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Mobilité internationale : quel traitement fiscal pour la clause de non-concurrence après le départ ?

La mobilité internationale des cadres dirigeants soulève régulièrement des questions quant à la territorialité de l'impôt sur le revenu, notamment s'agissant des sommes perçues après le transfert du domicile fiscal hors de France mais trouvant leur source dans un contrat de travail français. Dans ce contexte, le juge de l'impôt vient de rendre une décision en faveur du contribuable s'agissant du traitement fiscal de l'indemnité compensatrice de non-concurrence. Elle rappelle que la qualification de cette indemnité ne dépend pas des services passés, mais de l'obligation de "ne pas faire" respectée au moment du versement.

 

Pour memoire, en application de l’article 4 A du CGI, les personnes non domiciliées fiscalement en France ne sont imposables que sur leurs revenus de source française. L’article 164 B du même code définit ces revenus, incluant notamment ceux tirés d'activités professionnelles, salariées ou non, exercées en France. La difficulté d'interprétation réside souvent dans le rattachement temporel et géographique des indemnités de rupture : rémunèrent-elles le travail passé (effectué en France) ou une période postérieure au départ ?

 

Si la jurisprudence est établie pour les indemnités de licenciement ou de départ à la retraite, le sort de l'indemnité de non-concurrence versée à un expatrié reste sujet à débats.

 

Rappel des faits :

Un salarié de la société G France a signé une rupture conventionnelle le 4 décembre 2014. Ce protocole prévoyait une interdiction de concurrence d'une durée de douze mois couvrant plusieurs pays, dont la France et le Maroc, en contrepartie d'une indemnité mensuelle. Le salarié a transféré son domicile fiscal au Maroc le 4 janvier 2015, quelques jours avant la fin effective de son contrat de travail fixée au 13 janvier 2015.

L'administration fiscale française a entendu imposer les versements mensuels perçus en 2015, soit une somme globale de 118 153 €, considérant ces sommes comme des traitements et salaires de source française.

 

Après un rejet de sa réclamation et une décision défavorable du TA de Paris le 31 janvier 2024, le contribuable a fait appel, soutenant que le fait générateur de l'imposition (le respect de la clause) était localisé au Maroc, son lieu de résidence.

 

La Cour administrative d’appel de Paris vient d'infirmer le jugement de première instance.

 

Les juges du fond rappellent, dans un considérant de principe, que si l'indemnité de non-concurrence a une nature salariale, elle ne constitue pas pour autant la rémunération d'activités exercées avant la rupture. Elle est la contrepartie spécifique de l'obligation de ne pas travailler pour un concurrent, obligation qui ne prend naissance qu'après la rupture du contrat.

Si l'indemnité allouée par une société à un salarié à la suite de la rupture de son contrat de travail, sous la condition qu'il ne contrevienne pas à l'engagement de non-concurrence qu'il a souscrit, a une nature salariale, elle ne constitue toutefois pas, en principe, une rémunération reçue au titre des activités exercées avant la cessation de l'emploi salarié, mais un revenu ayant pour contrepartie l'obligation de ne pas travailler pour un concurrent de l'ancien employeur, pendant un délai déterminé, postérieurement à la rupture du contrat de travail.

 

Dès lors, la Cour constate qu'au moment où l'indemnité a été versée, le requérant était fiscalement domicilié au Maroc. C'est donc depuis ce territoire qu'il exécutait son obligation de "ne pas faire". Peu importe que l'interdiction de concurrence s'étendît au territoire français ou que le montant de l'indemnité fût calculé sur la base des salaires antérieurs versés en France.

 

La Cour juge que cette somme ne peut être regardée comme un revenu tiré d'une activité exercée en France au sens de l'article 164 B du CGI.

Le ministre ne soutient pas que cette indemnité a en réalité été accordée à l'intéressé en rémunération d'activités exercées avant la cessation de son emploi. Elle doit ainsi être regardée comme ayant été versée en contrepartie de l'engagement pris de ne pas concurrencer son ancien employeur au cours d'une période de douze mois à compter du 13 janvier 2015 dans la zone géographique mentionnée ci-dessus et en exécution du protocole de rupture conventionnelle du contrat de travail du 4 décembre 2014. Cette somme, qui a été versée à M. A... postérieurement au transfert de son domicile fiscal au Maroc, ne peut dès lors être regardée comme un revenu tiré d'une activité exercée en France et, par suite, comme un revenu de source française, au sens des dispositions précitées de l'article 164 B du code général des impôts. La circonstance qu'elle aurait été imposable en France dans la catégorie des traitements et salaires, eu égard à la nature des revenus antérieurement perçus par l'intéressé en contrepartie de son activité salariée pour la SA Goodyear Dunlop Tires France, est dépourvue de toute incidence sur la détermination du lieu d'exercice de l'activité rémunérée par le versement de cette indemnité. M. A... est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le service l'a imposé à l'impôt sur le revenu à raison de cette somme.

 

Cette décision est particulièrement favorable aux cadres impatriés ou expatriés quittant la France. Elle confirme l'autonomie de l'indemnité de non-concurrence par rapport au contrat de travail initial : bien que stipulée dans le contrat français, elle rémunère une inactivité actuelle et non un travail passé.

 

Il en résulte que si le bénéficiaire réside à l'étranger pendant la période d'interdiction, l'indemnité n'est pas imposable en France, faute de rattachement territorial à une activité exercée dans l'Hexagone.

Publié le lundi 22 décembre 2025 par La rédaction

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