La Cour des comptes a rendu public, le 8 novembre 2016, un rapport sur l’efficience des dépenses fiscales relatives au développement durable, demandé par la commission des finances du Sénat en application de l’article 58-2° de la loi organique relative aux lois de finances.
La Cour des comptes y souligne, le poids prépondérant des dépenses fiscales défavorables à l’environnement . Non seulement celles-ci sont largement supérieures aux dépenses fiscales favorables à l’environnement mais elles se sont accrues ces dernières années
L’Etat finance donc davantage la pollution que les solutions environnementales et climatiques via son système fiscal . Si on tient compte du différentiel de taxation entre le gazole et l’essence (6,11 Md€ en 2015), le total des dépenses fiscales défavorables au développement durable s’élève alors, selon la Cour des comptes, à 13 Md€ en 2015 , contre moins de 5 Md€ en faveur de l’environnement.
C’est sans compter d’autres niches fiscales accordées à des secteurs très émetteurs de gaz à effet de serre comme le transport aérien qui bénéficie d’une exemption de taxe totale sur le carburant équivalant à 2,825 milliards d’euros en 2015 . Bénéficiant avant tout aux personnes les plus aisées [5] et contraire au principe de pollueur-payeur, cette niche fiscale est une aberration.
Pour le Réseau Action Climat , «les niches fiscales défavorables à l’environnement doivent être supprimées pour mettre le système fiscal doit en cohérence avec la loi de transition énergétique et l’Accord de Paris sur le climat. Afin d’anticiper les impacts sur les acteurs et les secteurs concernés et d’accompagner cette transition, un échéancier doit être programmé au plus tôt.
Enfin, il est encore temps pour le gouvernement et les parlementaires de laisser un bilan plus honorable sur la fiscalité écologique en rectifiant le tir dans la loi de finance 2017 . Le Réseau Action Climat préconise la poursuite du rattrapage fiscal entre le diesel et l’essence en augmentant la TICPE sur le gazole et l’accélération de la trajectoire de la composante carbone.
Afin de mettre ces mesures au service d’une transition écologique plus juste, les recettes de la fiscalité écologique devront bénéficier aux ménages en premier lieu : directement pour les personnes en situation de précarité énergétique, au travers d’investissements dans les alternatives au transport routier individuel, bonnes pour la santé et le climat (transports en commun, projets pour rendre les territoires cyclables)»
La Cour formule les recommandations suivantes :
Recommandations d’ordre général :
1. borner dans le temps les dépenses fiscales , lors de leur création ou leur modification, en application des dispositions de la LPFP de 2014 ;
2. compléter les documents budgétaires (PAP et RAP) en classant les dépenses fiscales en fonction des objectifs du programme auquel elles se rattachent ;
3. indiquer dans la documentation budgétaire les meilleurs chiffrages disponibles au sein de l’administration et préciser la marge d’incertitude ;
4. mettre en place des mesures de plafonnement des dépenses fiscales , avec des mesures d’encadrement pluriannuel de la dépense ou d’agrément administratif préalable ;
5. procéder à l’évaluation exhaustive des dépenses fiscales d’ici à fin 2019 ;
6. mieux utiliser les conférences fiscales telles qu’issues de la LPFP de 2012, au même titre que les conférences budgétaires, en associant plus étroitement les ministères dépensiers au suivi des dépenses fiscales, et les rendre plus opérationnelles en proposant des mesures d’adaptation des dépenses fiscales en cas de dérive du dispositif ;
Recommandations propres aux dépenses fiscales relatives au développement durable :
7. préciser la définition des dépenses fiscales pour expliciter leurs objectifs en matière de protection de l’environnement et en assurer un suivi plus précis ;
8. lancer, avec le concours des organismes d’évaluation et de recherche, et notamment de l’ADEME et du CGDD, des évaluations globales des politiques menées dans les différents secteurs des transports ;
9.présenter, dans un rapport unique annexé au projet de loi de finances , pour chacune des dépenses fiscales en faveur de la protection de l’environnement, la dernière évaluation disponible de l’atteinte de ses objectifs ;
10. après évaluation, donner de la cohérence à l’ensemble des dispositifs fiscaux relatifs au développement durable en remettant en cause les mesures aux effets contradictoires sur l’environnement.