Exonération de plus-value immobilière pour remploi : l'exclusion du remboursement d'emprunt confirmée par le juge administratif
Ainsi, les propriétaires de résidence secondaire (non propriétaires de leur résidence principale) qui procèdent à leur cession peuvent être exonérés de plus-value dès lors :
- que la vente porte sur un immeuble bâti affecté à l’habitation ;
- qu’il s’agisse de la première cession d’un logement et de ses dépendances immédiates et nécessaires appréciée à compter du 1er février 2012 ;
- que le cédant n’ait pas été propriétaire de sa résidence principale (directement ou par personne interposée) au cours des quatre années précédant la cession ;
- que le cédant remploie le prix de cession, dans un délai de vingt-quatre mois à compter de cette dernière (date de l’acte), à l’acquisition ou la construction d’un logement qu’il affecte, dès son achèvement ou son acquisition si elle est postérieure, à son habitation principale. La plus-value est exonérée à hauteur de la fraction du prix de cession remployée par le cédant à l’acquisition ou la construction de sa résidence principale.
L’administration précise que :
la fraction du prix de cession est considérée comme remployée dès lors que le cédant acquiert ou construit un logement qu’il affecte à sa résidence principale. L’appréciation du montant remployé se fait donc par comparaison de la fraction du prix de cession dont il demande le remploi au montant qu’il justifie avoir remployé dans le délai de vingt-quatre mois. Ainsi, la fraction du prix de cession, considérée comme remployée, ne peut jamais être supérieure au coût d’acquisition ou de construction du logement
Pour mémoire, dans le cadre d'une réponse ministérielle Fromentin du 11 juin 2013, le ministre a précisé que pour pour apprécier le montant du remploi, il n’était pas tenu compte des remboursements d’emprunt afférents au logement cédé.
Dès lors, l’exonération pourra être totale si le remploi porte sur un logement dont le prix d’acquisition est au moins égal au prix de cession, défini à l’article 150 VA du CGI, du logement pour lequel le contribuable a demandé le bénéfice de l’exonération, sans qu’il soit tenu compte, le cas échéant, pour effectuer cette comparaison, du remboursement du crédit en cours sur le logement cédé, ni de la souscription d’un nouvel emprunt pour l’acquisition de la résidence principale .
Rappel des faits
M. A B était propriétaire, avec son épouse, d'un immeuble situé à Deauville, acquis le 11 mars 2013 pour 344 000 €. Ce bien a été vendu le 20 juillet 2018 pour 498 950 €, générant une plus-value substantielle. L'acte notarié de vente mentionnait que le vendeur était exonéré de l'imposition sur la plus-value immobilière en application de l'article 150 U-II-1° du CGI.
Toutefois, M. B n'a pas remployé l'intégralité du prix de vente dans l'acquisition de sa résidence principale. Une partie du produit de la vente a été utilisée pour rembourser l'emprunt en cours sur le bien cédé, d'un montant de 162 037,47 €. Cette situation a conduit l'administration fiscale à remettre partiellement en cause le bénéfice de l'exonération après plusieurs demandes de renseignements.
La réclamation préalable formée par M. B le 15 février 2023 n'ayant été que partiellement acceptée par décision du 18 avril 2023, le contribuable a saisi le TA de Caen pour obtenir la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il avait été assujetti au titre de l'année 2018.
Sur le fond, M. AB soutenait qu'il n'était pas logique d'exiger le remploi d'une somme dont il n'avait jamais réellement disposé, celle-ci ayant été affectée au remboursement de l'emprunt en cours. Il invoquait également l'insuffisance des explications données par le notaire chargé de la vente concernant les modalités d'application de la loi fiscale.
Logiquement, le tribunal administratif de Caen vient de rejeter la demande.
Sur le bien-fondé de l'imposition, le tribunal rappelle que l'appréciation du montant remployé se fait par comparaison entre la fraction du prix de cession dont le contribuable demande le remploi et le montant qu'il justifie avoir effectivement remployé dans le délai de vingt-quatre mois.
Le tribunal considère que le remboursement de l'emprunt afférent au bien cédé ne peut être regardé comme entrant dans le prix d'acquisition de la résidence principale au sens de l'article 150 U du CGI.
Il résulte toutefois des termes mêmes du 1° bis du II de l'article 150 U du code général des impôts que l'appréciation du montant remployé se fait par comparaison de la fraction du prix de cession dont le contribuable demande le remploi au montant qu'il justifie avoir remployé dans le délai de vingt-quatre mois. Dès lors que M. B reconnaît lui-même dans ses écritures n'avoir pas remployé l'intégralité du prix de vente de l'immeuble situé à Deauville dans l'achat ou la construction d'un logement affecté à l'habitation principale, il ne peut prétendre, sur le fondement de ces dispositions, à bénéficier d'une exonération d'impôt sur la totalité de la plus-value réalisée. La circonstance qu'il a dû s'acquitter du remboursement d'un crédit d'un montant de 162 037,47 euros relatif à l'immeuble cédé en 2018 ne permet pas de regarder le montant de ce remboursement comme entrant dans le prix d'acquisition de sa résidence principale au sens des dispositions précitées du 1° bis du II de l'article 150 U du code général des impôts. Par suite, c'est à bon droit que le service vérificateur a refusé, pour apprécier le montant du remploi du prix de cession de l'immeuble vendu en 2018, de tenir compte du remboursement d'un emprunt afférent à ce bien immobilier.
Solution logique à la lumière de la réponse Fromentin mais qui, à notre connaissance n'avait jamais fait l'objet d'un contentieux devant le juge administratif.