Le nouveau dispositif adopté cette nuit marque un changement de règle en matière de fiscalité immobilière et d'investissement locatif. C'est la naissance d'un "Statut du Bailleur Privé" longtemps débattu, qui abandonne la logique des réductions d'impôt (de type Pinel) au profit d'un mécanisme comptable : l'amortissement.
Ce vote n'est pas l'adoption d'une simple proposition, mais le résultat d'une intense négociation parlementaire. L'amendement initial a été accepté dans son principe, mais l'adoption en série de sous-amendements 12 (venant de tous les bancs, y compris du groupe majoritaire) avec l'avis favorable du Gouvernement a servi à borner, restreindre et cibler le dispositif.
L'amendement initial propose une nouvelle idée pour la location nue (revenus fonciers) : permettre de déduire fiscalement une partie du prix du bien chaque année, ce qui était jusqu'ici réservé à la location meublée (BIC). Cette proposition est présentée comme étant neutre d'un point de vue budgétaire :
- À court terme : Le coût des déductions (103 M€ en 2026) est immédiatement compensé par les recettes fiscales générées par la relance de l'activité (TVA sur le neuf, DMTO sur l'ancien).
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À long terme : L'État récupère sa mise. L'amendement modifie le calcul de la plus-value de revente pour y réintégrer tous les amortissements déduits. L'avantage fiscal n'est donc qu'une avance de trésorerie, pas une subvention.
La proposition initial est issue de l'amendement N° I-582 (Rect) de M. de Courson. Elle vise à rétablir une déduction au titre de l'amortissement dans le régime des revenus fonciers (location nue), un mécanisme jusqu'ici réservé à la location meublée (BIC). Le principe est que le propriétaire peut déduire chaque année un pourcentage du prix d'acquisition, reflétant la perte de valeur du bâti (le terrain, estimé à 20 %, est exclu). L'amendement vise deux marchés en crise, le neuf et l'ancien (avec travaux).
12 amendements ont toutefois restreint le dispositif initial.
Restriction sociale (S/A 3973, S/A 3944) : L'amendement de base N° I-582 (Rect) ne l'imposait que pour l'ancien. Les sous-amendements adoptés rendent le respect des plafonds de loyers et de ressources du locataire obligatoire pour tous les biens, neufs comme anciens. C'est un recentrage majeur vers le logement abordable.
Restriction écologique (S/A 4001) : Pour lutter contre l'artificialisation des sols , le dispositif est limité aux logements situés en "bâtiment d'habitation collectif". Les maisons individuelles sont exclues.
Restriction anti-abus (S/A 3970) : Tirant les leçons du Pinel , il est désormais interdit de louer à un membre de sa famille élargie (parents, enfants, frères/sœurs...), et non plus seulement à son foyer fiscal.
Restriction de durée (S/A 3999) : L'engagement de location minimal est porté de 9 à 12 ans, pour garantir un effet à long terme sur l'offre locative.
Restriction financière (S/A 3998) : L'amendement initial plafonnait l'avantage fiscal (la baisse d'impôt) à 10 000 € par logement, jugé excessivement généreux. Le sous-amendement plafonne la déduction (l'amortissement) elle-même à 8 000 € par foyer fiscal. Cela limite l'intérêt du dispositif aux biens d'environ 350 000 € maximum et empêche de cumuler plusieurs opérations.
Restriction de temps (S/A 4023) : Le dispositif est une expérimentation. Il ne s'appliquera qu'aux acquisitions et permis de construire déposés entre le 1er janvier 2026 et le 31 décembre 2028.
En parallèle, soulignons l'adoption d'un sous-amendement (S/A I-3969) du groupe Socialiste et ayant reçu un "avis de sagesse" du Gouvernement. Il ne modifie pas le nouveau dispositif, mais s'attaque à son principal concurrent : la location meublée (BIC). Il propose de limiter l'amortissement des meublés à un "taux unique de 2%". L'objectif est de rendre l'amortissement pour la location nue plus incitatif en mettant fin à l'avantage des meublés (loyers plus élevés, baux plus courts)
Le nouveau dispositif d'amortissement pour la location nue