L'avenant du 7 novembre 2022 à la convention franco-luxembourgeois en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu et la fortune vient d'être promulgué. Cet avenant soumis à l’approbation du parlement assouplit le régime fiscal dérogatoire qui s’applique au télétravail des transfrontaliers
Les relations fiscales bilatérales franco-luxembourgeoises sont actuellement régies par la convention du 20 mars 2018. Cette nouvelle convention bilatérale est venue remplacer celle du 1er avril 1958, modifiée à quatre reprises, qui liait jusqu’alors les deux États en matière fiscale. La modernisation des relations bilatérales était attendue et nécessaire, pour tenir compte notamment des dernières avancées de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Cette convention intègre les derniers standards du modèle OCDE, notamment une clause modernisée de l’établissement stable, une définition modernisée de la résidence fiscale et une clause anti-abus générale.
Lors de la négociation de la convention de 2018, le Luxembourg a obtenu l’insertion dans le protocole annexe d’une clause relative au régime d’imposition des télétravailleurs.
L'avenant vise principalement à assouplir les conditions de télétravail pour les travailleurs transfrontaliers franco-luxembourgeois, qui sont nombreux puisqu'on compte environ 121 000 résidents français travaillant au Luxembourg, principalement en Moselle et Meurthe-et-Moselle.
Le paragraphe 3 du protocole annexé à la convention prévoit que, lorsqu’ils télétravaillent moins de 29 jours par an dans leur État de résidence, les transfrontaliers continueront d’être imposés dans l’État d’exercice de leur activité. Lorsqu’ils dépassent ce seuil conventionnel, les travailleurs transfrontaliers sont imposés dans leur État de résidence.
Dans le contexte de sortie de la crise sanitaire, la France et le Luxembourg se sont accordés sur un relèvement du forfait de télétravail de 29 à 34 jours. Cet accord politique s’est traduit par la négociation et la signature le 7 novembre 2022 d’un avenant à la convention fiscale du 20 mars 2018.
L'avenant comprend un titre, un préambule et quatre articles :
L'article 1er modifie le paragraphe 3 du protocole à la convention du 20 mars 2018 en étendant la durée du forfait de télétravail de 29 à 34 jours. Désormais, le seuil de 34 jours conditionne le régime d’imposition des contribuables en télétravail. En-deçà des 34 jours, le contribuable est réputé exercer son activité dans l’État de son employeur et continue d’être imposé dans l’État d’exercice de l’activité. Au-delà des 34 jours de télétravail, le principe d’imposition dans l’État de résidence s’applique dès le premier jour de télétravail.
Les jours de travail effectués dans cette limite de 34 jours seront considérés et imposés comme s'ils avaient été effectués dans l'État de situation de l'employeur.
L'article 2 étend le bénéfice du paragraphe 3 à certains revenus perçus au titre de l'article 18 de la convention du 20 mars 2018 relatif aux fonctions publiques. A ce titre, un résident d'un État disposant de la nationalité de cet État ou d'une nationalité tierce et rendant des services à l'autre État est désormais couvert par le seuil de 34 jours de télétravail.
Le manque à gagner pour les finances de l’État n’est pas négligeable, dans un contexte marqué par la recherche d’économies dans les dépenses publiques.
En l’absence de suivi par l’administration fiscale de la déclaration des revenus issus du télétravail, la perte de recettes pour la France liée à cette clause ne fait l’objet que d’une estimation approximative s’élevant entre 30 et 60 millions d’euros.
La perte supplémentaire résultant de l’augmentation du seuil prévue par l’avenant est encore plus difficile à évaluer car les travailleurs transfrontaliers vont certainement adapter leur organisation à ce nouveau seuil. Elle pourrait varier entre 5 et 10 millions d’euros.
Source : Rapport de Mme Pasacale GOT du 12 décembre 2024
L'article 3 prévoit une rencontre des autorités compétentes française et luxembourgeoise avant le 31 décembre 2024 afin de déterminer les conditions qui s'appliqueront aux intéressés à compter du 1er janvier 2025, et la possibilité de conclure un nouvel avenant aux fins de déterminer ces nouvelles conditions.
L'article 4 précise les modalités et la date d'entrée en vigueur de l'avenant. Il est notamment prévu au paragraphe 2 que les dispositions de l'avenant s'appliquent aux périodes d'imposition commençant à compter du 1er janvier 2023.
Mme Pascale Got, rapporteure :
Le texte aura effectivement un effet rétroactif, au bénéfice des travailleurs transfrontaliers français. Cela ne pose pas de difficulté.
TL;DR
Le changement majeur apporté par cet avenant est l'augmentation du seuil de télétravail de 29 à 34 jours, en dessous duquel les travailleurs continuent d'être imposés au Luxembourg. Cette modification s'aligne sur les conventions similaires que le Luxembourg a négociées avec la Belgique et l'Allemagne. L'avenant étend également ce régime aux employés du secteur public.