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Parahôtellerie et TVA : de la difficile preuve que les prestations proposées sont comparables à celles proposées dans le secteur hôtelier

Quelques jours après que le Conseil d'Etat ait sonné le glas du régime de TVA des « 3 prestations sur 4 » dans le cadre de la parahôtellerie, privilégiant une appréciation au cas par cas, la juridiction administrative vient de rendre une nouvelle décision, illustrant la difficulté à démontrer que les prestations proposées à ses clients sont comparables à celles proposées dans le secteur hôtelier et, apportant des précisions utiles quant aux prestations de réception de clientèle et de nettoyage des locaux.

 

Il résulte des dispositions de l’article 261 D-4°-b du CGI  que pour être soumises à la TVA, les prestations offertes doivent l’être dans des conditions plaçant le loueur d’un établissement d’hébergement, qui fait l’objet d’une exploitation professionnelle, en situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières.

 

Les critères définis par ces dispositions législatives n’exigent pas que les prestations para-hôtelières soient effectivement rendues mais seulement que le loueur en meublé dispose des moyens nécessaires pour répondre aux éventuelles demandes (Voir en ce sens : CAA de Marseille du 22 juillet 2020, n°18MA5140) .

 

Pour apprécier si des prestations para-hôtelières sont proposées dans des conditions plaçant le loueur en situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières, les conditions de qualité et de prix caractérisant ces prestations peuvent, notamment, être prises en compte. La circonstance que le loueur d’un logement meublé délègue à un tiers la fourniture de ces prestations ne fait pas obstacle à ce qu’il soit soumis à la TVA en application de ces dispositions lorsque la prestation est proposée dans des conditions similaires à celles proposées dans le secteur hôtelier et que l’exploitant demeure seul responsable de cette prestation vis-à-vis de ses clients (Voir en ce sens : CAA Lyon du 2 février 2023, n°21LY01336

 

Rappel des faits :

La société L propose à la location une ancienne ferme rénovée de 480 m² aménagée en gîte rural d’une capacité de 26 personnes comprenant notamment sept chambres, une salle à manger, une cuisine, une piscine ainsi qu’une buanderie. 

 

La société L qui a déclaré exercer une activité d’hébergement touristique à caractère para-hôtelier, a fait l’objet d’une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 octobre 2014.

 

A l’issue des opérations de contrôle, le service a remis en cause la TVA déduite par la société sur des acquisitions de biens et services ainsi que sur des immobilisations au motif qu’elle ne pouvait être regardée comme assujettie à la taxe, au sens de l’article 261 D-4°-b du CGI au titre des prestations réalisées à destination de ses clients.

 

L’administration, qui ne conteste pas que la société assure la fourniture de linge de maison à ses clients, fait toutefois valoir que cette dernière ne fournit pas les prestations de réception de la clientèle, de petit déjeuner et de nettoyage régulier des locaux dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d’hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle.

 

La société L a demandé au TA de Poitiers de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de TVA mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 octobre 2014. Par un jugement du 16 décembre 2020, le TA de Poitiers a rejeté sa demande.

 

La société L a fait appel du jugement.

 

La Cour Administrative d'Appel de Bordeaux vient de rejeter la requête de la société L.

 

Si la société L reconnait qu’elle ne propose pas à ses locataires de prestation de petit déjeuner en se bornant à leur fournir les coordonnées d’un traiteur qui assure cette prestation sous sa propre responsabilité, elle estime qu'elle assure les trois autres prestations. Deux de ces prestations sont contestées par l'administration fiscale : la réception de la clientèle et le nettoyage des locaux.

 

Réception de la clientèle

La société L soutient qu’elle était en mesure, au titre de la période vérifiée, d’assurer une prestation de réception de la clientèle.

 

Toutefois la Cour fait valoir que

  • la société L ne dispose d’aucun local affecté à l’accueil ou à la réception de sa clientèle ;
  • la circonstance que le gérant de la société ou, en son absence, son épouse ou son frère peuvent, sur rendez-vous, remettre aux clients les clés du logement à leur arrivée ne s’apparente pas à une prestation de réception de la clientèle fournies dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d’hébergement à caractère hôtelier ;
  • le fait que la société dispose d’une ligne téléphonique fixe et mobile ainsi que d’une adresse de messagerie électronique ne permet pas de considérer qu’elle dispose d’un accueil de type électronique.

 

Nettoyage réguler des locaux

La société L fait valoir qu’elle assure, par l’intermédiaire de son mandataire, la société APS, des prestations de ménage comparables à celles offertes par les établissements d’hébergement à caractère hôtelier.

 

Toutefois la Cour fait valoir  :

  • que si les contrats conclus entre la société L, ses clients et le prestataire APS révèlent que le prix du séjour comprend le ménage à l’entrée et à la sortie des locataires, ils précisent également que les prestations de ménage en cours de séjour ne sont, en revanche, assurées de manière optionnelle par la société APS, au tarif horaire de 25 €, qu’à la condition d’avoir été sollicitées 72 H au moins avant la date de la prestation et sous réserve de personnel disponible.

Dans ces conditions, alors qu’à l’analyse du panel de contrats fournis par la requérante, la durée de séjour de ses clients s’échelonne généralement de deux à sept jours, ce délai minimal de trois jours nécessaire, en cours de séjour, entre la date de sollicitation de la prestation de ménage par le client et la date de sa réalisation, ne permet pas de regarder la société L comme disposant des moyens nécessaires pour offrir à sa clientèle un service de nettoyage selon une périodicité régulière, dans des conditions similaires aux prestations de même type proposées dans le secteur hôtelier. 

 

Il résulte de ce qui précède que la société L n’assure qu’une seule des quatre prestations mentionnées au b. du 4° de l’article 261 D du code général des impôts et n’est dès lors pas fondée à soutenir que l’exonération de TVA prévue par ces mêmes dispositions ne lui serait pas applicable. Par suite, c’est à bon droit que l’administration fiscale a remis en cause la déductibilité des montants de TVA supportés par la société L pour l’exercice de son activité de location.

Publié le lundi 24 juillet 2023 par La rédaction

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