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Contrôle et contentieux

Opposition à contrôle fiscal : quand la succession de reports et de comportements dilatoires caractérisent l'opposition

Le juge de l'impôt nous rappelle que l'opposition à contrôle fiscal peut être caractérisée sans refus explicite, par une succession de comportements dilatoires apparemment anodins.

 

Pour mémoire, au cours des opérations de contrôle des déclarations souscrites par les contribuables auxquelles les agents des finances publiques procèdent périodiquement, ceux-ci peuvent se trouver confrontés à diverses attitudes des redevables destinées à les empêcher, directement ou indirectement, d'exercer leur mission, dans le cadre de l'exercice :

Dans cette dernière situation, l'article L74 du LPF institue une procédure d'imposition d'office du redevable lorsqu'il est établi que ce dernier s'est opposé, par sa propre action ou par l'intermédiaire de tiers, au contrôle dont il devait être l'objet.

 

Comme le rappelle la doctrine BOFIP-Impôts :

L'opposition individuelle à contrôle fiscal peut aller de la simple passivité à l'hostilité déclarée.

Au cours des opérations de contrôle sur place, les vérificateurs peuvent être confrontés à diverses attitudes des redevables destinées à les empêcher, directement ou indirectement, d'exercer leur mission (LPF, art. L13).

Le refus du contribuable de communiquer les livres et les documents comptables ou de rencontrer le vérificateur se traduit soit, par une opposition formelle de l'assujetti, soit, par une attitude passive telle que l'absence de réponse aux convocations. En présence de tels agissements, constitutifs d'une opposition à contrôle fiscal, l'article L74 du LPF institue une procédure d'évaluation d'office des impositions lorsqu'il est établi que le vérificateur n'a pas pu effectuer le contrôle, soit du fait du contribuable, soit du fait de tiers.

Pour apprécier la validité de cette procédure, la jurisprudence tient compte à la fois de l'attitude du contribuable et du comportement du vérificateur qui doit avoir entrepris des diligences normales pour effectuer et mener à son terme le contrôle.

 

BOI-CF-IOR-40,n°100

 

Les contribuables faisant l'objet d'une imposition sur le fondement de l'article L74 du LPF précité se voient réclamer l'intérêt de retard prévu par l'article 1727 du CGI et une majoration de 100 % prévue par l'article 1732 du CGI.

 

Rappel des faits :

La société FCND a été soumise à des vérifications de comptabilité portant sur les exercices clos les 31 décembre 2015 et 2016.

 

L'administration fiscale a estimé que la société B, filiale de FCND, avait opposé une attitude traduisant une opposition au contrôle fiscal, conformément à l'article L. 74 du LPF. En conséquence, une procédure d'évaluation d'office a été engagée, conduisant à une réintégration des frais de déplacement de Mme D dans le résultat imposable de B, et à des rehausses d'impôt sur les sociétés de 595 005 € pour 2015 et 223 047 € pour 2016, totalisant 540 280 € en droits et pénalités pour la société Financière CND.

 

Après plusieurs réclamations et dégrèvements partiels, le tribunal administratif de Caen a, par jugement du 9 février 2024, donné acte du désistement de la société FCND à fin de décharge concernant la réintégration des frais de déplacement, mais a rejeté le reste de sa demande.

 

FCND a alors fait appel de cette décision. La société soutient que l'administration fiscale a procédé de manière irrégulière en appliquant l'évaluation d'office sans respecter le principe du contradictoire, étant donné que la société n'a pas formellement opposé l'opération de contrôle.

 

La Cour vient de rejeter la requête de la société FCND, validant ainsi la qualification d'opposition à contrôle.

 

Pour rappel, les faits s'étalent sur plusieurs mois. Suite à un premier avis de vérification du 17 avril 2018, on observe une série de reports et d'absences :

  • Le 7 mai 2018 : demande de report par l'épouse du gérant, non habilitée
  • Le 15 mai 2018 : proposition de nouvelles dates par le gérant
  • Le 14 mai 2018 : lettre de mise en garde fixant une intervention au 4 juin (reçue tardivement)
  • Le 6 juin 2018 : nouvelle lettre fixant une intervention au 27 juin (pli non réclamé)
  • Le 5 juillet 2018 : première intervention effective
  • Le 16 juillet 2018 : annulation la veille du rendez-vous prévu pour la remise des fichiers comptables
  • Le 6 septembre 2018 : absence au rendez-vous, conduisant au procès-verbal d'opposition

La Cour valide la qualification d'opposition à contrôle en s'appuyant sur plusieurs comportements dilatoires

  • La multiplication des reports et absences ;
  • L'absence de justification sérieuse de ces empêchements ;
  • Le non-retrait des courriers recommandés ;
  • La non-transmission des fichiers comptables demandés ;
  • Les diligences répétées de l'administration pour permettre le contrôle.

Elle écarte l'argument des contraintes professionnelles du gérant, considérant que l'administration avait effectué toutes les diligences nécessaires pour permettre le contrôle.

 

Autrement dit, l'opposition à contrôle peut être caractérisée sans refus explicite, par une accumulation de comportements dilatoires. 

 

La plus grande prudence dans la gestion des relations avec l'administration durant un contrôle s'impose : les reports doivent être justifiés, les courriers retirés, et les documents demandés fournis dans des délais raisonnables, sous peine de voir qualifier le comportement d'opposition avec les lourdes conséquences qui en découlent (évaluation d'office et majoration de 100%)

 

 

Publié le vendredi 24 janvier 2025 par La rédaction

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