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Impôt sur la fortune

IFI et LMP : sans bénéfice fiscal positif...point d’exonération au titre des biens professionnels

L'exonération IFI pour les loueurs en meublé professionnel : une qualification conditionnée à la réalisation d'un bénéfice imposable.

 

Confirmation jurisprudentielle concernant les conditions d'exonération des biens professionnels en matière d'ISF et d'IFI pour les loueurs en meublé professionnels (LMP). L'arrêt s'inscrit dans la continuité de la jurisprudence récente de la Cour de cassation en précisant les modalités d'appréciation de la condition de seuil de 50% des revenus professionnels.

 

Le contexte juridique repose sur les articles 885 R et 975 V-1° du CGI, qui définissent les critères pour qu'un local loué en meublé soit considéré comme un bien professionnel, et ainsi exonéré d'ISF ou d'IFI. Ces conditions sont au nombre de trois :

  • une inscription au RCS,
  • des recettes annuelles supérieures à 23 000 €,
  • et le fait que les revenus tirés de cette activité représentent plus de 50 % des revenus professionnels du foyer fiscal soumis à l'impôt sur le revenu.

Attention, en 2018, le Conseil Constitutionnel dans sa décision n° 2017-689 QPC du 8 février 2018 a déclaré inconstitutionnelle la condition d'inscription au RCS pour l'exonération des plus-values de cession de locaux professionnels prévue à l'article 151 septies du CGI. Cette décision s'appuyait sur le principe d'égalité devant la loi et les charges publiques, arguant que l'exigence d'inscription au RCS créait une différence de traitement injustifiée entre les contribuables exerçant une même activité. C'est dans ce sillage que s'inscrit la présente QPC.

L’administration fiscale a tiré les conséquences de cet arrêt en supprimant de sa doctrine BOFIP-Impôt, les commentaires relatifs à l’inscription au registre du commerce et des sociétés BOI-BIC-CHAMP-40-10-20190320

 

 

Rappel des faits :

L'espèce concerne M.X, contribuable retraité né en 1946, propriétaire de biens immobiliers qu'il loue en meublé. Ce contribuable a souscrit ses déclarations d'ISF pour les années 2014 à 2017 et d'IFI pour les années 2018 et 2019 en excluant de l'assiette ses biens immobiliers locatifs, considérant qu'ils bénéficiaient de l'exonération prévue pour les biens professionnels.

Le problème était lié l'interprétation de la condition de seuil de 50% des revenus professionnels dans le contexte spécifique d'un contribuable retraité dont l'activité de location meublée dégageait des résultats déficitaires ou nuls selon les règles fiscales. 

L'administration fiscale a adressé une proposition de rectification le 28 mai 2021 pour réintégrer les biens immobiliers dans l'assiette de l'ISF et de l'IFI (Soit 267 931 € de suppléments d'ISF pour les années 2014 à 2017, 29 622 € d'IFI pour 2018 et 27 572 € pour 2019).

 

Suite au rejet de sa contestation, M.X a saisi la juridiction administrative.

 

Ce dernier :

  • soutient d'abord que la condition des 50% ne pouvait s'appliquer à sa situation puisque, étant retraité, ses pensions n'entraient pas dans la liste limitative des revenus visés à l'article 885 R, rendant ses revenus de location meublée sa seule activité professionnelle au sens du texte.
  • conteste ensuite le principe selon lequel une activité déficitaire ou à résultat nul ne pourrait être qualifiée d'activité professionnelle principale.
  • affirme enfin avoir dégagé des bénéfices comptables positifs de 2014 à 2017, contestant le calcul fiscal de l'administration.

L’administration fiscale de son côté oppose une lecture stricte des textes et de la jurisprudence. La fraction « 50 % » vise un bénéfice commercial net annuel de l’activité de location meublée. Dès lors, une année en déficit (2013, 2018) exclut, par principe, l’exonération des biens affectés pour l’ISF 2014 et l’IFI 2019. S’agissant des années 2014-2017, le bénéfice imposable, une fois pris en compte le plafonnement et les reports d’amortissements prévus par l’article 39 C, est nul ; la condition des 50 % fait défaut.

À l’appui de son argumentation, l'administration fiscale se prévaut de la solution dégagée par la Cour de cassation le 20 décembre 2023 (n° 21-25.340), qui retient que le seuil s’apprécie au regard du bénéfice net de l’activité, pour permettre une comparaison homogène avec les autres revenus du foyer fiscal.

 

Le Tribunal a suivi l'administration et débouté M. X de sa demande

 

  • Sur la condition de seuil de 50%, le tribunal a suivi la jurisprudence de la Cour de cassation de 2023 précitée, confirmant que l'appréciation de cette condition nécessite la prise en compte du bénéfice commercial net annuel. Cela exclut mécaniquement les activités déficitaires du bénéfice de l'exonération, solution logique pour éviter que des contribuables puissent artificiellement créer des déficits tout en prétendant à l'exonération.
  • L’argument tiré du statut de retraité est écarté : l’absence d’autres revenus « éligibles » au dénominateur ne dispense pas de démontrer un numérateur positif.
  • Enfin, le tribunal a précisé que le revenu à considérer correspond au résultat fiscal de l'activité, tenant compte non seulement du résultat comptable mais également des amortissements et de leurs reports selon les articles 38 et 39 C du CGI. Autrement dit, le « revenu à prendre en considération » correspond au résultat fiscal, non au flux de trésorerie : il doit intégrer les corrections extra-comptables imposées par les articles 38 et 39 C, notamment le plafonnement annuel d’amortissement et son report. De cette qualification fiscalo-comptable découle la solution : le déficit constaté en 2013 et 2018 entraîne l’échec de la condition des 50 % pour l’ISF 2014 et l’IFI 2019 et le résultat nul sur 2014-2017, après amortissements reportés, fait également obstacle à l’exonération pour l’ISF 2015-2017 et l’IFI 2018.

Cette décision confirme qu'un résultat fiscal déficitaire ou nul de l'activité de location meublée exclut la qualification de biens professionnels pour l'IFI. Le bénéfice imposable est une condition sine qua non pour l'exonération, et le fait que le loueur n'ait pas d'autres revenus professionnels ne dispense pas de cette obligation. 

Pour mémoire, dans une réponse ministérielle Vidal du 9 avril 2024, le ministre a eu l'occasion de préciser :

En présence d'une activité de loueur en meublés générant des recettes annuelles supérieures à 23 000 €, mais dont le résultat est déficitaire, la condition de seuil de 50 % du revenu ne peut être considérée comme remplie.

Publié le mercredi 6 août 2025 par La rédaction

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