Par cet arrêt, la cour administrative d’appel de Versailles s’est prononcée sur un jugement, très critiqué, du tribunal administratif de Cergy-Pontoise (TA Cergy-Pontoise, 2ème ch., 3 septembre 2010, n°08116403 septembre 2010) rendu dans une affaire de rachat de titres auprès de ses actionnaires, suivi d’une réduction de capital, financée par emprunt.
En l’espèce, la SAS YOPLAIT , anciennement dénommée Sodima International était détenue à hauteur de 74,68 % par la société Sodiaal International et, à hauteur de 25,32 %, par la société Financière Tramontane.
L’assemblée générale extraordinaire de la SA Sodima International a décidé une réduction de capital et autorisé le conseil d’administration à procéder au rachat d’actions propres en vue de leur annulation. L’offre de rachat n’a été acceptée que par Sodiaal International et l’opération d’annulation a eu pour effet de ramener la participation détenue par la société Financière Tramontane à 50 %. Sodima International avait financé ce rachat par l’émission d’obligations convertibles souscrites par Sodiaal International et par un prêt consenti par divers établissements financiers, et avait déduit les frais financiers afférents à ces emprunts.
L’administration, estimant que l’opération avait été menée dans le seul intérêt de la société Financière Tramontane a, sur le fondement de l’acte anormal de gestion, rapporté aux résultats réalisés par la société Sodima International les frais qu’elle avait exposés .
Dans une décision du 3 septembre 2010, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a donné raison à l’administration fiscale considérant que la société ne démontrait pas un intérêt propre à l’opération.
Devant la Cour Administrative d’appel de Versailles, le contribuable faisait valoir que l’opération de rachat de ses propres actions n’était pas dépourvue de contrepartie pour elle dès lors qu’elle s’inscrivait dans un contexte global de réorganisation, rendue nécessaire par un besoin de financement de cette société et que ledit rachat n’était que l’ultime étape d’une opération beaucoup plus vaste de partenariat stratégique ayant permis d’améliorer le résultat consolidé du groupe Yoplait. Le contribuable arguait également du fait que les opérations réalisées, prises dans leur ensemble, avaient permis d’améliorer la situation financière du groupe Yoplait et avaient contribué au développement de son activité.
Sur la base des arguments de fait présentés par le contribuable, la Cour a ainsi considéré que cette opération ne pouvait être regardée comme étant dépourvue de contrepartie pour la SAS YOPLAIT et ne relevait donc pas d’une gestion commerciale anormale. La Cour a donc annulé le jugement du TA de Cergy-Pontoise.
Cette jurisprudence, certes favorable au contribuable en l’espèce, invite néanmoins à la prudence pour les opérations de haut de bilan financées par emprunt dès lors qu’elle apprécie l’opération au regard de l’intérêt propre de la société ayant racheté ses titres, alors même qu’il s’agit d’une décision prise par les actionnaires.
Evelyne Bagdassarian et Edouard de Rancher sont avocats au cabinet Baker & McKenzie SCP 1 RUE PAUL BAUDRY, 75008 PARIS