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Impôt sur les sociétés

PVLT et article 219 a sexies-0 bis du CGI : la qualification de SPI ne dépend pas de l'existence d'un droit de propriété ou d'un droit réel sur les immeubles

Nouvelles précisions du juge concernant la notion de société à prépondérance immobilière (SPI), dont la qualification a pour effet d'exclure les plus-values de cession de titres du régime de faveur des plus-values à long terme. Il rappelle que la qualification de SPI ne dépend pas de l'existence d'un droit de propriété ou d'un droit réel sur les immeubles. Le contrôle économique et l'inscription au bilan suffisent à caractériser un actif immobilier au sens de l'article 219 a sexies-0 bis du CGI. Par ailleurs, lorsque l'immeuble n'est pas l'outil d'une activité, mais son objet même, l'exception d'affectation à l'exploitation propre ne peut trouver à s'appliquer.

 

Pour mémoire, l'article 219 a sexies-0 bis du CGI exclut du régime de faveur des plus-values à long terme les cessions de titres de sociétés à prépondérance immobilière non cotées réalisées depuis le 26 septembre 2007.

 

Sont considérées comme sociétés à prépondérance immobilière celles dont l'actif est constitué, à la date de cession ou à la clôture du dernier exercice précédent, pour plus de 50% de sa valeur réelle par des immeubles, des droits portant sur des immeubles, des droits afférents à un contrat de crédit-bail immobilier ou par des titres d'autres sociétés à prépondérance immobilière.

 

Toutefois, le texte prévoit une exception fondamentale : ne sont pas pris en considération les immeubles ou droits lorsque ces biens sont affectés par l'entreprise à sa propre exploitation industrielle, commerciale, agricole ou à l'exercice d'une profession non commerciale. Cette exception vise à éviter de pénaliser les entreprises pour lesquelles l'immobilier constitue un simple outil de production.

 

Toute la difficulté réside dans l'appréciation de cette notion d'exploitation propre, qui oppose les sociétés utilisant l'immobilier comme un simple outil de production à celles dont l'activité consiste, en substance, à valoriser un patrimoine immobilier.

 

Rappel des faits :

La SA VIP Holding a cédé le 11 avril 2013 les titres de la société d'exploitation du Parc des Expositions de la Ville de Paris-Porte de Versailles, désignée VIParis PDV. Cette cession a dégagé une plus-value substantielle de 32 423 611 €, que la SA VIP Holding entendait soumettre au régime de faveur des plus-values à long terme.

 

La situation juridique de VIParis PDV présentait une particularité. Par un contrat de concession conclu le 23 juin 1987 avec la ville de Paris, cette société assurait la gestion et l'exploitation du Parc des expositions de la Porte de Versailles. Dans le cadre de cette convention, la ville avait mis à la disposition de la société des terrains sur lesquels celle-ci avait édifié les immeubles composant le parc. VIParis PDV ne disposait donc d'aucun droit de propriété sur les immeubles, mais seulement d'un droit d'usage dans le cadre du contrat de concession. Ces biens étaient néanmoins inscrits à son bilan conformément aux règles comptables applicables aux contrats de concession.

 

À l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration a notifié à VIParis Holding, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale au titre de l'exercice clos en 2013, assorties d'intérêts de retard.

 

L'administration considérait que VIParis PDV constituait une SPI au sens de l'article 219 a sexies-0 bis, dès lors que la valeur des immeubles inscrits à l'actif de son bilan représentait plus de 50% de cet actif. Elle estimait en outre que ces immeubles n'étaient pas affectés à la propre exploitation de la société, mais constituaient l'objet même de son activité de mise à disposition.

 

Selon l'administration, l'activité principale de VIParis PDV consistait en la location d'espaces à des organisateurs de manifestations, les prestations de services annexes n'étant qu'accessoires. Cette qualification entraînait l'exclusion du régime de faveur et la taxation de la plus-value selon le régime de droit commun.

 

Pour contester ce redressement la SA VIP Holding :

  • soutenait que VIParis PDV ne pouvait être regardée comme une société à prépondérance immobilière dès lors qu'elle n'était titulaire ni d'un droit de propriété ni d'aucun autre droit réel sur les immeubles inscrits à son bilan 
  • estimait que les biens immobiliers composant le Parc des expositions étaient affectés à la propre exploitation commerciale de VIParis PDV. Elle faisait valoir que l'objet social de cette dernière était d'exploiter le parc dans le cadre du contrat de concession et que l'article 5 de ce contrat prévoyait qu'elle aurait "la disposition exclusive du Parc des expositions et l'exploitera librement".
  • faisait valoir que la mise à disposition des espaces aux organisateurs ne constituait pas une location au sens de l'article 1719 du code civil, les preneurs n'ayant pas la libre disposition du parc. Elle mettait en avant les nombreuses prestations de services rendues aux organisateurs, exposants et visiteurs, portant notamment sur la fourniture de matériel électrique et la mise à disposition de parkings.

La société se prévalait également de la doctrine administrative référencée BOI-IS-BASE-20-20-10-30, estimant que l'interprétation administrative était plus favorable que celle retenue par l'administration.

 

Le TA de Paris a le 7 juillet 2023 rejeté la demande de VIParis Holding estimant que VIParis PDV constituait bien une société à prépondérance immobilière et que les immeubles n'étaient pas affectés à sa propre exploitation. SA VIP Holding a fait appel de la décision.

 

 

La Cour administrative d'appel de Paris vient de confirmer le jugement de première instance.

 

Concernant la qualification de SPI et la notion d'actif

La Cour tranche d'abord la question de la prise en compte des immeubles inscrits au bilan dans le calcul du seuil de 50%. Elle énonce que ces biens constituaient un actif au sens de l'article 219 du CGI...

...dès lors que la société exerçait au cours de la période en litige un contrôle sur ces biens immobiliers et en tirait des ressources

La Cour précise que ces biens avaient donné lieu à une inscription au bilan conformément à l'article 621-8 du PCG relatif aux contrats de concession. Elle ajoute que...

...la circonstance que la société VIParis PDV n'était pas propriétaire des immeubles et ne disposait d'aucun droit réel sur ces biens est sans incidence dès lors qu'en application des dispositions de l'article précité il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des immeubles composant l'actif de la société, que celle-ci en soit propriétaire ou non

Cette position se fonde sur une interprétation large de la notion d'actif immobilier, privilégiant le contrôle économique sur la propriété juridique. 

 

Autrement dit, la Cour a écarté l'argument fondé sur l'absence de droit de propriété. Elle a jugé que, pour l'application du texte fiscal, la notion d'actif devait s'entendre au sens économique. Dès lors que la société VIParis PDV exerçait un contrôle sur les immeubles et en tirait des ressources, ces derniers constituaient un actif de son entreprise. La Cour a d'ailleurs pris le soin de noter que cette approche était cohérente avec les règles comptables, qui avaient conduit à l'inscription de ces biens au bilan de la société concessionnaire. La prépondérance immobilière était donc bien caractérisée.

 

 

Concernant l'affectation à l'exploitation propre

La Cour a examiné l'activité réelle de VIParis PDV pour déterminer si les immeubles constituaient un outil de production ou l'objet même de l'activité. Or il ressort de son examen :

  • que pour l'organisation des manifestations prévues au contrat de concession, VIParis PDV concluait avec les preneurs des conventions de mise à disposition portant sur les actifs du parc ;
  • que la SA VIP Holding  ne produit...

...aucune pièce permettant d'établir que la société VIParis PDV organise elle-même des manifestations et que les biens inscrits à son actif ne seraient qu'un outil lui permettant d'exploiter une activité commerciale

La Cour écarte l'argument tiré de ce que les preneurs n'auraient pas eu la libre disposition du parc, jugeant que...

...cette circonstance n'est pas de nature à établir que les immeubles en cause auraient été affectés à l'exploitation de cette société

Elle conclut que l'activité principale de VIParis PDV consistait à mettre à disposition des organisateurs de salons les immeubles composant le parc.

 

Par ailleurs, pour la Cour, les nombreuses prestations de services (sécurité, fourniture d'électricité, gestion des parkings) ne sont qu'accessoires à cette activité principale de location d'espaces. Pour arriver à cette conclusion la Cour s'est basée sur le chiffre d'affaires généré par la mise à disposition des halls lequel était supérieur à celui tiré des prestations de services. Autrement dit, les immeubles ne sont pas un simple outil permettant à la société d'exercer une autre activité commerciale...ils sont l'objet même de son activité principale !

 

TL;DR

  • La qualification de SPI ne dépend pas de l'existence d'un droit de propriété ou d'un droit réel sur les immeubles. Le contrôle économique et l'inscription au bilan suffisent à caractériser un actif immobilier au sens de l'article 219 a sexies-0 bis du CGI.
  • L'exception relative aux immeubles affectés à l'exploitation propre suppose que les immeubles constituent un simple outil de production pour une activité distincte, et non l'objet même de cette activité. La mise à disposition d'espaces, même accompagnée de prestations de services, ne constitue pas une affectation à l'exploitation propre lorsque ces prestations demeurent accessoires.

Publié le mardi 30 septembre 2025 par La rédaction

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