ce qui rendait la proposition de rectification du 21 janvier 2019 parfaitement régulière.