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Contrôle et contentieux

Michel Sapin pose officiellement le principe de non-rétroactivité en matière fiscale

À l’occasion de la deuxième réunion du Comité Place de Paris 2020, Michel Sapin a rendu publique une charte qui pose le principe de non-rétroactivité en matière fiscale. C’est la traduction détaillée de l’engagement qu’il avait pris le 27 août 2014 .

Dans la suite des assises de la fiscalité des entreprises qui se sont tenues au printemps 2014, le Gouvernement s’est engagé à conduire une politique ambitieuse d’amélioration des conditions dans lesquelles les règles fiscales s’appliquent aux entreprises, tant dans leur contenu que dans leur processus d’élaboration.

Ce processus se concrétise dans une double démarche de rationalisation des définitions auxquelles le droit fiscal fait appel et de sécurisation de l’environnement fiscal des entreprises. Ces objectifs qui participent à l’amélioration de la compétitivité, s’articulent avec ceux du pacte de responsabilité.

L’objet de la présente charte est de fixer ces nouvelles règles.

 

I. Rationalisation de la norme fiscale par le recours à des définitions existantes

Afin d’assurer une meilleure clarté et une meilleure accessibilité des règles fiscales, les projets d’articles législatifs ou amendements gouvernementaux, les projets de textes réglementaires et les instructions en matière fiscale devront, chaque fois qu’un tel renvoi est possible, utiliser l’une des définitions existant soit en matière fiscale soit dans les autres branches du droit.

Il ne pourra être dérogé à cette règle que lorsque le recours à une nouvelle définition spécifique au droit fiscal découlera d’une obligation prévue par une norme supérieure, notamment européenne, ou sera nécessaire pour rendre effectif un dispositif de lutte contre une pratique d’optimisation ou destiné à éviter l’absence de maîtrise budgétaire d’une dépense fiscale.

II. Accroissement de la sécurité juridique par un encadrement de l’entrée en vigueur de la loi fiscale

En matière fiscale, le droit applicable est celui qui est en vigueur au moment du fait générateur de l’impôt, c’est-à-dire le moment où la dette d’impôt du contribuable est effectivement constituée . Mais, compte tenu des spécificités de certains impôts, une loi même non rétroactive peut s’appliquer à des situations intervenues avant son vote : cette situation est qualifiée de rétrospectivité.

 

A. La rétroactivité des lois fiscales est strictement encadrée

En matière fiscale, les projets d’articles législatifs ou amendements gouvernementaux, ne devront plus s’appliquer aux faits générateurs antérieurs à la publication de la loi au journal officiel.

Trois exceptions à ce principe seront toutefois préservées :

1. Les dispositions interprétatives

Les dispositions législatives de nature interprétative ne modifient pas le droit en vigueur, mais se bornent à en clarifier certains aspects afin d’éviter des difficultés dans leur application par l’administration, le juge et les citoyens. De par leur contribution à la clarté du droit fiscal, les projets d’articles législatifs ou amendements gouvernementaux pourront continuer à comporter des dispositions interprétatives.

2. Les mesures législatives dites « de validation »

Dans certains cas, une réforme législative nécessite d’être rétroactive afin d’éviter qu’une mauvaise application de la loi précédemment en vigueur n’aboutisse pour sa réparation, à une désorganisation des services de l’Etat ou un encombrement de la justice. De telles dispositions, appelées « lois de validation » , sont très strictement encadrées par les jurisprudences du Conseil constitutionnel et de la Cour européenne des droits de l’homme.

En effet, pour être considérées comme constitutionnelles, les lois de validation doivent respecter la chose jugée et être particulièrement justifiées par l’intérêt général de l’Etat ou des collectivités concernées, l’intérêt financier ne constituant pas à lui seul un motif d’intérêt général suffisant.

Pour se conformer à la jurisprudence de la cour européenne des droits de l’homme, ces lois doivent respecter les contentieux engagés avant que leur contenu ne soit rendu public. Des projets de lois ou d’amendements de validation pourront continuer à être déposés dans le respect de ce strict encadrement.

3. Les dispositions susceptibles d’entraîner des comportements d’optimisation postérieurement à leur publicité

L’annonce de certaines mesures fiscales est susceptible d’entraîner des comportements d’optimisation de la part des contribuables, ces derniers prenant des décisions entre l’annonce de la mesure et le vote de la loi afin de bénéficier du régime antérieur.

Compte tenu des effets néfastes découlant d’un décalage entre l’annonce de telles mesures et l’adoption de la loi les mettant en oeuvre, les projets d’articles fiscaux comportant des dispositions susceptibles d’entraîner des comportements d’optimisation pourront continuer à entrer en vigueur à la date du conseil des ministres au cours duquel elles sont annoncées.

Par parallélisme, lorsque de telles dispositions figurent dans un amendement gouvernemental, son entrée en vigueur pourra être anticipée à la date de son dépôt par le Gouvernement.

 

B. Les lois fiscales ne pourront plus être rétrospectives

Pour l’impôt sur le revenu, la règle de droit qui s’applique est celle qui est en vigueur au 31 décembre de l’année . Elle concerne donc les revenus constitués tout au long de cette année. Pour l’impôt sur les sociétés, la règle qui s’applique est celle qui est en vigueur à la clôture de l’exercice.

Compte tenu des faits générateurs particuliers de ces deux impôts, une disposition législative peut, sans être rétroactive, être adoptée jusqu’à. la fin d’une année civile et s’appliquer, à l’impôt sur le revenu, aux revenus perçus depuis le ler janvier de l’année et, à l’impôt sur les sociétés, aux bénéfices perçus depuis le clôture de l’exercice précédent dans le cas d’une entreprise clôturant son exercice au 31 décembre.

Cette règle étant source d’insécurité pour les entreprises, dans la mesure où elles n’ont pas la certitude du traitement fiscal réservé à une opération au moment où celle-ci est effectuée, les projets d’articles législatifs ou amendements gouvernementaux ne devront plus s’appliquer aux revenus perçus au cours de l’année d’adoption de la loi et ne pourront s’appliquer qu’aux exercices ouverts à compter de la publication de celle-ci, sauf mesures favorables au contribuable.

Publié le lundi 1 décembre 2014 par La rédaction

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