Le marché de l’art français est l’un des plus importants au monde quant aux œuvres sur papier, non seulement sur le terrain des enchères mais aussi via l’offre unique qui éclot chaque printemps dans la capitale, avec ses salons dédiés et ses ventes spécialisées.
Aux enchères et à l’échelle de la planète, le marché du dessin représente plus de 3 milliards de transactions annuelles et la France constitue l’un des principaux marchés pour les œuvres sur papier, avec plus de 90 000 transactions en 2023, pour un tiers du résultat mondial. La puissance du marché français repose essentiellement sur la circulation de très belles oeuvres modernes et d’après-guerre signées Matisse, Cézanne, Picasso, Seurat, Chagall ou Dubuffet et, parfois, d’un chef-d’oeuvre ancien à l’instar du dessin à l’encre brune – Un homme nu (d’après Masaccio) et deux personnages derrière -, rareté de Michel-Ange vendue plus de 24 millions de dollars en 2022, chez Christie’s Paris. Il s’agit là du record absolu pour un dessin vendu aux enchères sur le marché français, où les adjudications millionnaires sont récurrentes.
Top 3 adjudications de dessins en France
24,3m$ : MICHELANGELO (1475-1564), A nude man (after Masaccio)
Christie’s Paris, 18/05/2022
8,7m$ : Henri MATISSE (1869-1954), Le Danseur 1937/38
Christie’s Paris & Pierre Bergé, 23/02/2009
8,1m$ : Paul CÉZANNE (1839-1906), Intérieur de forêt, 1904/06
Touati-Duffaud Paris, 20/12/2017
Top 3 adjudications de dessins en France en 2023
3,1m$ : Joan MIRO (1893-1983), L’oiseau du matin, 1939
Sotheby’s Paris, 19/04/2023
2,3m$ : Francis PICABIA (1879-1953), Novia, c.1916/17
Sotheby’s Paris, 15/03/2023
2,3m$ : HERGÉ (1907-1983), Tintin en Amérique
Artcurial Paris, 10/02/2023
Le marché français du dessin a profondément évolué depuis le début des années 2000, en conquérant de plus en plus le cœur des collectionneurs. Le nombre de transactions a fait un bond de +64% en 20 ans, pour un volume d’affaires dont la croissance est remarquable, de l’ordre de +123% sur la même période.
Évolution du produit des ventes aux enchères de dessin en France depuis 2000 (copyright Artprice.com)
Cette passion pour le dessin se manifeste généreusement chaque année à travers “la semaine du dessin” où plusieurs ventes sont consacrées aux dessins pendant les salons du dessin à Paris. Des centaines de feuilles sont mises aux enchères entre le 20 et le 23 mars, notamment chez Ader (Dessins anciens et modernes, le 22 mars, 240 lots), Millon (Dessins de 1500 à 1900, le 21 mars, 200 lots dont un dessin du 16e siècle de l’École du Pérugin et un magnifique dessin de Victor Hugo), Christie’s (Dessins Anciens et du 19e siècle, le 20 mars, avec une centaine de lots, dont un rare Moine franciscain à la pierre noire d’Anthony Van Dyck). Ces ventes spécialisées répondent aux salons organisés la même semaine à Paris, lesquels proposent une offre unique au monde axée sur les œuvres sur papier.
Répartition du produit des ventes du dessin par périodes de créations en France (2023) (copyright Artprice.com)
Salon du dessin, 32e édition
Le Salon du dessin du Palais Brongniart s’applique à montrer les plus belles feuilles en art ancien, moderne et contemporain, à travers une sélection pointue de 39 exposants seulement. Cet année, un hommage particulier est rendu à Dubbuffet à l’occasion des 50 ans d’existence de la fondation Dubuffet, qui à sélectionné 55 œuvres sur papier réalisées entre 1935 et 1985, afin de montrer la variété des techniques et leur emploi inventif par l’artiste.
Le Salon est aussi le rendez-vous du 17E Prix de dessin de la Fondation d’art contemporain de Daniel et Florence Guerlain, grands collectionneurs soutenant la jeune génération avec un prix doté de 25 000 euros, dont 15 000 euros pour le lauréat et 5 000 euros pour chacun des deux autres artistes sélectionnés. Une œuvre du lauréat est offerte par la Fondation à une institution française. Les artistes nommés pour la 17ème édition du Prix de Dessin Contemporain de la Fondation Daniel et Florence Guerlain, dont Artprice by
ArtMarket.com est mécène, ont été révélés le 11 décembre 2023. Voici leur présentation :
Lamia Joreige, artiste libanaise née en 1972
Ces dernières années, Lamia Joreige s’est particulièrement intéressée à la formation du Liban pendant la Première Guerre mondiale. Les troubles en Syrie, susceptibles d’affecter l’ensemble des régions voisines, ont ravivé sa mémoire de cette période historique où les nations ont été redessinées et morcelées. Elle plonge ainsi dans les archives du roi Fayçal, qui aurait pu diriger la première monarchie arabe indépendante, un projet qui finit par échouer. Elle explore également les conséquences de l’immense famine de 1915, provoquée par une invasion de sauterelles, ainsi que les diverses spéculations et blocus maritimes. Son objectif est de comprendre l’impact de ces bouleversements tant sur le plan mental que physique des populations concernées.
Amir Nave, artiste israélien né en 1974
Amir Nave, dans une exploration de la temporalité infinie de l’être humain, développe une approche obsessionnelle, spirituelle, voire quasi-mystique. Son travail artistique se concentre sur la question incessante de notre identité et de notre destination ultime. À ses débuts, il se penchait sur les paysages et les insectes, cherchant des parallèles entre notre espèce et d’autres. Par la suite, ses formes artistiques ont évolué vers les “créatures”, des entités qui évoquent autant notre passé le plus profond que nos futurs possibles. Qu’ils soient dessinés par un corps, une tête ou une entité, ces personnages vivent et agissent.
Christos Venetis, artiste grec né en 1967
Dans une sorte de protocole artistique, Christos Venetis réalise principalement ses dessins au crayon graphite sur ces couvertures de livres fantômes. Un contraste saisissant se dessine entre ces petits formats, caractérisés par leur délicatesse, leur précision et leur minutie, et les reliures malmenées des ouvrages, dont le titre reste inconnu. Bien que ces supports puissent évoquer les heures sombres de l’histoire, notamment les autodafés de la Seconde Guerre mondiale, la question globale de la représentation et de la narration de l’image devient centrale. L’artiste exprime sa volonté de travailler avec une forme d’absence de choix, cherchant à rendre sa “matérialité à l’image”.
Francis PICABIA (1879-1953), Novia
Drawing Now Art Fair
La 17e édition du salon du dessin contemporain se distingue du Salon du dessin par sa sélection centrée sur les cinquante dernières années. C’est donc un versant plus contemporain qui y est proposé, avec des artistes majoritairement encore en activité (parfois présents sur le salon) présentés par des exposants tels que les galeries Putman, Agnes B, Lelong, Catherine Issert, Suzanne Tarasiève ou Nathalie Obadia. On commence à trouver des œuvres pour moins de 1 000 euros pour les plus jeunes artistes présentés et à plus de 100 000 ou 200 000 euros pour des œuvres importantes d’artistes internationaux.
Le salon Drawing Now décerne lui aussi un prix. Soutenu par la Drawing Society, il est doté de 15 000 euros : 5 000 euros de dotation pour l’artiste, 10 000 euros d’aide à la production pour une exposition de trois mois au Drawing Lab et l’édition d’un catalogue monographique.
Les nommées cette année sont :
Caroline Corbasson, née en 1989, représentée par Dilecta
Stéphanie Mansy, née en 1978, représentée par la Galerie F
Catherine Meurisse, née en 1980, représentée la Galerie Barbier
Marine Pagès, née en 1976, représentée par la Galerie Bernard Jordan
Tatiana Wolska, née en 1977, représentée par Irène Laub
DDESSIN, 12e édition
Enfin, pour sa 12e édition, DDESSIN resserre ses exposants avec neuf galeries seulement et assume une couleur plus prospective en présentant, en plus des œuvres traditionnellement réalisées sur papier, des animations sur écran (vidéo de l’artiste Diane Arques) et une série de dessins d’Emo de Medeiros pour lequel l’artiste a eu recours à l’intelligence artificielle.
Là aussi, un prix sera remis dans le but d’encourager la création contemporaine et de valoriser le travail d’un artiste sélectionné par un jury composé de professionnels du monde de l’art et de la culture. Cette année, la présidence du jury a été confiée à Louma Salamé, directrice de la Fondation Boghossian – Villa Empain à Bruxelles (Belgique), en lien avec l’Institut français de Saint- Louis du Sénégal.
Salon du dessin. Du 20 au 25 mars 2024
39 exposants
Palais Brongniart.Place de la Bourse, Paris 2e
Drawing Now Art Fair. Du 21 au 24 mars
70 exposants
Le Carreau du Temple. 4 rue Eugène Spuller, Paris 3e
DDESSIN. Du 22 au 24 mars
9 exposants
Domis Maubourg, Paris 7e