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Impôt sur les sociétés

Quand une renonciation à recettes traduit un acte anormal de gestion

La Cour vient de rendre une nouvelle décision par laquelle elle juge que le fait de renoncer à percevoir des loyers est, pour une société constitutif d’un acte anormal de gestion.

 

En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du CGI, le bénéfice imposable à l’IS est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l’entreprise, à l’exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale.

µConstitue un acte anormal de gestion l’acte par lequelµ une entreprise décide de s’appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Les renonciations à recettes ou les abandons de créances consentis par une entreprise au profit d’un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d’une gestion commerciale normale, sauf s’il apparaît qu’en consentant de tels avantages l’entreprise a agi dans son propre intérêt.

S’il appartient à l’administration d’apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu’une renonciation à recettes ou un abandon de créances consenti par une entreprise à un tiers constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que cette entreprise n’est pas en mesure de justifier qu’elle a bénéficié en retour de contreparties.

Rappel des faits :

La SA P (Société de droit helvétique) est propriétaire d’une maison d’habitation (320 m²) sise à Vallauris Golfe-Juan, construite sur un terrain de 3 328 m², comportant notamment une piscine intérieure, une piscine extérieure, un hammam et des chambres dotées de terrasses avec vue panoramique sur la mer.

A la suite de la vérification de comptabilité de la SA P, l’administration, estimant qu’elle avait, au cours des deux exercices contrôlés, mis la «  villa Cantarella  » à la disposition gratuite de M. B, dirigeant de la société de droit britannique I sans que l’absence de perception de loyers par l’intéressée ne soit justifiée par l’intérêt de sa propre exploitation, en a déduit que cette renonciation à recettes était constitutive d’un acte anormal de gestion.

Pour établir le montant des recettes à réintégrer, en conséquence, aux résultats de la SA P, l’administration, en l’absence de comparables pertinents sur le marché locatif local, a déterminé la valeur locative de la villa par voie d’appréciation directe, en appliquant un taux de rendement de 5 % à la valeur vénale de cet immeuble. Elle a, par ailleurs, déduit de ces recettes des charges non comptabilisées. Les insuffisances ainsi déterminées, soit 110 500 € au titre de l’exercice clos en 2012 et 109 500 € au titre de l’exercice clos en 2013, ont été rapportés aux résultats de la SA P.

La SA P fait appel du jugement du 15 juin 2018 par lequel le TA de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés auxquelles elle a été ainsi assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013, et des pénalités correspondantes.

 

La SA P faisait valoir que l’état de la  villa était dégradé, qu’elle avait confié à la société I la mission de remettre la villa en état et de la vendre, et que M. B n’y a séjourné que ponctuellement dans le cadre de ses fonctions de dirigeant de la société I.

Toutefois, l’administration a fait valoir que M. et Mme B :

• occupaient déjà la villa au cours d’une visite domiciliaire qui s’était déroulée le 28 octobre 2010, • ont été redevables de la taxe d’habitation afférente à la villa au titre des années considérées, • que des dépenses régulières d’électricité et d’eau ont été constatées au cours de ces années.

L’administration fait également valoir

• que la société I ne produit aucun élément de justification relatif à la réalisation effective de travaux qui expliquerait les consommations d’eau et d’électricité.

« Par suite, l’administration établit, ainsi qu’il lui incombe, qu’en renonçant à percevoir les loyers correspondants auprès des occupants concernés, au cours des deux exercices en litige, la société leur a consenti un avantage. »

La Cour estime que la circonstance que M. B n’aurait pas été associé de la société requérante est sans incidence à cet égard.

Dans la mesure où la SA P n’apporte aucun élément ni aucune pièce justificative permettant de démontrer que cet avantage aurait présenté une quelconque contrepartie pour l’intérêt de son exploitation la Cour estime que l’administration a pu, à bon droit, retenir qu’une telle renonciation à recettes traduisait un acte anormal de gestion.

 

Publié le lundi 13 janvier 2020 par La rédaction

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