Accueil > Transmission d’entreprises > Plus-values mobilières > Plus-value mobilière : l'indemnité transactionnelle forfaitaire ne vaut pas exécution de la clause garantie de passif
Plus-values mobilières

Plus-value mobilière : l'indemnité transactionnelle forfaitaire ne vaut pas exécution de la clause garantie de passif

Le juge de l'impôt nous rappelle que le mécanisme correcteur de l'impôt sur la plus-value, prévu en cas de mise en jeu d'une clause de garantie d'actif et de passif, ne peut s'appliquer lorsque le versement résulte d'une transaction globale, forfaitaire et dont les modalités s'écartent des stipulations de la clause de garantie initiale.

 

 

Pour mémoire, l'article 150-0 D-14 du CGI permet au cédant de titres, qui est amené à reverser une partie du prix de cession à l'acquéreur en exécution d'une clause de garantie de passif ou d'actif net, de demander la réduction de l'imposition initiale sur la plus-value.

14. Par voie de réclamation présentée dans le délai prévu au livre des procédures fiscales en matière d'impôt sur le revenu, le prix de cession des titres ou des droits retenu pour la détermination des gains nets mentionnés au 1 du I de l'article 150-0 A est diminué du montant du versement effectué par le cédant en exécution de la clause du contrat de cession par laquelle le cédant s'engage à reverser au cessionnaire tout ou partie du prix de cession en cas de révélation, dans les comptes de la société dont les titres sont l'objet du contrat, d'une dette ayant son origine antérieurement à la cession ou d'une surestimation de valeurs d'actif figurant au bilan de cette même société à la date de la cession.

Le montant des sommes reçues en exécution d'une telle clause de garantie de passif ou d'actif net diminue le prix d'acquisition des valeurs mobilières ou des droits sociaux à retenir par le cessionnaire pour la détermination du gain net de cession des titres concernés.

Le prix de vente définitif s'avérant inférieur au prix initial du fait de la survenance d'un risque garanti, l'assiette de l'impôt doit être ajustée à la baisse.

 

Rappel des faits :

Monsieur A a cédé les titres de la SAS Le A en janvier 2020, déclarant une plus-value significative. Une convention de garantie d'actif et de passif (GAP) a été signée concomitamment. Deux ans plus tard, en janvier 2022, les parties signaient un protocole transactionnel prévoyant une réduction du prix de vente de 400 000 €. M.A a alors sollicité la restitution partielle de l'impôt sur la plus-value acquitté au titre de 2020.

 

L'administration fiscale, suivie par le Tribunal administratif de Rennes, a rejeté cette demande, estimant que le versement ne procédait pas de l'exécution de la GAP.

 

M. A a fait appel de la décision.

 

La CAA de Nantes vient de rejeter la demande de restitution.

 

Les juges nantais rappellent que la réduction de l’imposition initiale est subordonnée à une condition sine qua non : le reversement doit intervenir « en exécution » de la clause de garantie figurant au contrat.

 

Or, la Cour a relevé une rupture du lien de causalité entre la clause de garantie de passif initiale et le versement de 400 000 €. Les juges ont souligneé que le protocole transactionnel de 2022, bien que faisant référence à la convention de 2020, avait un objet distinct. Il visait à régler un différend global par le versement d'une indemnité « forfaitaire ». 

 

Pour disqualifier le lien avec la clause de garantie de passif, la Cour a fait valoir trois contradictions entre la convention initiale et la transaction ultérieure :

  • Tout d'abord, le mode de paiement. La clause de garantie de passif excluait expressément un règlement financier par compensation. Or, le protocole transactionnel a justement prévu un règlement par compensation avec le complément de prix restant dû.
  • Puis, le montant de la franchise. La clause de garantie de passif prévoyait une franchise (seuil de déclenchement non indemnisable) de 400 000 €. Or, le montant transactionnel a été fixé exactement à 400 000 €. Le juge en déduit une incohérence si la clause de garantie de passif avait été strictement appliquée, aucune indemnité n'aurait dû être versée puisque le montant du préjudice allégué n'excédait pas la franchise. Pour la Cour, le versement de cette somme prouve que le paiement trouvait sa cause ailleurs que dans la stricte obligation juridique née de la clause de garantie de passif.
  • Enfin, le défaut de justification du passif. Le contribuable est resté en défaut de préciser quelle surévaluation d'actif ou quel passif  précis il entendait couvrir par ce versement. En l'absence de cette démonstration comptable et juridique, le caractère indemnitaire au sens du 14 de l'article 150-0 D ne pouvait être retenu.

5. M. C... A... soutient que la réduction du prix de vente des actions cédées et le protocole transactionnel du 18 janvier 2022 sont des actes pris en application de la convention de garantie d'actif et de passif signée le 7 juin 2020, en même temps que l'acte de cession.

Toutefois, cette convention n'a pas été enregistrée et il ressort des termes de ce protocole que son objet est le règlement d'un différend entre les parties, après négociations (article 1er) et que celui-ci porte sur une indemnité transactionnelle globale et forfaitaire de 400 000 euros (article 2).

Quand bien même le protocole du 18 janvier 2022 fait référence à la convention de garantie d'actif et de passif signée le 7 juin 2020 et que celle-ci prévoit à son article 4.5 diverses modalités de règlement des litiges la concernant, il résulte de l'instruction qu'il porte règlement de litiges qui ne sont pas limités à ceux exposés dans cette convention et n'est pas un simple protocole de mise en œuvre de celle-ci. D'ailleurs, l'article 3.5.5 de la convention de garantie d'actif et de passif excluait un règlement financier par compensation alors que l'article 2 du protocole transactionnel prévoit un tel mode de règlement et l'article 3.4.1 de la convention de garantie d'actif et de passif, excluait que ledit règlement porte sur une somme ne dépassant pas le montant de 400 000 euros correspondant à celui de la franchise prévue dans la convention de garantie de passif et d'actif, mais non évoquée dans le protocole.

En outre, si M. A... soutient qu'il s'est borné à mettre en application la convention de garantie d'actif et de passif signée le 7 juin 2020, il ne précise pas, ni ne justifie, quelle surévaluation d'actif ou quel passif il aurait entendu couvrir.

Dans ces conditions, le protocole transactionnel du 18 janvier 2022 doit être regardé comme ayant un objet distinct de la convention de garantie d'actif et de passif signée le 7 juin 2020, qui ne tend pas exclusivement à compenser une dette ayant son origine antérieurement à la cession ou une surestimation de valeurs d'actif figurant à la date de la cession au bilan de la société dont les actions sont cédées. Par suite, sans qu'il soit besoin de remettre en cause la date ou la validité de cette convention qui n'a au demeurant été dénoncée par aucune partie, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'il pouvait bénéficier des dispositions de l'article 14 de l'article 150-0 D du code général des impôts.

Publié le mardi 30 décembre 2025 par La rédaction

5 min de lecture

Avancement de lecture

0%

Partages :