Décision de la CJUE en matière de prélèvements sociaux : l'éclairage de Lazard Frères Gestion

03/03/2015 Par Stéphane Jacquin
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La Cour de justice de l’Union européenne, dans un arrêt en date du 26 février 2015, a considéré qu’un contribuable domicilié en France mais travaillant aux Pays-Bas ne pouvait pas être soumis aux prélèvements sociaux (CSG, CRDS…) en France sur ses revenus du patrimoine puisqu’il relevait de la sécurité sociale néerlandaise et non française.

Dans une précédente décision rendue en 2000 la Cour de justice de l’Union européenne avait déjà considéré que les contributions sociales françaises ne pouvaient être prélevées sur les revenus d’activité et de remplacement de travailleurs qui bien que résidant en France étaient soumis à la législation de sécurité sociale d’un autre état membre.

Il résulte donc de la jurisprudence de la CJUE que la CSG et la CRDS doivent bien être considérées comme des contributions destinées à financer la sécurité sociale et non comme des impôts et qu’en conséquence elles ne peuvent être supportées par un contribuable relevant d’un régime de sécurité sociale étranger en raison de l’interdiction du cumul des législations de sécurité sociale édicté par un règlement communautaire datant de 1971.

 

Cela signifie donc que la loi votée en juillet 2012 soumettant aux prélèvements sociaux les revenus fonciers et les plus-values immobilières réalisés par les non-résidents est contraire à la jurisprudence de la CJUE dès lors que ces derniers sont affiliés auprès de caisses de sécurité sociale étrangères.

Toutefois, au plan pratique, cette décision ne dispense pas les contribuables concernés de s’acquitter des prélèvements sociaux sur les revenus fonciers et les plus-values immobilières de source française. Ils doivent continuer à le faire tant que la loi ne sera pas modifiée.

Dans son communiqué en date du 26 février 2015, le gouvernement a précisé :

« Le Gouvernement prend acte de cet arrêt qui s’inscrit dans le cadre d’une procédure engagée par une personne qui résidait en France et y payait ses impôts, au titre de revenus du patrimoine de source néerlandaise, conformément aux règles d’assujettissement de la CSG en vigueur depuis sa création. La suite de la procédure implique que le Conseil d’Etat statuera définitivement sur le contentieux qui lui est soumis, en tenant compte de l’arrêt de la CJUE. C’est après cette décision que le Gouvernement sera, le cas échéant, amené à prendre les dispositions éventuellement nécessaires.

En tout état de cause, le Gouvernement rappelle son attachement à la contribution équitable aux charges publiques de l’ensemble des revenus, y compris les revenus du capital, dans le respect des conventions internationales et du droit communautaire. »

Pour qu’elle le soit il conviendra probablement d’attendre que la Commission européenne adresse une mise en demeure à la France. Dans l’intervalle les non-résidents doivent continuer à s’acquitter des prélèvements sociaux et doivent s’ils souhaitent pouvoir un jour les récupérer introduire une réclamation contentieuse auprès de l’administration et ce avant l’expiration du délai de réclamation.

A cet égard, le délai de réclamation est de deux ans à compter de l’émission du rôle pour les impôts recouvrés par cette voie ou dans les deux ans du paiement pour les impôts ne donnant pas lieu à l’émission d’un rôle.

Ainsi , les non-résidents qui ont acquitté des prélèvements sociaux en 2013 au titre de leur revenus fonciers 2012 ont jusqu’au 31 décembre 2015 pour adresser une réclamation visant à obtenir leur remboursement. De même les contribuables non-résident qui ont vendu un bien immobilier en 2013 et ont été soumis à cette occasion aux prélèvements sociaux ont jusqu’au 31 décembre 2015 pour réclamer l’imposition correspondante.

Article de Stéphane Jacquin, Associé-Gérant chez Lazard Frères Gestion