L’essor du marché de l’art allemand

27/06/2023 Par La rédaction
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Après s’être penché sur l’état du marché de l’art en France et sur celui du marché américain, Artprice by Artmarket revient ici sur l’activité du marché allemand, cinquième place forte mondiale pour la vente d’œuvres d’art aux enchères.

 

Le marché de l’art haut de gamme paraît se porter de mieux en mieux en Allemagne au vue des forts résultats récents – signant parfois de nouveaux records d’artistes – qui se sont accélérés de façon notable depuis 2020 pour des oeuvres signées Ernst Ludwig KIRCHNERGeorges DE LA TOURKarl SCHMIDT-ROTTLUFFPablo PICASSO et Albert OEHLEN… autant d’artistes recherchés sur le plan international qui ont animé le marché allemand avec des adjudications de plusieurs millions de dollars chacun. L’année 2022 fut à ce titre une année historique pour le marché de l’art allemand qui dépassait pour la première fois les 379m$ de résultat annuel, soit un chiffre d’affaires en progression de +6% par rapport à l’exercice précédent pour un nombre de transactions parfaitement stable. Comme celui de sa voisine française, le résultat allemand a doublé en dix ans dans le domaine de la vente d’œuvres d’art aux enchères. 

 

Avant la fin du premier semestre 2023, les ventes réalisées en Allemagne ont dépassé les 147 millions de dollars : un chiffre encourageant quant aux perspectives pour la deuxième moitié de l’année. Comparée à l’activité des pays voisins, l’Allemagne reste certes loin derrière la France (environ 353m$ sur la même période), elle n’en est pas moins beaucoup plus dynamique que les marchés italien (88 millions), suisse (60 millions), autrichien (41 millions) et belge (35 millions).

 

Evolution du produit des ventes d’oeuvres d’art aux enchères en Allemagne (copyright Artprice.com)

 

Aujourd’hui, les sociétés Ketterer Kunst comme Grisebach font partie du cercle privilégié des maisons de ventes aux enchères européennes parvenant à obtenir des résultats millionnaires, face à la rude concurrence des autres places de marché comme Londres, Paris et New York. En cette année 2023, c’est la société Ketterer Kunst qui domine nettement le marché des oeuvres d’art Allemand, avec un produit de ventes supérieur à 41 millions de dollars, atteint avant l’échéance du premier semestre 2023. La deuxième maison de ventes la plus puissante, Van Ham Kunstauktionen, affiche un résultat de 29m$, tandis que Grisebach s’est établie à 19m$ entre janvier et mi-juin.

La plus belle adjudication signée par Ketterer Kunst depuis le début de l’année va à l’œuvre Mädchen mit Zopf (1910) d’Alexej VON JAWLENSKY (1864-1941). Cédée pour 6,8m$ le 9 juin dernier, cette œuvre apparaît comme troisième tableau le plus cher de l’expressionniste allemand. Il s’agit surtout d’un montant record pour ce qui est d’une vente de Jawlensky réalisée sur le sol germanique et de la deuxième oeuvre la plus chèrement vendue dans l’histoire des ventes aux enchères en Allemagne, après l’Autoportrait de Max BECKMANN laissé pour 24,4m$ en décembre 2022, chez Grisebach à Berlin. Rappelons qu’avec la vente de ce Beckman l’an dernier, l’Allemagne réalisait son premier résultat d’enchères supérieur à dix millions. 

 

Top 3 adjudications en Allemagne entre le 1er janvier et le 15 juin 2023

 

Top 10 des sociétés de ventes aux enchères en Allemagne pour les œuvres d’art vendues au cours du premier semestre 2023

 

La vente record de l’œuvre de Max BECKMANN chez Grisebach a marqué un moment charnière pour le marché de l’art allemand, en confirmant la prise d’ampleur qu’il est en train de prendre depuis quelques années. Outre des ventes plus robustes que d’habitude, l’implantation de Sotheby’s, revenue dans le pays en 2021 après une pause, est un autre signe favorable : elle tend à prouver la confiance des grands acteurs du marché de l’art dans le potentiel allemand. Cette décision de Sotheby’s doit sans doute aussi aux premières conséquences du Brexit, qui a rendu les opérations d’importation et d’exportation beaucoup plus lourdes Outre-Manche.

 

Les résultats d’enchères montrent clairement que les collectionneurs allemands privilégient l’art Moderne et d’Après-Guerre, notamment les œuvres de leurs compatriotes, suivies par des peintures de Maîtres anciens. Or, ces catégories d’oeuvres peuvent être soumises à la loi allemande pour la protection des biens culturels (“Kulturgutschutzgesetz“ – KGSG) entrée en vigueur en 2016 et stipulant que tout bien culturel qualifié de “trésor national“ ne peut quitter le territoire allemand que temporairement et sous réserve d’une autorisation, indépendamment de son âge ou de sa valeur. L’Allemagne limite aussi les exportations dans les États membres de l’Union Européenne pour les œuvres de plus de 75 ans et à partir d’une valeur équivalente à 300 000 dollars. Des restrictions qui profitent de facto à la croissance du marché intérieur allemand.

Communiqué d'Artprice