Une nouvelle question ministérielle soulève les incohérences d'interprétation entre différents services de l'administration fiscale quant à l'échelle d'appréciation des travaux de rénovation (immeuble entier versus lot individuel), générant ainsi une insécurité fiscale pour les opérateurs immobiliers. L'enjeu est important dans la mesure où il a des conséquences tant sur le régime de TVA applicable que sur les droits de mutation à titre onéreux (DMTO).
Pour mémoire, sont considérés comme immeubles neufs, au sens de l'article 257-I-2-2° du CGI, les immeubles bâtis qui sont achevés depuis cinq ans au plus. Cet achèvement peut résulter (BOI-TVA-IMM-10-20-20 au I-B-1-a § 50 et suivants) :
- d'une construction nouvelle ;
- de travaux portant sur des immeubles existants qui ont consisté en une surélévation ou qui ont rendu à l'état neuf :
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soit la majorité des fondations ;
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soit la majorité des éléments hors fondations déterminant la résistance et la rigidité de l'ouvrage ;
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soit la majorité de la consistance des façades hors ravalement ;
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soit l'ensemble des éléments de second œuvre énumérés à l'article 245 A de l'annexe II au CGI dans une proportion au moins égale aux deux tiers pour chacun d'eux.
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La question posée par le député de l'Orne Thierry Liger concerne justement l'article 257, I-2-2° du CGI qui définit les travaux ayant rendu à l'état neuf un immeuble existant.
Le problème soulevé repose sur une contradiction apparente dans la doctrine administrative :
- D'une part, le BOI-TVA-IMM-10-10-10-20 indique au §200 que les travaux doivent être considérés "au regard de l'immeuble pris dans son ensemble", indépendamment de la division ou de l'affectation des locaux.
Pour l'appréciation de l'ampleur des travaux, hormis le cas spécifique des travaux augmentant la surface de plancher (BOI-TVA-LIQ-30-20-90-30 au II-B § 360 et suivants) et à défaut de circonstances particulières tenant à la configuration des lieux impliquant une appréciation globale de plusieurs bâtiments, un immeuble s'entend d'un bâtiment considéré isolément y compris lorsque différents bâtiments rénovés sont situés sur une même parcelle.
Bien que des bâtiments soient immatriculés au cadastre sous des numéros différents, la nature des travaux s'apprécie au regard de l'ensemble de ces bâtiments réputés formés un seul immeuble dès lors qu'ils communiquent entre eux horizontalement et verticalement et disposent des mêmes issues sur la voie publique. Si des bâtiments sont situés sur plusieurs parcelles cadastrales et que les différentes parties d'un immeuble sont indissociables, il convient d'apprécier l'ensemble immobilier (Cass; Com, arrêt du 10 janvier 1995, n° 92-15975, SCI Diffamode).
Il convient de considérer les travaux au regard de l'immeuble pris dans son ensemble, y compris les parties ayant donné lieu à de simples travaux d'entretien et d'amélioration. Sont sans incidence à cet égard les circonstances suivantes :
- les locaux nouvellement aménagés sont affectés à plusieurs occupants ;
- l'affectation de certaines parties de l'immeuble est modifiée ;
- l'immeuble est affecté à plusieurs usages ;
- l'opération immobilière a pour effet de diviser physiquement ou juridiquement un immeuble constituant jusqu'alors une entité unique.
- D'autre part, le même document contient au §280 un rescrit (RES n°2007/34) qui admet, pour l'application du taux réduit de TVA, l'appréciation des travaux au niveau d'un lot de copropriété.
Question : immeuble collectif en copropriété. Comment apprécier l'ampleur des travaux pour un appartement situé dans un immeuble collectif ?
Réponse : Les travaux doivent s'apprécier au niveau de l'immeuble pris dans son ensemble. Toutefois, s'agissant d'un logement situé dans un immeuble collectif (cf. définition au BOI-TVA-LIQ-30-20-90-10 au II § 20), le preneur des travaux n'a pas nécessairement connaissance des travaux réalisés par les autres copropriétaires dans leurs appartements. En revanche, chaque copropriétaire est informé lors des assemblées générales de copropriété des travaux qui affectent les éléments du gros œuvre.
Dès lors, les travaux doivent s'apprécier par rapport à l'ensemble de l'immeuble s'agissant des travaux affectant les éléments du gros œuvre (fondations, éléments hors fondations déterminant la résistance et la rigidité de l'ouvrage et consistance des façades hors ravalement). Pour les autres travaux, il est admis, pour l'application du taux de TVA, que les travaux s'apprécient au niveau de l'appartement.
Selon le député, cette situation crée une disparité de traitement selon les services fiscaux :
- Certains services (SJCF, DGE) acceptent d'appliquer le rescrit à tout type d'immeuble et pour l'ensemble des conséquences fiscales (TVA et DMTO)
- D'autres services refusent cette tolérance, même lorsqu'ils sont informés de la position des premiers
Dans ce contexte, le député demande au ministre...
- ...de bien vouloir préciser que l'appréciation des travaux portant sur des immeubles collectifs, lesquels s'entendent des immeubles qui comprennent au moins deux locaux et dont les charges sont réparties entre au moins deux utilisateurs, peut être effectuée, à titre de tolérance, au niveau de chaque local, le cas échéant, formalisé par un lot de copropriété ou un volume ou encore par un simple état descriptif de division et que l'existence de ces locaux doit être appréciée lors de l'achèvement des travaux en cas de détention (immeuble immobilisé) ou lors de leur revente, le cas échéant, sous la forme de vente d'immeuble à rénover ou de vente en l'état futur d'achèvement (immeuble en stock).
- de confirmer que cette appréciation par local concerne l'engagement de construire pris lors de l'acquisition de l'immeuble et les régimes de TVA et de DMTO applicables lors de la revente des locaux, ainsi que l'existence ou la remise à neuf de planchers non structurels (BOI-TVA-IMM-10-10-10-20 § 250), les tolérances concernant l'engagement de construire et le bénéfice du taux réduit de DMTO (BOI-ENR-DMTOI-10-40 § 120 et 230) y compris pour la vérification de l'application du taux réduit de TVA prévu à l'article 279-0 bis du CGI et enfin la taxe additionnelle de l'article 1599 sexies du CGI.