L’administration fiscale vient de rendre public trois nouveaux avis rendus par le comité de l’abus de droit fiscal lors de la séance du du 1er février 2018 (CADF/AC n° 1/2018).
La première affaire (Affaire n° 2017-34 concernant M. P) aborde un cas remise en cause du bénéfice de report d’imposition prévu par l’article 150-0 B ter du code CGI.
La seconde affaire (Affaire n° 2017-30 concernant M. et Mme K) concerne une procédure d’abus de droit fiscal mise en oeuvre afin de réintégrer dans le patrimoine de contribuables taxable au titre de l’ISF le montant des créances de prêt en présence d’un Trust établi au Delaware.
La troisième affaire (Affaire n° 2017-31 concernant M. et Mme S) concerne des opérations de donation en cascade destinées à échapper au tarif de 60 % des droits de donation entre personnes non parentes.
M. et Mme S, sont de nationalité américaine et résident aux Etats-Unis. M. S a un fils d’un précédent mariage et Mme S a de son côté trois enfants. M. et Mme S sont, à hauteur de 42 % des titres chacun, associés de la SCI A propriétaire d’un bien immobilier situé en France. Leurs enfants respectifs possèdent chacun 4 % du capital de la SCI. Ce capital, composé de 7 350 parts, est ainsi réparti entre M. et Mme S, à hauteur de 3 087 parts chacun, et les quatre enfants, à hauteur de 294 parts chacun.
Le 26 décembre 2012, M. S a effectué une donation de 1 543 parts au profit de son épouse, qui détient alors 4630 parts tandis que son époux n’en possède plus, après cette opération, que 1 544. Mme S effectue immédiatement après cette donation et le même jour une donation de 1 543 parts à chacun de ses trois enfants. M. S fait par ailleurs donation le même jour à son propre fils de 1 543 parts de la SCI. A l’issue de ces donations, M. et Mme S détiennent chacun une part de la SCI et chacun des quatre enfants possède 1 837 parts.
Considérant que les deux donations en cascade de M. S à son épouse puis de celle-ci à ses propres enfants révélaient , dans les circonstances de l’espèce, une intention libérale de M. S à l’égard de ses beaux-enfants et que l’étape préalable de la donation à son épouse n*e poursuivait d’autre but que d’échapper au tarif de 60 %* des droits de donation entre personnes non parentes, prévu à l’article 777 du code général des impôts, qui aurait été normalement applicable en cas de donation directe des titres, l’administration a mis en œuvre la procédure de l’abus de droit fiscal prévue à l’article L. 64 du livre des procédures fiscales pour taxer à ce taux la transmission des 1 543 parts de la SCI regardée comme réalisée entre M. S et ses beaux-enfants.
Le Comité relève la concomitance des deux actes de donation de M. S à son épouse puis de celle- ci à ses propres enfants.
Les actes de donation du 26 décembre 2012 traduisent la volonté des époux S de transmettre l’ensemble des parts sociales de la SCI A à leurs enfants respectifs afin que ceux-ci en deviennent propriétaires du capital à parts égales.
Eu égard à la répartition du capital de la SCI avant les donations en cause, un tel projet ne pouvait aboutir, afin de garantir le respect de cet objectif de stricte égalité entre les quatre enfants, sans que M. S ne transfère, directement ou indirectement, aux enfants de son épouse une partie de ses titres de la SCI.
Le Comité estime à cet égard que les deux actes de donation concrétisent une seule et même intention libérale de M. S à l’égard des enfants de son épouse et que cette dernière ne tient dans ces actes que le rôle de personne interposée en y usurpant les qualités respectives de donataire et de donateur.
Il déduit de ce seul fait, qui établit la simulation dont sont entachés les deux actes de donation, que l’administration était en droit d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les deux actes de donation afin d’en restituer le véritable caractère.
Une telle interposition de personne avait pour seul objectif d’éviter la taxation de la donation des 1 543 parts entre M. S et les enfants de son épouse au taux de 60 % prévu par l’article 777 du CGI pour les transmissions à titre gratuit entre personnes non parentes.
Le Comité en déduit que l’administration était en droit de mettre en œuvre la procédure de l’abus de droit fiscal de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales sur le fondement de la fraude à la loi.