Artprice by Artmarket poursuit son état des lieux des grandes places du marché de l’art au cours des derniers mois. Après les Etats-Unis, la France et l’Allemagne, revenons ici sur la troisième place de marché mondiale, le Royaume-Uni, dont les résultats accusaient une très forte baisse, avant un redressement fin juin grâce à la vente d’un chef-d’oeuvre de Gustav Klimt.

 

Le bilan du premier semestre 2023 s’avère lourd côté britannique, où le produit des ventes d’œuvres d’art perd -35% comparé aux performances enregistrées l’an dernier.

 

Ce résultat s’est en effet établi à 960 millions de dollars pour environ 2 700 œuvres vendues au cours du semestre, contre 1,47 milliard de dollars pour 2 842 sur l’exercice précédent. Il s’agit de l’une des plus fortes baisses de résultat du secteur, alors que le marché américain flanche de -26% (l’année dernière fut une année exceptionnelle dont le niveau est naturellement difficile à maintenir) et que le résultat français perd -39% (S1 2023 vs S1 2022).

 

Relativiser les pertes…

A l’issue du premier semestre 2022, le Marché de l’Art occidental renouait avec une forte croissance portée par l’activité des marchés américain et britannique. Le résultat américain affichait alors une hausse de +42% (avant sa baisse de -29% cette année) et celui du Royaume-Uni grimpait de +26%, avant de se retrouver dégraissé de -35% cette année, malgré le superbe résultat de 241 millions de dollars obtenus pour sa très belle vente d’art moderne et contemporain du 27 juin.

 

Rappelons surtout que le premier semestre 2022 démontrait une intensité inégalée, et ce en dépit du report de nombreuses ventes aux enchères en Chine (-53 % du produit des ventes) causé par une vague de Covid-19 supplémentaire. Artprice faisait aussi état d’un nombre de transactions record (record absolu de 326 000 lots vendus en six mois) et relevait cette période comme étant le 5ème exercice (S1) le plus faste jamais enregistré pour la vente d’œuvres d’art aux enchères dans le monde (+8,8 % par rapport au S1 2021).

 

Les pertes essuyées cette année sur la plupart des grandes places de marché doivent donc être relativisées compte-tenu des résultats exceptionnels obtenus l’an dernier, dans une énergie inédite poussée par la sortie de la crise du Covid.

 

Evolution annuelle du produit des ventes d’oeuvres d’art aux RU jusqu’en 2022 (copyright Artprice.com)

 

Baisse de régime du marché très haut de gamme 

La baisse de résultat du Royaume-Uni ne doit rien à une éventuelle contraction de l’offre. Les catalogues de ventes aux enchères ont été alimentés par de nombreuses œuvres d’art cette année (environ 64 000 au S1 2023 contre environ 62 000 lots offerts sur la même période l’an dernier) et le nombre de transactions enregistrées reste à peu près stable (seule une légère baisse de -5% est à signaler). Les enchères ne sont donc pas boudées et le rythme de transactions est toujours dense. La grande différence comparée au premier semestre 2022 tient à la baisse du nombre de ventes sur le marché très haut de gamme.

 

Comme ce fut le cas pour les ventes new-yorkaises, celles de Londres ont été généreusement alimentées avec des œuvres absolument exceptionnelles l’an dernier, si bien que quatre d’entre elles dépassaient les 50 millions de dollars à Londres au cours du premier semestre 2022. Cette année, aucune œuvre n’avait atteint ce seuil de prix au Royaume-Uni avant la fin du mois de juin. C’est seulement lors de la vente du 27 juin que Sotheby’s a défrayé la chronique en cédant un chef-d’œuvre de Gustav Klimt pour 108,39 millions de dollars, établissant ainsi le nouveau record pour une œuvre vendue aux enchères en Europe.

 

Les quatre transactions supérieures à 50m$ au S1 2022 : 

  1. 79,3m$ : L’Empire des lumières (1961) de René MAGRITTE (Sotheby’s)
  2. 56,8m$ : The Foxes (Die Füchse) (1913) de Franz MARC (Christie’s)
  3. 52,5m$ : Study for Portrait of Lucian Freud (1964) de Francis BACON (Sotheby’s)
  4. 51,2m$ : Triptych 1986-7 (1986-1987) de Francis BACON  (Christie’s)

 

Royaume-Uni : évolution du nombre d’adjucations supérieures à 50m$ depuis 2000 (copyright Artprice.com)

 

Malgré le superbe résultat à plus de 100 millions de dollars obtenu pour La Dame à l’éventail de Klimt, les grands opérateurs de ventes à Londres ne parviendront pas à rattraper le fossé face aux sommets qu’ils ont pu établir en 2022. Il faudrait par exemple que Christie’s réalise 600 millions de dollars de ventes d’œuvres d’art au cours du deuxième semestre, ce qui paraît peu probable après les 293,5m$ obtenus à l’issue de ce premier semestre 2023. La première maison de ventes du Royaume-Uni vendait en effet pour 893,7 m$ d’œuvres d’art à Londres l’an dernier. A moins que… plusieurs chefs-d’œuvre inattendus de Magritte, Francis Bacon, Claude Monet ou qu’un autre Klimt exceptionnel ne vienne secouer les ventes de l’automne 2023.

 

Les trois artistes les plus profitables au marché britannique en 2023 (copyright Artprice.com)