Nouvelle précisions du juge de l'impôt concernant l'exonération de TVA des leçons dispensées à titre personnel. Cette exonération n'est pas limitée à la seule absence d'une structure juridique, mais s'apprécie au regard des conditions concrètes d'organisation de l'activité. Le fait de recourir à des tiers, même pour des prestations complémentaires ou distinctes, peut contaminer l'ensemble de l'activité, y compris les cours donnés personnellement par l'enseignant, et faire perdre le bénéfice de l'exonération
Les activités d'enseignement entrent dans le champ d'application de la TVA dès lors qu'il s'agit d'une prestation de services relevant d'une activité économique effectuée à titre onéreux.
Toutefois, le 4° du 4 de l'article 261-4-4° du CGI exonère de la TVA, sous certaines conditions, les types d'enseignement suivants :
- l'enseignement scolaire, universitaire, technique, professionnel, agricole, à distance ;
- la formation professionnelle continue, telle que définie par les dispositions législatives et réglementaires qui la régissent, assurée soit par les personnes morales de droit public, soit par des personnes de droit privé titulaires d'une attestation délivrée par l'autorité administrative compétente reconnaissant qu'elles remplissent les conditions fixées pour exercer leur activité dans le cadre de la formation professionnelle continue ;
- les cours ou leçons particuliers dispensés par des personnes physiques rémunérées directement par les élèves.
Ainsi, l'article 261-4-4°-b du CGI exonère de la TVA les cours ou leçons particuliers dispensés personnellement par des personnes physiques qui perçoivent, directement de leurs élèves, la rémunération de leur activité enseignante. L'exonération s'applique aux cours ou leçons :
- relevant de l'enseignement scolaire (mathématiques, français, langues étrangères, etc.), universitaire, professionnel, artistique (chant, piano, danse, etc.), sportif (éducation physique, judo, natation, équitation, tennis, ski, etc.) ;
- dispensés par des personnes indépendantes en dehors du cadre de l'exploitation d'un établissement d'enseignement.
Rappel des faits :
M. A, est un enseignant de danse exerçant à titre individuel. À l'issue d'une vérification de comptabilité pour la période 2014-2016, l'administration fiscale a remis en cause l'exonération de TVA dont il se prévalait pour ses prestations d'enseignement. Des rappels de TVA, assortis d'intérêts de retard et de la majoration de 10 % pour taxation d'office, lui ont été réclamés en application de l'article L. 66, 3° du LPF. L'administration a également réintégré diverses charges dans ses BNC.
M. A a porté l'affaire devant le tribunal administratif de Grenoble, puis devant la cour administrative d'appel de Lyon, qui ont tous deux rejeté ses demandes. M. A s'est pourvu en cassation contestant la remise en cause de l'exonération de TVA et la régularité de la procédure.
Le Conseil d'Etat vient de rejeter le pourvoi
Sur le fond, le débat portait sur l'application de l'article 261-4-4° b du CGI qui vise notamment les leçons données "à titre personnel" par un enseignant pour son propre compte et sous sa propre responsabilité.
Le Conseil d'État a rappelé que cette exonération ne s'appliquait qu'aux cours qui, "eu égard aux conditions d'organisation de l'activité", peuvent être regardés comme dispensés à titre personnel. Il a précisé que les leçons données avec le concours d'autres personnes, notamment salariées, ne peuvent bénéficier de cette exonération, quelle que soit la fonction de ces personnes.
Soulignons que la doctrine BOFIP va déjà en ce sens puisqu'elle précise :
Les personnes qui enseignent avec le concours de salariés doivent être soumises au paiement de la TVA. Tel est le cas des professeurs de musique qui enseignent avec le concours de salariés (assistants, accompagnateurs de musique, etc.) et qui de ce fait, ne perçoivent pas exclusivement la rémunération de leur activité personnelle d'enseignant (RM Chantelat, n° 23641, JO, débats AN du 10 mars 1980, p. 945).
En l'espèce, la Cour administrative d'appel avait relevé que les leçons de danse de M. A avaient été délivrées au sein de son école de danse avec le concours de tiers prestataires pour les années 2014 et 2015.
Le Conseil d'État a validé cette analyse, confirmant que même les leçons dispensées personnellement par M. A... au sein de son école ne pouvaient être exonérées en raison du mode d'organisation de l'activité, c'est-à-dire le recours à des tiers prestataires. Le fait que les recettes aient été distinguées comptablement était sans incidence. Ce motif de la cour, fondé sur l'organisation de l'activité, était suffisant pour écarter l'exonération pour ces années.
TL,DR
Cette décision publiée au recueil Lebon est dans le droit fil de la doctrine BOFIP précitée.
Ainsi, elle souligne que le fait de recourir à des tiers, même pour des prestations complémentaires ou distinctes, peut contaminer l'ensemble de l'activité, y compris les cours donnés personnellement par l'enseignant, et faire perdre le bénéfice de l'exonération.