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Contrôle et contentieux

Compte courant d'associé débiteur : abus de droit fiscal sur des prêts signés pour contourner la présomption de l'article 111-a du CGI

Le CADF nous fourni une nouevelle illustration  des risques liés à la gestion des comptes courants d'associés débiteurs. Saisi d'un litige portant sur la présomption de distribution de dividendes, le Comité a validé la mise en œuvre de la procédure de l'abus de droit fiscal. Il a estimé que les actes juridiques mis en place par le contribuable pour justifier les avances ne constituaient pas la "preuve contraire" imposée par la loi, mais caractérisaient un montage artificiel.

 

Pour mémoire, l'article 111-a du CGI instaure une présomption de distribution. En effet, les avances, prêts ou acomptes consentis aux associés sont présumés celer une distribution de revenus, et c'est aux redevables qu'il appartient, le cas échéant, d'apporter la preuve contraire.

Cette présomption légale de distribution n'est applicable que sous réserve de la preuve contraire qu'il appartient au contribuable d'apporter.

Cette preuve contraire résulte, dans chaque cas particulier, des circonstances propres à démontrer que l'opération effectuée ne revêt pas, dans les rapports de la société avec l'associé, le caractère d'une distribution exceptionnelle ou anticipée de produits sociaux et qu'elle est exclusive de toute faveur spéciale au profit du bénéficiaire.

 

Affaires (n° 2025-15 et 2025-16)

 

Rappel des faits :

M. Y, dirigeant d'une société B, a créé une société holding (Société A) à l'IS, qu'il contrôle à 99,98 %. Puis, il a apporté à la Société A son contrat de prestation de services (conclu avec la société B), évalué à 3,2 M€ (sur la base de 10 ans de revenus). L'opération a été placée en report d'imposition (Art. 151 octies).

De 2017 à 2021, M. Y a prélevé d'importantes sommes sur la trésorerie de la Société A pour financer son train de vie, rendant son compte courant d'associé fortement débiteur (plus de 1,2 M€).

Pour justifier ces prélèvements et éviter la taxation en dividendes (Présomption précitée) M. Y, agissant à la fois comme gérant de la société prêteuse et comme emprunteur, signe deux contrats de prêt pour 1,86 M€.

 

L'administration a mis en oeuvre la procédure de l'abus de droit fiscal. Elle a estimé que les contrats de prêt étaient fictifs et ne constituaient pas la "preuve contraire" exigée par l'article 111-a du CGI pour écarter la présomption de distribution. Elle a donc requalifié les avances en compte courant en dividendes, taxés à l'IR et aux prélèvements sociaux chez M. et Mme Y, et a appliqué la majoration de 80 %.

 

Le Comité a validé la position de l'administration en démontant le caractère artificiel du montage à deux niveaux :

  • Concernant le caractère fictif des "prêts" : Le Comité relève que les contrats de prêt sont une pure fiction. Ils ont été signés par M. Y avec lui-même pour régulariser a posteriori des prélèvements déjà effectués. De plus, ils ne prévoyaient ni échéancier de paiement, ni garantie, et aucun intérêt n'a jamais été versé.

  • Concernant le caractère fictif du "remboursement" : Le contribuable a tenté de prouver sa bonne foi en effectuant un remboursement en 2022 (après le début du contrôle fiscal) via une réduction de capital de 2 M€ (les parts annulées venant apurer le compte courant débiteur).

    • Le Comité a rejeté cet argument, le qualifiant de "simple jeu d'écritures".

    • Le Comité a noté que la valeur des parts annulées provenait de l'apport initial du contrat de 3,2 M€ (évalué sur 10 ans). Or, il a constaté que ce même contrat avait été résilié en 2017 après moins d'un an d'exécution.

    • Le Comité en a déduit que l'apport initial était lui-même dépourvu de réalité économique à hauteur de sa valorisation.

 

Pour le Comité, les prêts étaient fictifs et le remboursement l'était tout autant, car il reposait sur l'annulation de parts créées à partir d'un actif sans substance. L'administration était donc fondée à écarter ces actes et à appliquer la majoration de 80 % pour abus de droit.

Publié le vendredi 31 octobre 2025 par La rédaction

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