La taxe sur les salaires constitue une charge importante pour les entreprises partiellement ou totalement exonérées de TVA, au premier rang desquelles figure le secteur bancaire et financier. Le calcul de son assiette, déterminé par un "rapport d'assujettissement", est une source de contentieux. En la matière, il vient dêtre jugé que l'inclusion des dividendes (y compris ceux éligibles au régime mère-fille) dans le numérateur de ce rapport ne constitue pas une imposition indirecte prohibée par le droit de l'UE.
Le régime de l'article 231 du CGI impose aux employeurs non assujettis (ou assujettis sur moins de 90 % de leur chiffre d'affaires) à la TVA de payer une taxe sur les rémunérations versées. L'assiette de cette taxe est déterminée par une proportion : les rémunérations sont taxées à hauteur du rapport existant entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la TVA (numérateur) et le chiffre d'affaires total (dénominateur).
La difficulté réside dans la composition de ce rapport. Le texte précise que le chiffre d'affaires s'entend du "total des recettes et autres produits", y compris ceux hors champ de la TVA. L'administration inclut donc au numérateur les produits financiers, et notamment les dividendes perçus par l'entreprise.
Rappel des faits :
La société BNP Paribas Personal Finance s'est acquittée au titre des exercices clos au cours des années 2015 à 2018 de la taxe sur les salaires sur les rémunérations qu'elle a versées, à raison du rapport d'assujettissement existant entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la TVA et le chiffre d'affaires total.
Elle a formé une réclamation afin de demander la restitution de la taxe sur les salaires acquittée au titre de ces années en tant qu'elle correspond à l'inclusion, au numérateur du rapport d'assujettissement à la taxe sur les salaires, des dividendes éligibles au régime " mère-fille " prévu par la directive du 30 novembre 2011 qu'elle a perçus.
Suite au rejet de sa réclamation, BNP a saisi le TA de Montreuil qui a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe
La société BNP Paribas Personal Finance a fait appel du jugement.
La société BNP Paribas Personal Finance, soutient que cette inclusion, pour les dividendes éligibles au régime "mère-fille" (Directive 2011/96/UE), constitue une taxation indirecte de ces dividendes. En effet, l'article 4 de cette directive interdit à l'État membre de la société mère d'"imposer ces bénéfices" distribués. L'enjeu financier est important, la demande de restitution portaant sur plus de 36 M€ pour les années 2015 à 2018.
La Cour administrative d'appel de Paris vient de rejeter la requête de la BNP.
La Cour rappelle d'abord que les dispositions de l'article 231 du CGI
ont pour objet d'instituer une taxe portant sur les rémunérations versées [...] aux salariés.
L'assiette légale de la taxe est donc exclusivement constituée par les salaires.
Elle en déduit que les dividendes, eux,
n'entrent dès lors pas [...] dans l'assiette de la taxe sur les salaires.
La Cour reconnaît que le montant des dividendes est bien "pris en compte [...] pour établir le rapport d'assujettissement", mais elle minimise la portée de cette inclusion. Elle juge que cette prise en compte...
...a pour seul effet de contribuer à déterminer la proportion dans laquelle les rémunérations seront soumises à la taxe sur les salaires
Autrement dit pour la Cour, la seule inclusion des dividendes dans un ratio de calcul ne peut être regardée comme une imposition, même indirectement subie, des bénéfices distribués au sens de la directive. La Cour admet que cela génère un surcroît de taxe sur les salaires, mais elle considère cette conséquence comme un effet économique indirect, et non comme une imposition illégale des dividendes eux-mêmes.