La juridiction administrative nous rappelle qu'une SCI louant nu un bien immobilier à des personnes physiques qui sous-louent ce bien garni de meubles ne peut être regardée comme exerçant une activité commerciale au sens de l'article 34 du CGI et, par suite, être assujettie à l'impôt sur les sociétés à raison des loyers procurés par la location de cet immeuble.
En application de l'article 206-2 du CGI, les sociétés civiles qui exercent une activité commerciale sont passibles de l'impôt sur les sociétés. En vertu d'une jurisprudence ancienne et constante, les revenus tirés de la location de locaux d'habitation meublés exercée à titre habituel relèvent de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des BIC au sens de l'article 34 du CGI, à la différence de ceux issus de la location nue qui relèvent de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus fonciers.
Le caractère habituel de l'activité résulte des circonstances de fait qu'il convient d'apprécier dans chaque cas particulier. Une location saisonnière est notamment regardée comme exercée à titre habituel dès lors qu'elle se renouvelle (CE arrêt du 28 décembre 2012 n° 347607, 3è et 8è s. -s, min, . c/ SCI Le Mas des Sources).
Par conséquent, une société civile, qui pratique de manière habituelle la location saisonnière des locaux garnis de meubles exerce une activité commerciale et se trouve donc assujettie de plein droit à l'impôt sur les sociétés (RM Mauger n° 15286, JO AN du 20 novembre 1989, p. 5081). Cette conséquence découle de la simple application des règles de droit commun, les sociétés civiles n'ayant pas vocation à développer des activités commerciales. Toutefois, la doctrine fiscale (BOI-IS-CHAMP-10-30-20120912 § 320 et 330) prévoit une tolérance : les sociétés civiles, qui exercent une activité commerciale accessoire, peuvent continuer à relever de l'impôt sur le revenu tant que le montant hors taxes de leurs recettes de nature commerciale n'excède pas 10 % du montant de leurs recettes totales hors taxes.
Rappel des faits :
La SCI F a fait l'objet d'un contrôle sur pièces à l'issue duquel l'administration a, d'une part, considéré que les recettes retirées de la location de la maison à usage d'habitation lui appartenant devaient être soumises à l'impôt sur les sociétés, compte tenu du caractère habituel de l'exploitation commerciale de ce bien, et, d'autre part, requalifié la cession faite le 10 juin 2008 d'un de ses biens immobiliers de plus-de-value de cession d'éléments d'actifs immobilisés. L'administration fiscale a estimé que cette société a loué, en meublé, la maison à usage d'habitation dont elle est propriétaire à Cavalaire-sur-Mer, au cours des années 2007, 2008 et 2009, chaque fois pour une durée d'un mois, par le biais d'annonces parues sur un site internet de locations immobilières. A l'issue de la procédure contradictoire, la société a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2008 et 2009. Le 13 octobre 2014, la SCI a présenté une réclamation préalable, rejetée par l'administration le 17 août 2018. Cette société relève appel du jugement du 23 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à ce qu'il prononce la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2008 et 2009.
La CAA de Marseille vient de faire droit à la demande de la SCI F.
Reprenant les faits de l'affaire la Cour précise qu'en fait, la SCI a donné en location l'immeuble à ses associés minoritaires qui ont garni le bien de meubles et sous-loué le dit bien.
Autrement dit, il existait deux baux : l'un entre le la SCI F et les locataires (Associés minoritares), dans le cadre d'une location nue, l'autre entre les locataire principaux et un sous-locataire, dans le cadre d'une sous-location meublée. La cour souligne :
A cet égard, la circonstance invoquée par l'administration selon laquelle la sous-location n'était pas prévue au bail, si elle a une incidence sur les relations entre la société propriétaire et ses locataires, est néanmoins sans influence sur la détermination de la personne ayant encaissé les sommes issues des locations de l'immeuble
Partant, pour la Cour, la SCI F était fondée à soutenir qu'elle ne pouvait être regardée comme exerçant une activité commerciale au sens de l'article 34 du CGI et, par suite, qu'elle n'était pas redevable de l'impôt sur les sociétés à raison des loyers procurés par la location nue de cet immeuble.
Cette décision va dans le sens de la RM Frassa de 2017 par laquelle le Gouvernement avait précisé, dans l'hypothèse où deux baux coexistent (l'un entre le propriétaire de l'immeuble et le locataire, dans le cadre d'une location nue, l'autre entre le locataire principal et un sous-locataire, dans le cadre d'une sous-location meublée) qu'ils relèvent de régimes fiscaux différents et, qu'à ce titre, les bénéfices qu'ils procurent sont à déclarer par chacun des bailleurs dans la catégorie d'imposition dont ils relèvent respectivement.
Ainsi, dès lors que le contrat de bail porte sur un immeuble nu, les loyers perçus par le propriétaire du bien sont à déclarer dans la catégorie des revenus fonciers, le fait que le bien fasse par ailleurs l'objet d'une sous-location en meublé par le locataire en titre étant sans incidence sur la catégorie de revenu dont relève le propriétaire. En revanche, le locataire principal qui, lui, donne en sous-location meublée le bien auprès d'une tierce personne, devra déclarer les revenus perçus dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (RM Frassa JO Sénat du 9 mars 2017, question n°23432)