Le contexte a changé. La hausse des taux est un phénomène inéluctable et qu’il convient d’anticiper. Pour les émetteurs les plus lourdement endettés, il devrait entraîner des restructurations douloureuses. Avant de recourir à la croissance externe, les entreprises sont invitées à sécuriser, le plus tôt possible, leur endettement de long terme.
Depuis la crise financière de 2007/2008 , nous avons vécu dans un environnement de taux historiquement bas, voire négatifs, mais cette période est en passe de s’achever. La hausse des taux devient un phénomène inéluctable. Si l’effondrement du système financier a été évité grâce aux programmes d’achats d’actifs (QE) des banques centrales et à l’accroissement considérable de la dette des Etats, nous sommes arrivés au bout de la logique justifiant l’interventionnisme à outrance des institutions publiques. Aujourd’hui, les Etats des pays développés sont en situation de surendettement. Jamais en période de paix, les Etats européens ne s’étaient retrouvés à un tel niveau d’endettement. Pour mémoire, la dette publique de la zone euro a quasiment augmenté de 50 % en dix ans.
Dans un premier temps , cet afflux massif de liquidités a permis de redynamiser des économies menacées par la déflation, en maintenant les taux à des niveaux très bas, mais cette situation s’est révélée propice à la formation de bulles. A partir de l’année 2015, nous avons cependant atteint, sans le réaliser, les limites de ce système reposant sur l’accumulation de dettes.
Le dynamisme de la croissance mondiale actuelle et la récente réforme fiscale votée aux Etats-Unis contribuent au relèvement des anticipations inflationnistes, annonciateur de la hausse des taux. Compte tenu des fondamentaux macroéconomiques actuels, cette hausse est inéluctable et cette remontée structurelle des taux affectera, en premier lieu, les Etats. Quant aux entreprises, si certaines ont sécurisé leur dette à taux fixe pour une période plus ou moins longue, d’autres vont se retrouver dans des situations financières périlleuses avec l’obligation d’engager des restructurations douloureuses.
L’attentisme plutôt que la précipitation
Pour contenir cette hausse des taux et prévenir cette spirale du surendettement, les entreprises exposées à ce risque vont, en effet, devoir réaliser des arbitrages pesant sur leurs actifs ou leurs fonds propres.
Pour une entreprise désirant diminuer son endettement, trois solutions se présentent : augmenter ses fonds propres au risque de diluer le capital des actionnaires existants (à un prix aléatoire), céder une ou plusieurs activités ou engager une restructuration incertaine de sa dette. Dans tous les cas, les conséquences peuvent être très préjudiciables pour l’avenir de l’entreprise et aucune décision de ce type ne peut être prise dans la précipitation sans en avoir anticipé les conséquences.
Sur le marché du M&A, cette remontée des taux implique l’entrée dans un nouveau cycle avec une baisse attendue des volumes moyens des transactions et des acquéreurs plus sélectifs quant au choix de leur cible. C’est dans ce contexte que la remontée des primes de risque devrait entraîner le rétablissement d’une certaine hiérarchie entre les émetteurs en pénalisant les moins bien notés. De même, et nous souhaitons insister sur ce point, les entreprises doivent donner la priorité à la sécurisation de leur endettement. Celle-ci passe par la renégociation de leur dette de long terme aux taux les plus bas possibles.