Dans une décision très importance du 20 octobre dernier, le Conseil d’Etat vient de confirmer que le taux de 33% appliqué aux plus-values immobilières réalisées par des associés de SCI résident d’un pays tiers autre qu’un état partie à l’EEE (Suisse) contrevenaient aux stipulations du traité instituant la CE relatives à la libre circulation des capitaux.
Dans l’affaire soumise à la CAA de Lyon , une société civile française ayant des associés résidents en Suisse avait acquitté le prélèvement au taux de 33,33% avant de demander le remboursement partiel de l’impôt, au motif que la plus-value réalisée par la société aurait dû être taxée au taux de 16% .
Le Tribunal Administratif de Grenoble a rejeté leur demande dans un jugement en date du 23 novembre 2011 censuré par la Cour d’appel administrative de Lyon (CAA du 29 janvier 2013). En effet, la juridiction d’appel a considéré que le prélèvement au taux majoré de 33,33% était contraire à l’interdiction des restrictions de mouvements de capitaux entre les Etats membres et les pays tiers qu’édicte l’article 63 TFUE.
Les magistrats ont précisé « que le recouvrement étant opéré auprès de la SCI, résidente de France, cette restriction ne peut se justifier par un quelconque risque de fraude, et, contrairement à ce qu’avait décidé la CAA de Versailles dans l’arrêt du 7 juin 2012, la Cour administrative d’appel de Lyon décide que la restriction n’est pas couverte par la clause de gel» .
Pour aller plus loin, lire l’article de Pierre-Alain GUILBERT, notaire associé et Maïder DE LOS SANTOS : Plus-value : taxation à 33% des associés suisses d’une SCI jugée discriminatoire
Le ministre du Budget s’est pourvu en cassation contre cette décision pour demander la censure de la décision de la Cour d’Appel de Lyon. C’est ce pourvoi que le Conseil d’Etat vient de rejeter dans son arrêt du 20 octobre 2014.
« Considérant qu’ainsi qu’il a été dit au point 3, l’article 244 bis A du code général des impôts fait dépendre le taux du prélèvement libératoire sur les plus-values de cession d’immeubles détenus par des sociétés civiles immobilières du lieu de résidence de leurs associés ;que, dès lors, pour déterminer si ces dispositions sont compatibles avec les stipulations du traité instituant la Communauté européenne relatives à la libre circulation des capitaux, le critère de distinction pertinent est le lieu de résidence des associés ;
qu’il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que, pour juger que les dispositions précitées de l’article 244 bis A du code général des impôts n’entrent pas dans le champ du a de l’article 58 du traité instituant la Communauté européenne, la cour administrative d’appel a comparé la situation d’une société civile immobilière dont les associés sont résidents de France, d’un Etat membre de l’Union européenne ou d’un Etat partie à l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale comportant une clause d’assistance administrative et celle d’une société civile immobilière dont les associés sont résidents d’un pays tiers autre qu’un Etat partie à l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une telle convention, tel que la Suisse ;
qu’elle a ainsi tenu compte dans son analyse du critère de distinction pertinent que constitue le lieu de résidence des associés ;
que, par suite, le moyen tiré de ce que la cour administrative d’appel aurait commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de ce critère dans son analyse de la compatibilité des dispositions de l’article 244 bis A du code général des impôts avec le a de l’article 58 du traité instituant la Communauté européenne doit être écarté »
Partant la haute juridiction civile a considéré que le ministre du budget n'était pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt attaqué.
Autrement dit, la haute juridiction administrative considère que les associés de SCI de droit français qu'ils soient résidents français, résidents d'un état membre de l'UE ou d'un état partie à l'EEE, résidents d'un état tiers doivent en cas de plus-value de cession d'un bien immobilier par la société être imposés au taux de 19%.
Précisons que l'Etat Français, donc les contribuables (vous et nous), ont été condamné à 3000 € au titre de l'article L-761-1 du Code de justice Administrative pour un litige perdu d'avance...merci M. Cazeneuve.