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Plus-values professionnelles

« Branche complète d'activité » : quand la constitution d'une SEP par le cédant fait échec à l'exonération 238 quindecies du CGI

Rappel de la définition stricte de la "branche complète d'activité" pour l'application de l'exonération des plus-values professionnelles (Art. 238 quindecies du CGI). Il met en évidence que la simple cession d'une clientèle, même accompagnée de quelques éléments matériels ou humains, ne suffit pas si l'autonomie de l'activité cédée, tant chez le cédant que chez le cessionnaire, n'est pas clairement établie.

 

L'article 238 quindecies du CGI prévoit une exonération des plus-values réalisées à l'occasion de la transmission d'une entreprise individuelle ou d'une branche complète d'activité, sous certaines conditions de valeur. Pour qu'une cession de plus-value soit exonérée, la notion de "branche complète d'activité" est cruciale.

 

La jurisprudence exige que la branche cédée soit susceptible d'une exploitation autonome tant chez le cédant que chez le cessionnaire. Cela implique un transfert complet des éléments essentiels de l'activité, incluant les moyens matériels et, le cas échéant, le personnel nécessaire à la poursuite autonome de l'activité. La simple cession d'une clientèle ou de contrats, sans les moyens d'exploitation qui lui sont associés, n'est généralement pas considérée comme une transmission de branche complète d'activité.

 

Pour mémoire, la LF pour 2024 a introduit un VIII bis à l'article 238 quindecies du CGI, qui a étendu le régime de l'article 238 quindecies à l'indemnité compensatrice versée à un agent général d'assurances exerçant à titre individuel par la compagnie d'assurances qu'il représente à l'occasion de la cessation du mandat, sous certaines conditions. Bercy a commenté l'extension de l’exonération 238 quindecies du CGI à l'hypothèse de cession de portefeuille à la compagnie mandante et de perception d’une indemnité compensatrice, le 15 mai dernier.

Jusqu'au 31 décembre 2021, l’exonération 238 quindecies était totale lorsque cette valeur était inférieure ou égale à 300 000 € et dégressive lorsque cette valeur était comprise entre 300 000 € et 500 000 €. L’article 19 de la LF pour 2022 a rehaussé ces plafonds à hauteur de 500 000 € pour une exonération totale et à hauteur de 1 000 000 € pour une exonération partielle. 


 

Rappel des faits :

En 2018, M. CD, agent général d'assurances, a cédé la moitié de son portefeuille d'assurances Axa à sa fille. Il a estimé que la plus-value résultant de cette cession pouvait bénéficier de l'exonération de l'article 238 quindecies du CGI. L'administration fiscale a contesté cette exonération, considérant que l'opération ne portait pas sur une branche complète d'activité, et a assujetti M. D à un complément d'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux.

 

Le Tribunal administratif de Dijon a rejeté la demande de M. D en octobre 2023. M. D a alors fait appel devant la Cour administrative d'appel de Lyon.

M. D soutient que la cession à sa fille constituait bien une cession de branche complète d'activité, arguant qu'il y avait eu un transfert de propriété. Il fait valoir qu'il avait cédé des éléments essentiels à l'exercice de l'activité, tels que :

  • les contrats de travail de deux salariés,
  • la jouissance d'un local
  • et une partie du matériel informatique, indispensables à sa fille pour exercer son activité d'agent général d'assurances.

Il invoque également le bénéfice de la documentation administrative BOI-BIC-PVMV-40-20-50.

 

La Cour administrative d'appel de Lyon a confirmé le jugement de première instance et rejeté la requête de M. D.

 

Concernant la qualification de "branche complète d'activité", la Cour a jugé qu'il ne ressortait pas de l'instruction que M. D aurait cédé des moyens d'exploitation, matériels et humains dédiés à l'activité de la moitié du portefeuille cédé de manière autonome.

 

La Cour a relevé que M. D. et sa fille avaient constitué concomitamment une société en participation d'exercice conjoint pour la mise en commun des moyens d'exploitation. La Cour a souligné que M. D avait ainsi conservé la maîtrise des moyens d'exploitation qu'il utilisait antérieurement pour l'ensemble de ses portefeuilles.

Par ailleurs, il résulte de l'instruction que M. D et Mme E ont constitué concomitamment à cette cession, à effet au 1er janvier 2019, une société en participation d'exercice conjoint réalisant, pour le compte de ses associés, la mise en commun des moyens d'exploitation tant en personnel qu'en matériel nécessaires à la gestion des portefeuilles d'assurances des associés, qui selon ses statuts " demeurent individuellement et personnellement titulaires des mandats qui leur sont conférés par les entreprises d'assurances qu'ils représentent ", de sorte que M. D a conservé, par l'intermédiaire de la maîtrise des moyens d'exploitation dont il disposait antérieurement pour l'exploitation des portefeuilles d'assurances cédés pour moitié.

 

La Cour a également noté que la clientèle cédée n'était pas

clairement individualisée et constitutive d'un ensemble d'éléments d'actifs isolés

et

qu'il n'était pas établi que les résultats de cette activité étaient distingués en comptabilité.

 

La Cour a ainsi conclu que la cession de la moitié de la clientèle répartie en divers portefeuilles d'assurance ne pouvait être regardée comme ayant porté sur une branche complète d'activité.

 

En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi fiscale (Art. L. 80 A du LPF), la Cour a rappelé les conditions d'application du § 180 de la doctrine BOFIP BOI-BIC-PVMV-40-20-50. Cette doctrine assimile à une cession de branche complète d'activité la cession de clientèle par un associé à une structure de moyens, concomitamment à la cession de l'intégralité de ses parts ou droits dans cette structure. Or, la Cour a constaté que M. D n'avait pas cédé l'intégralité de ses parts dans la SEP d'exercice conjoint. Par conséquent, il ne pouvait pas se prévaloir utilement de cette doctrine.


 

Publié le mardi 15 juillet 2025 par La rédaction

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