Le droit à construire ne constitue pas une immobilisation amortissable

19/02/2011 Par La rédaction
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Le droit à construire n’a pas fait l’objet d’une définition législative : néanmoins, il recouvre, en pratique la faculté de réaliser une construction dont la superficie, le volume et la densité sont fonction des règles d’urbanisme en vigueur . La question de savoir si un tel droit est susceptible de constituer une immobilisation amortissable n’a pas nourri un important contentieux .

Néanmoins, une solution inédite et d’importance, vient d’être rendue par le Conseil d’Etat en la matière.

Le Conseil d’Etat (CE, 9è et 10è s-s, 23 décembre 2010, n°308206) vient en effet d’infirmer la position des juges de la Cour Administrative d’Appel de Nancy (CAA Nancy, 4ème ch., 7 juin 2007, n°04NC00211), qui avaient considéré qu’un droit à construire constituait une immobilisation susceptible d’être amortie dans les mêmes conditions que l’immeuble auquel il se rattachait , à compter de l’achèvement de la construction, tout en précisant que tant que le titulaire du droit n’avait pas exercé ses prérogatives, il ne détenait qu’un droit mobilier susceptible de cession, non amortissable.

Les membres du Conseil d’Etat, devant qui la présente affaire a été déférée, ont eu l’occasion de clarifier le débat et de juger, qu’il résulte des articles 39 du Code Général des Impôts et de l’article 38 sexies de l’annexe III au même code, qu' un élément d’actif incorporel identifiable ne peut donner lieu à une dotation à un compte d’amortissement que s’il est normalement prévisible, lors de sa création ou de son acquisition par l’entreprise, que ses effets bénéfiques sur l’exploitation prendront fin à une date déterminée.

Au cas particulier , les juges ont considéré que les effets du droit à construire attaché ou non à un terrain et acquis dans le cadre d’un bail à construction, ainsi que les effets des droits à construire acquis auprès d’un aménageur dans le cadre d’une opération d’aménagement concertée, ne prennent pas fin au fur et à mesure de la réalisation des constructions qu’ils rendent possible, dans la mesure où ces droits subsistent même en cas de démolition de ces constructions.

Constatant la pérennité de ces droits à construire, lesquels ne disparaissent pas du fait de leur utilisation et ne se déprécient pas avec le temps, la solution s’imposait : les droits à construire ne peuvent faire l’objet d’une dotation à un compte d’amortissement.

Cette solution peut apparaître comme sévère car économiquement, l’acquisition des droits à construire fait partie du prix de revient de la construction et on aurait pu espérer une solution identique à celle prévalant lorsqu’un bien est acquis puis fait l’objet d’une démolition en vue d’une nouvelle construction : dans ce cas, le prix d’acquisition du bien, s’il n’est pas déduit immédiatement lors de sa démolition, est considéré comme faisant partie du coût de revient du nouveau bien et est donc amorti sur la durée de la nouvelle construction.

 

Hervé Quéré et Quentin Fernet : Avocats, Baker & McKenzie SCP