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L'intention de réaliser une activité économique taxable suffit pour exercer son droit à déduction de la TVA d'amont

Il résulte des articles 167 et 168 de la directive TVA telles qu'interprétées par la CJUE notamment dans son arrêt du 29 février 1996 INZO (C-110/94), que le droit à déduction peut être exercé lorsque la taxe devient exigible chez le fournisseur, dès lors que l'assujetti s'est acquitté du prix des biens ou services et détient une facture mentionnant la TVA, même lorsque l'activité économique envisagée ne donne pas lieu à des opérations ouvrant droit à déduction ou lorsque l'assujetti n'a pas utilisé les biens ou services ayant donné lieu à déduction dans le cadre d'une opération taxable, comme il prévoyait de le faire, en raison de circonstances indépendantes de sa volonté et en l'absence de toute intention frauduleuse ou abusive.

 

Par ailleurs, en application de l'article 184 de cette même directive tel qu'interprété par la CJUE notamment dans son arrêt du 9 juillet 2020 HF c/ Finanzamt Neuenahr-Ahrweiler (C-374/19), que le droit à déduction doit faire l'objet d'une régularisation si l'assujetti n'envisage plus d'utiliser les biens et les services en question pour réaliser des opérations taxées en aval, ou s'il les utilise pour effectuer des opérations exonérées.

 

Rappel des faits :

La société CVE a obtenu le remboursement de la TVA ayant grevé des travaux de rénovation qu'elle avait réalisés entre octobre 2014 et novembre 2016 dans le cadre de la préparation d'une activité d'exploitation de maison d'hôtes, commencée de manière effective en 2016. A la suite d'une vérification de comptabilité menée en 2017 au titre de la période du 29 juillet 2014 au 30 novembre 2016, l'administration, estimant que l'activité de la société était exonérée de la TVA, lui a notifié des rappels de cette taxe correspondant aux montants dont elle avait obtenu le remboursement.

 

Après rejet de sa réclamation, la société CVE a saisi le tribunal administratif qui a également rejeté sa demande en décharge. La société CVE a en revanche obtenu gain de cause devant les juges d'appel (CAA de Nantes du 21 octobre 2022, n°21NT00981). Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique s'est pourvu en cassation.

 

Le Conseil d'Etat vient de rejeter le pourvoi confortant les droits à déduction de la société CVE.

 

Pour mémoire, la société CVE avait déposé, le 20 août 2014, une déclaration de création d’une entreprise, faisant mention d’une activité d’hébergement avec services para-hôteliers, avec une option pour la TVA selon le régime normal. Cette déclaration était conforme à l’objet social de la SARL CVE. En outre, il est établi, au vu des factures produites, que la requérante a acquis en 2016 les moyens d’exploitation correspondant à cette activité soumise à la TVA et ouvrant droit à déduction.

 

Pour rejeter le pourvoi du ministre, le Conseil d'Etat fait valoir que ce qui prévalait pour pouvoir déduire la TVA d'amont c'était la déclaration d'intention (sincère et non frauduleuse) de la société d'utiliser ces travaux pour les besoins d'une activité taxable d'hébergement meublé avec services.

 

La circonstance que l'activité effectivement exercée était exonérée sur le fondement de l'article 261 D-4° du CGI était sans incidence sur le bien-fondé de la déduction initiale à laquelle la société avait procédé et seulement susceptible d'entraîner, pour la société, l'obligation de régulariser cette déduction en application de l'article 207 de l'annexe II au CGI.

 

 

En premier lieu, eu égard aux règles d'exercice du droit à déduction rappelées aux points 2 et 3 ci-dessus, le moyen soulevé par la société devant la cour, tiré de ce qu'elle avait déclaré avoir l'intention d'utiliser ces travaux pour les besoins d'une activité taxable d'hébergement avec services et que, dès lors que l'administration ne contestait pas la sincérité de cette intention, la déduction de la taxe à laquelle elle avait procédé lui était définitivement acquise au titre de la période en cause n'était pas inopérant. Par suite, la cour n'a pas méconnu son office en annulant le jugement attaqué devant elle pour n'y avoir pas répondu.

En second lieu, la cour n'a ni méconnu son office, ni commis d'erreur de droit en faisant droit à ce moyen, après avoir relevé, par une appréciation souveraine non arguée de dénaturation, que la société avait déclaré son intention de réaliser une activité économique taxable d'hébergement meublé avec services et que cette intention n'était ni frauduleuse ni abusive. La cour n'avait, à cet égard, pas à rechercher si l'activité effectivement exercée était exonérée sur le fondement du 4° de l'article 261 D du code général des impôts, dès lors que cette circonstance était sans incidence sur le bien-fondé de la déduction initiale à laquelle la société avait procédé et qui avait été remise en cause par l'administration, mais était seulement susceptible d'entraîner, pour la contribuable, l'obligation de régulariser cette déduction.

Publié le jeudi 6 juillet 2023 par La rédaction

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