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Contrôle et contentieux

Abandons de créances et gestion normale : il faut une contrepartie commerciale proportionnée et équivalente

La juridiction administrative vient de rappeler qu’une société qui ne peut démontrer l’existence d’une contrepartie commerciale proportionnée et équivalente aux abandons de créances accordées à une autre société doit être considérée comme ayant réalisé un acte anormal de gestion.

 

En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du CGI, le bénéfice imposable à l’impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l’entreprise, à l’exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale.

 

Les abandons de créances accordés par une entreprise au profit d’un tiers ne relèvent pas, en règle générale, d’une gestion commerciale normale, sauf s’il apparaît qu’en consentant de tels avantages, l’entreprise a agi dans son propre intérêt.

 

Il appartient à l’administration d’apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer qu’un abandon de créance consenti par une entreprise constitue un acte anormal de gestion.

Toutefois, elle est réputée apporter cette preuve dès lors que l’entreprise n’est pas en mesure de justifier qu’elle a bénéficié en retour de contreparties. A cet égard, le caractère normal des aides à caractère commercial consenties entre sociétés appartenant au même groupe s’apprécie en principe au regard du seul intérêt propre de la société qui consent l’avantage, selon les mêmes règles qu’en l’absence de tout lien capitalistique.

Rappel des faits :

La société UTE détient 99,7 % du capital de sa filiale, la SA M. Cette dernière exerce une activité de travail à façon de pelotonnage de laine et d’expédition de marchandises pour le compte de la société UTE qui est son unique cliente.

Par deux conventions assorties de clause de retour à meilleure fortune, la SA M a consenti deux abandons de créances au profit de sa mère à hauteur de 450 000 € le 27 avril 2012 et de 200 000 € le 29 avril 2013. Aux termes des procès-verbaux du conseil d’administration de la SA M, ces abandons de créances ont été consentis à titre commercial.

L’administration a remis en cause, sur le fondement de l’acte anormal de gestion, la déduction par la SA M des sommes correspondant aux deux abandons de créances consentis à la société UTE. Partant la SA M a été assujettie à un complément d’impôt sur les sociétés.

L’administration a relevé au cours des opérations de contrôle, d’une part, que le montant des abandons de créance représentait respectivement 130 % et 63 % du chiffre d’affaires réalisé par la SA M au titre des exercices clos en 2012 et 2013 et, d’autre part, que le résultat d’exploitation était structurellement déficitaire dès lors que le chiffre d’affaires réalisé avec la société UTE, son unique client, ne couvrait pas les charges d’exploitation.

Par jugement du 11 juin 2020 le TA de Lille a rejeté la demande de la SA M tendant à l’annulation de ces impositions.

Cette dernière à fait appel de la décision.

 

La Cour vient de confirmer que ces abandons de créances ne relevaient pas d’une gestion commerciale normale

 

La SA M fait valoir :

  • qu’au moment où les abandons de créance ont été consentis la société UTE rencontrait de graves difficultés financières s’accompagnant d’une dégradation de ses capitaux propres compromettant sa pérennité, une procédure d’alerte ayant été initiée par son commissaire aux comptes.

  • que sans les abandons de créances qu’elle lui a consentis, la situation nette de la société UTE, qui rencontrait également des difficultés de financement, était telle que la survie même de cette société était compromise.

De son côté, pour caractériser l’acte anormal de gestion, la Cour fait valoir :

  • les abandons de créances représentent 97,55 % du chiffre d’affaires réalisés par la SA M sur les deux exercices qui s’élève à 666 361 €.

  • De surcroit, le chiffre d’affaires réalisé avec son unique client, la société UTE, ne permet pas de couvrir les charges d’exploitation, générant ainsi un déficit d’exploitation structurel.

  • la SA M a été obligée de recourir à un plan social au cours de la période vérifiée

  • la SA M a déjà consenti par le passé d’importants abandons de créance au bénéfice de la société UTE, à savoir 545 000 € au titre de l’exercice clos en 2011, 490 000 € au titre de l’exercice clos en 2010 et 700 000 € au titre de l’exercice clos en 2009. Or ces abandons de créances n’ont pas permis de développer ni le chiffre d’affaires de la SA M ni sa rentabilité.

  • le chiffre d’affaires de la société bénéficiaire de l’abandon de créances (UTE) ainsi que son résultat d’exploitation ont progressé plus favorablement que celui de la SA M entre l’exercice clos en 2012 et l’exercice clos en 2015.

  • La société UTE n’a fait l’objet d’aucune procédure judiciaire et n’a réalisé aucun emprunt auprès d’établissement financier.

  • les dettes financières da la sociéte UTE ne sont constituées que par la situation de son compte-courant chez la SA M.

Pour la Cour, il ressort de ce faisceau d’indices que la SA M ne peut démontrer l’existence d’une contrepartie commerciale proportionnée et équivalente aux abandons de créances accordées à sa société-mère, la société UTE

 

La juridiction d’appel a donc jugé que l’administration avait, à bon droit, regardé ces abandons de créances comme ne relevant pas d’une gestion commerciale normale.

Publié le vendredi 3 juin 2022 par La rédaction

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