En application de l’article 242 ter du Code Général des Impôts (« CGI »), les personnes assurant le paiement de revenus mobiliers (notamment dividendes et intérêts) doivent souscrire, chaque année et pour chaque contribuable, une déclaration (couramment appelé « imprimé fiscal unique » ou « IFU ») récapitulant les sommes payées l’année précédente. Le défaut de déclaration est en principe sanctionné par une amende fiscale égale à 50% du montant des sommes non déclarées.
La question se pose depuis longtemps en pratique , notamment dans le cadre des opérations de LBO dans lesquelles une partie du financement de la holding d’acquisition est fréquemment assurée par voie d’obligations convertibles (les « OC »), de savoir si les intérêts capitalisés annuellement au titre de ces obligations doivent être déclarés dans l’IFU déposé par la société débitrice.
Pour mémoire, les termes et conditions de ce type d’obligations prévoient en règle générale que les intérêts seront automatiquement capitalisés , conformément aux dispositions de l’article 1154 du Code civil, à chaque date anniversaire de l’émission des OC, et que les intérêts capitalisés et les intérêts courus ne seront payés aux porteurs d’OC qu’à la date de conversion ou de remboursement des OC.
Sur cette base, il était raisonnablement possible de considérer que les intérêts capitalisés sur OC ne devaient pas être déclarés chaque année dans l’IFU dès lors la créance d’intérêt accumulée à chaque date anniversaire ne fait l’objet d’aucun paiement effectif au porteur des OC , ni d’une quelconque inscription dans un compte courant individuel qui serait ouvert en son nom ; le paiement des intérêts n’interviendra donc qu’ultérieurement, au moment soit de la conversion soit du remboursement des OC.
Cette analyse n’est toutefois expressément confirmée ni par le CGI ni par la doctrine administrative de sorte qu’ une incertitude demeurait , incertitude renforcée par la règle communément admise selon laquelle une inscription en compte vaut paiement.
En effet, la société débitrice, qui avait à l’origine (lors de l’émission des OC) comptabilisée une dette d’un montant égal au nominal des OC, par exemple 1.000 euros, augmente automatiquement (sans qu’une décision en ce sens ait besoin d’être prise par le porteur d’OC), à chaque date anniversaire de l’émission des OC, le montant de sa dette afin d’y intégrer les intérêts courus sur la période.
Ainsi, au premier anniversaire de l’émission des OC, le montant de dette comptabilisée est égal à 1.000 + (1.000 x 10%) = 1.100 euros. Au deuxième anniversaire de l’émission des OC, le montant de dette comptabilisée est égal à 1.100 + (1.100 x 10%) = 1.210 euros. Etc…
En pratique, il était donc recommandé de déclarer dans l’IFU les intérêts capitalisés, afin d’éviter tout risque d’application de la pénalité de 50%.
Toutefois, l’administration fiscale, dans un courrier adressé récemment à notre cabinet sur cette problématique, nous a expressément confirmé que seul le paiement effectif des intérêts au porteur d’OC au titre de l’année N entrainera l’établissement d’un IFU sur les revenus encaissés en année N, et que les intérêts capitalisés annuellement n’ont donc pas à faire l’objet d’une déclaration sur l’IFU.
Cette position se justifie selon l’administration tant par la rédaction des articles du CGI relatifs à l’IFU (l’article 242 ter vise les « personnes qui assurent le paiement des revenus de capitaux mobiliers » et l’article 49 E de l’Annexe III au CGI vise « la personne ayant encaissé les revenus ») que par le lien qui doit être fait entre la date à laquelle doivent être déclarés les intérêts dans l’IFU et la date d’imposition de ces mêmes intérêts entre les mains d’un porteur d’OC soumis à l’impôt sur le revenu (ce porteur ne devrait pas être soumis à l’impôt sur le revenu au titre de l’exercice de capitalisation dès lors que les intérêts ne sont pas à sa « disposition » au sens de l’article 156 du code général des impôts ; il ne devrait donc être imposé qu’au moment soit de la conversion soit du remboursement des OC).
Cette prise de position mériterait d’être officialisée dans un rescrit officiel de l’administration afin de mettre un terme définitif aux discussions intervenant fréquemment sur cette question lors des due diligences fiscales d’acquisition.