L’activation de l’article 50 du traité de Lisbonne par le gouvernement de Theresa May, le 29 mars 2017, a officiellement initié la procédure de retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne.
Couplé avec le durcissement du régime fiscal anglais dit des « non-domiciled » , cet évènement amène de nombreux étrangers résidant au Royaume-Uni à étudier les destinations alternatives qui s’offrent à eux.
Or, celles-ci se font de plus en plus nombreuses en Europe du fait de la concurrence que se livrent les État pour attirer dirigeants et grandes fortunes. La France et l’Italie ont en particulier amélioré très récemment leur attractivité fiscale, en aménageant des régimes sur mesure.
Le régime anglais, dit des « non-domiciled » , avait facilité l’arrivée massive au Royaume-Uni de grandes fortunes et dirigeants, français et étrangers, en quête d’une fiscalité plus favorable. Ce statut spécifique permet en effet aux personnes s’installant au Royaume-Uni de n’y être imposées que sur leurs seuls revenus de source locale et ceux qu’ils rapatrient de l’étranger.
La fortune et les revenus non rapatriés générés en dehors du Royaume-Uni ne font, en revanche, l’objet d’aucune imposition au Royaume-Uni. Cette absence d’imposition s’étendait jusqu’à présent sur une durée de 20 ans mais laissait place à une imposition sous forme de forfait, applicable à l’issue de la 7ème année de résidence au Royaume-Uni, dont le montant s’élevait de 30 000 £ à 90 000 £ en fonction de la durée de résidence.
Ce régime a toutefois été durci récemment. En effet, à compter du 6 avril 2017, le régime ne s’applique plus que pour une durée de résidence de 15 ans au Royaume-Uni, y compris pour les citoyens déjà résidents depuis plus de 15 ans à cette date.
Dans ce contexte, d’autres États européens tentent d’attirer les dirigeants et personnes fortunées à l’aide de régimes fiscaux incitatifs.
La Suisse propose ainsi depuis longtemps, dans certains cantons, un mécanisme de forfait fiscal , qui a notamment favorisé l’implantation d’artistes et de sportifs. L’Espagne a, de son côté , mis en place de longue date également un régime d’impatriés dit « Beckham » favorisant l’installation de cadres dirigeants en offrant un taux d’imposition de 24% sur les revenus d’activité jusqu’à 600 000 € de revenus. Enfin, le Portugal attire les retraités étrangers, notamment français, à l’aide d’une fiscalité très attrayante depuis 2009 leur offrant un statut fiscal de résident non habituel, qui permet notamment de bénéficier d’une exonération sur les revenus de source étrangère tels que les pensions de retraite.
L’Italie a, de son côté, très récemment décidé de saisir l’opportunité offerte par le Brexit pour renforcer son attractivité fiscale vis-à-vis des grandes fortunes étrangères dans le cadre de sa loi de Finances 2017, en instaurant un régime visant explicitement à concurrencer le régime britannique des « non-domiciled ».
Le 8 mars 2017, le gouvernement italien a précisé les conditions d’application de ce nouveau régime. Les personnes transférant leur résidence fiscale en Italie pourront bénéficier, pour leurs revenus de source étrangère et pour une durée maximale de 15 ans, d’un impôt sur le revenu forfaitaire limité à 100 000 € par an (ce seuil étant augmenté de 25 000 € par personne supplémentaire du foyer fiscal s’installant également en Italie) à la double condition d’être considérées comme résidant fiscalement en Italie, en y passant par exemple plus de 183 jours par an, et d’obtenir l’aval de l’administration fiscale italienne après avoir demandé à bénéficier de ce régime. Les gains de cession de participations substantielles dans des sociétés étrangères réalisés dans les 5 premières années d’application du régime sont néanmoins exclus. Les futurs résidents italiens devront lever l’option avant le 30 septembre 2018 pour en bénéficier en 2017, étant précisé que l’option est révocable.
Outre ce forfait fiscal, l’Italie n’appliquera aucun droit de donation et de succession sur les biens étrangers transmis. Ce régime fait donc de l’Italie un pays potentiellement attractif pour les personnes bénéficiant de hauts revenus de source étrangère et devrait attirer prioritairement les bénéficiaires de revenus du patrimoine.
La France entend également rapatrier les déçus du Brexit. Même s’il reste moins facilement lisible qu’un strict régime de « non-domiciled », le régime fiscal des impatriés visé à l’article 155 B du Code général des impôts a été remis à jour fin 2016 afin de le rendre plus attractif. Ce régime, qui reste parfois peu connu à l’étranger, constitue l’une des dernières niches fiscales d’envergure disponible en France.
Le régime des impatriés français permet en effet aux salariés ou dirigeants recrutés de l’étranger ou détachés en France d’exonérer d’impôt sur le revenu en France pendant une période de 8 ans désormais jusqu’à 50% des revenus d’activité, sous la forme d’une exonération applicable aux éléments de rémunération pouvant être rattachés à leur impatriation et à ceux résultant d’activités restant exercées à l’étranger. Le régime prévoit en outre une exonération d’impôt sur le revenu à hauteur de 50% des revenus de capitaux mobiliers et des plus-values de cession de titres de source étrangère. L’impôt sur la fortune est par ailleurs limité pendant 5 ans aux seuls biens français.
Bien utilisé, ce régime est susceptible de faire de la France un pays potentiellement attractif pour les cadres et dirigeants d’envergure internationale bénéficiant d’importants revenus d’activité.
La situation de chaque candidat au départ du Royaume-Uni étant par nature différente, une étude approfondie et individualisée des implications fiscales d’un changement de résidence est en pratique nécessaire. Naturellement, le dynamisme économique, le coût de la vie et les services à disposition en matière notamment d’éducation et de santé, et les perspectives d’évolution au regard des échéances électorales doivent également être évalués avec soin dans ce choix.