Nouveau rebondissement dans la saga du « statut du bailleur privé ». Deux semaines après le rejet du texte budgétaire à l'Assemblée nationale, le Sénat vient d'adopter, avec un double avis de sagesse de la Commission et du Gouvernement, sa propre version de l'amortissement pour la location nue. C’est une victoire de principe, mais une victoire à la Pyrrhus pour les défenseurs de l’investissement locatif. En effet, le Gouvernement a conditionné son avis de sagesse à l'adoption de trois sous-amendements qui neutralisent deux leviers du dispositif : l'effet sur le déficit foncier, le plafond de défiscalisation et le taux d'amortissement.
L'amendement N° I-2414 rect. sexies constituait une nouvelle tentative d'instaurer l'amortissement fiscal pour la location nue, après l'échec du texte de l'Assemblée nationale consécutif au rejet du projet de loi de finances.
Cette initiative sénatoriale, portée par M. Daubresse et une trentaine de cosignataires, s'appuyait sur le rapport "Pour une relance durable de l'investissement locatif" remis au Gouvernement en juin 2025 par MM. Daubresse et Cosson.
C'était sans compter l'intervention du Gouvernement qui tout en émettant un avis de sagesse, a sous-amendé l'amendement sénatorial afin de neutraliser ses aspects les plus critiquables.
Voici les 3 verrous posés par le Gouvernement dans le texte final codifié sous l'article 12 octies du PLF2026
Le verrouillage du déficit foncier (Sous-amendement I-2766)
- Avant (Proposition Daubresse) : L'amortissement créait un déficit imputable sur le revenu global (salaires, etc.) et le plafond de ce déficit était doublé à 21 400 € .
- Après (Texte adopté sous-amendé) : L'alinéa augmentant le plafond à 21 400 € a été supprimé. De plus, l'amortissement est ajouté à la liste des charges qui sont exclues de l'imputation sur le revenu global.
L'amortissement ne peut servir qu'à ramener l'impôt sur les loyers à zéro. Il ne génère aucune économie d'impôt sur les autres revenus. L'excédent est reportable uniquement sur les futurs revenus fonciers. Le Gouvernement a jugé que permettre à des contribuables aisés d'effacer l'impôt sur leurs salaires grâce à cet investissement était injustifiable en période de redressement des comptes publics
Le "coup de rabot" sur le plafond (Sous-amendement I-2767)
Le Gouvernement a réduit l'attractivité du dispositif proposé par l'amendement Daubresse.
- Avant (Proposition Daubresse) : Le texte initial était plus généreux, plafonnant l'avantage en impôt à 12 000 € par an. Cela permettait théoriquement de défiscaliser des investissements très importants (jusqu'à 1,2 M€ selon les calculs du gouvernement).
- Après (Texte adopté sous-amendé) : Le texte plafonne la "somme des déductions" à 8 000 € par an et par foyer fiscal. Il ne s'agit plus d'une réduction d'impôt de 8 000 €, mais d'une somme maximale à déduire des loyers. Pour un investisseur imposé dans la tranche à 30 %, une déduction de 8 000 € représente une économie d'impôt réelle de seulement 2 400 € (hors prélèvements sociaux). On est très loin des 12 000 € initiaux.
La baisse des taux d'amortissement (Sous-amendement I-2769)
Les taux ont été revus à la baisse par rapport à l'ambition initiale pour étaler le coût budgétaire dans le temps.
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Neuf : Le taux passe de 5 % à 3,5 %
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Ancien : Le taux passe de 4 % à 3 % (Intermédiaire).
Tableau comparatif
Affaire à suivre en CMP