Le Conseil d’Etat vient de juger, dans le cadre de la cession de titres démembrés, que le cédant nu-propriétaire était en droit de se prévaloir des frais acquittés par l’usufruitier pour l’acquisition de l’usufruit, lorsqu’il calcule la plus-value imposable à raison de laquelle il est seul susceptible d’être taxé.
Rappel des faits :
Par acte de donation du 22 juin 2007 , Messieurs CA et DA ont acquis de leur père la nue-propriété de 275.000 titres de la SAS FD.
L’usufruit de ces titres a été quant à lui donné à leur mère , Mme B.A.
Le 26 septembre 2007 , MM. A ont procédé à la cession des titres en cause, en pleine propriété, au profit de la société F , après s’être engagés à remployer les fonds issus de la cession pour l’acquisition d’un autre bien, sur lequel l’usufruit détenu par leur mère pourrait se reporter.
A la suite de cette cession, MM. A… ont chacun déduit de la moins-value enregistrée dans leurs déclarations de revenus respectives au titre de l’année 2007, les droits acquittés dans le cadre de la donation effectuée par leur père .
Dans le calcul de ces droits, ils ont pris en compte non seulement les frais qu’ils avaient eux-mêmes acquittés pour recevoir la nue-propriété des titres, mais également les droits que leur mère avait acquittés pour recevoir leur usufruit.
Contentieux
L’administration a remis en cause la déduction des frais payés par Mme A… en sa qualité d’usufruitière des titres en cause, procédé à un nouveau calcul du résultat de l’opération de cession aboutissant à l’annulation de la moins-value déclarée en 2007 et de la moins-value reportable en 2008 et notifié, en conséquence, aux requérants un rehaussement d’impôt sur leurs revenus au titre de ces deux années.
Par deux jugements du 25 février 2014, le TA de Bordeaux a rejeté leurs demandes.
La CAA de Bordeaux a rejeté la demande des requérants visant à annuler ces jugements du TA de Bordeaux ( CAA de Bordeaux du 14 juin 2016 N° 14BX01301no et 14BX01302 )
Pour la juridiction d’Appel, seuls les frais et taxes personnellement acquittés par le redevable de l’impôt en sa qualité de cédant des titres viennent majorer leur valeur d’acquisition. Autrement dit les nus-propriétaires ne peuvent tenir compte que des droits de donation qu’ils ont supportés lors de l’acquisition de la nue-propriété des titres.
Le Conseil d’Etat vient par décision en date du 11 mai 2017 d’annuler l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux du 14 juin 2016.
La haute juridiction administrative estime que dans la situation soumise à sa censure le cédant nu-propriétaire est en droit de se prévaloir des frais acquittés par l’usufruitier pour l’acquisition de l’usufruit, lorsqu’il calcule la plus-value imposable à raison de laquelle il est seul susceptible d’être taxé.
«En principe, le prix effectif d’acquisition mentionné à l’article 150-0 D cité ci-dessus ne comprend que les frais et taxes acquittés par le cédant à l’occasion de l’acquisition du bien cédé.
Toutefois, dans l’hypothèse, d’une part, où le cédant est le nu-propriétaire et, d’autre part, lorsque le prix de cession est remployé pour l’acquisition d’un autre bien sur lequel le démembrement est reporté, le prix effectif d’acquisition comprend l’ensemble des frais et taxes qui ont grevé l’acquisition, tant de la nue-propriété que de l’usufruit, alors même que ces frais ont été acquittés par l’usufruitier.
Dans cette hypothèse , le cédant est en droit de se prévaloir des frais acquittés par l’usufruitier pour l’acquisition de l’usufruit, lorsqu’il calcule la plus-value imposable à raison de laquelle il est seul susceptible d’être taxé.
Dès lors, les requérants sont fondés à soutenir que la cour a commis une erreur de droit en jugeant que les frais qu’a personnellement supportés Mme A… au titre de l’usufruit de ces titres n’étaient pas déductibles de leur valeur d’acquisition pour le calcul de la plus-value enregistrée à l’occasion de la cession en pleine propriété des titres en cause, imposable entre les mains de chacun des cédants de la nue-propriété, MM. C… et D… A….»